1. L’activité disciplinaire de l’ACPR : plus de sanctions, plus lourdes, avec des règles de procédure plus précises.
L’Autorité a alimenté les procédures disciplinaires via plus de 340 contrôles, en 2013, en légère hausse.
La Commission des Sanctions de l’Autorité a pris les contours d’un Tribunal bancaire et assurantiel. Un rôle partagé avec la Commission des sanctions de l’AMF.
Cette fonction juridictionnelle est intense et en pleine transformation.
Son activité est décrite à la page 115 du Rapport : la Commission a prononcé dix décisions : le double de celles rendues en 2011 ou en 2012. Le délai moyen d’instruction ressort à neuf mois. Huit saisines nouvelles ont été reçues.
Le durcissement des quanta de sanctions était déjà palpable, en 2013. Les amendes de 5 millions et de 3 millions d’euros datent de 2014. Mais le contrôle des dispositions du droit au compte a, naturellement, fait partie des actions engagées en 2013, et relatées à ce titre. Une amende de 10 millions d’euros a été infligée en 2013, au titre de la lutte contre le blanchiment et la fraude fiscale. En 2013, la Lutte Contre le Blanchiment et contre le Financement du Terrorisme (LCB-FT) constituait presque la moitié des sanctions.
La décision rendue à l’encontre d’un Courtier en assurance, le 18 juin 2013, illustre bien les difficultés pratiques de mise en place des obligations d’information et de conseil, tout autant que leur caractère impératif.
La procédure devant la Commission des Sanctions trouve de l’épaisseur. L’Autorité précise les droits de l’assujetti, avant la phase disciplinaire, donc, au stade du contrôle. Les contrôleurs sont tenus à un devoir de loyauté dans la recherche des preuves, afin de ménager les droits de la défense en cas de procédure disciplinaire. La Commission s’assure qu’aucune atteinte irrémédiable à ces droits n’a été portée, avant la phase disciplinaire. Le Code monétaire ne subordonne pas l’ouverture d’une procédure disciplinaire à l’échec d’une recommandation de l’ACPR ou encore, à l’absence de coopération de l’établissement.
L’Autorité poursuivante doit établir la preuve des manquements, devant la Commission des Sanctions. En présence des commencements de preuve, issus du contrôle, l’assujetti doit apporter des preuves contraires. A défaut, un manquement vraisemblable est considéré comme prouvé, en cas dénégations non argumentées de l’assujetti. L’ensemble est un progrès, en regard de l’article 9 du Code de procédure civile.
L’Autorité rappelle que les manquements pouvant donner lieu à des poursuites ne bénéficie d’aucune prescription, le Code monétaire et financier ne prévoyant aucune disposition expresse, en ce sens. Cette absence de prescription a été jugée conforme à la Constitution. Tout manquement, quelle que soit sa date de commission, peut donc faire l’objet de poursuites –selon la Commission. La proportionnalité des peines peut servir à ajuster des sanctions pour des manquements lointains. L’absence de prescription des manquements, dans le contexte rapidement évolutif du droit et des pratiques bancaires et assurantielles, fait peser une lourde contrainte sur les activités de ces entreprises.
La Commission ne s’estime pas obligée de transmettre une question préjudicielle à la Cour de Justice de l’Union Européenne, au motif qu’il existe un recours de pleine juridiction (devant le Conseil d’Etat) contre ses propres décisions. Quatre jugements sont en cours d’examen auprès du Conseil d’Etat.
Ce dernier a refusé, en janvier 2014, la transmission d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité ; il juge ainsi que les pouvoirs de sanctions de la Commission des Sanctions de l’ACPR sont conformes à la Constitution.
Les règles de procédure devant la Commission des Sanctions s’affinent, étant davantage respectueuses des droits de la défense. Dématérialisée, cette procédure trouve son terme dans une nouvelle salle d’audience. De manière anecdotique, il manque encore la diffusion publique du calendrier des audiences programmées, afin de rendre effectif le principe posé par l’article 22 du Code de procédure civile, soit le caractère public des débats.
L’amélioration des pratiques commerciales figure parmi les axes « majeurs » d’activité de l’ACPR, en 2014, notamment, dans la mise en application du devoir de conseil des intermédiaires, en assurance comme dans la commercialisation des crédits.
2. La protection des clients : un long chemin, appuyé par la Conformité.
Dans ce domaine, l’ACPR a mené quatre-vingts dix contrôles sur place via sa Direction du contrôle des pratiques commerciales. Elle a décortiqué plus de 4.000 messages publicitaires, sans commentaire particulier, d’ailleurs.
L’ACPR pointe comme pratique erronée, l’intégration des revenus du conjoint dans les analyses de solvabilité, en l’absence de toute solidarité contractuelle. L’observation porte sur le crédit renouvelable, mais peut être utile aux professionnels dans toute forme de crédit.
Pour les Courtiers-IOBSP, elle est également intéressante, au titre de leur devoir spécifique de conseil en crédit (art. R. 519-21 et R.519-28 du Code monétaire et financier). La prise en compte systématique des revenus du conjoint, sans vérification préalable des critères attestant d’une solidarité juridique, surestime les capacités d’emprunt. Ceci constitue une mauvaise pratique.
Le contrôle des conditions d’accès à la profession est désormais intégré par l’Autorité : le défaut d’immatriculation ne permet plus d’exercer une activité d’intermédiation, que ce soit bancaire ou assurantielle.
La convergence des deux régimes est désormais visible.
La capacité professionnelle reste lacunaire. L’ACPR rappelle qu’elle s’applique également aux salariés. A ce titre, l’intermédiaire ou l’entreprise intermédiaire doit en assurer le contrôle dès l’embauche. La commercialisation effective ne peut débuter qu’une fois la capacité professionnelle : le cursus de formation ne permet pas, en parallèle, de vendre des produits ou des services bancaires ou assurantiels.
Notons que l’ACPR signale que 70 % des établissements de crédit déclarent déployer un dispositif de formation permanente des conseillers sur les produits. Trois conseillers sur dix ne sont donc pas en mesure d’entretenir leur formation au conseil, alors qu’ils pratiquent la vente. De plus, aucune information n’est donnée sur leur formation initiale, puisque, pour les salariés de ces établissements, la vente directe de produits n’est assortie d’aucune obligation de capacité professionnelle, à la différence des intermédiaires bancaires (IOBSP et Courtiers).
Toujours pour les vendeurs directs des établissements de crédit fournisseurs de produits, le Rapport relève que les systèmes de rémunération n’intègrent toujours pas les critères qualitatifs de respect des règles de protection de la clientèle.
L’ACPR attire l’attention sur la Conformité des groupes de sociétés : chaque Entité doit, individuellement, obtenir l’immatriculation autorisant à l’accès à la profession d’intermédiaire. L’Autorité rappelle que le Code monétaire et financier définit la rémunération des opérations, de manière large, comme « tout avantage économique » (article L. 519-1 de ce Code). Ainsi, toute forme de gain financier est considéré comme une rémunération, quelle que soit la forme juridique de celle-ci.
Les conventions entre fournisseurs (établissements de crédit ou organismes d’assurance) et distributeurs (intermédiaires bancaires et assurantiels, dans toutes leurs catégories) doivent respecter les mentions posées par le Code monétaire et financier. L’Autorité constate des manquements, dans la pratique. En particulier, les dispositions qui autorisent la circulation efficace et précise des informations commerciales nécessaires à l’intermédiaire pour respecter ses obligations d’information et de conseil, doivent figurer clairement. La fourniture de produits bancaires et d’assurance suppose la même fourniture des informations techniques correspondantes. L’Autorité suggère que ces conventions contiennent des dispositions pour assurer la continuité des informations délivrées aux clients, en cas d’arrêt d’activité des intermédiaires.
Les dispositifs de traitement des réclamations sont analysés comme encore insuffisants, en regard de la Recommandation ACPR 2011-R-05, applicable depuis le 1er janvier 2012.
Le volume des réclamations formulées directement auprès de l’Autorité présente une nette augmentation. Le crédit représente un tiers des réclamations bancaires et l’assurance-dommage, presque une réclamation sur deux, pour l’assurance.
L’Autorité signale des pratiques de proposition de prêts directs sur internet, via différentes modalités, avec perception immédiate de rémunération, sans service effectif.
L’ACPR rappelle aux établissements de crédit la vigilance à accorder aux opérations réalisées en partenariat de distribution avec des intermédiaires (Position ACPR 2013-P-01).
Le devoir de conseil du Courtier, en crédits comme en assurance, reste la voie centrale pour doter toutes les entreprises bancaires et assurantielles d’une Conformité solide.{{}}
Liens avec les deux Rapports de l’ACPR :
Discussion en cours :
je constate tout de même que la tutelle est encore loin de la vérité concernant les véritables pratiques commercialeś notamment dans les réseaux bancaires et d’assurances. Les règles de bonnes conduites y sont systématiquemnt considérées comme des freins à la vente de produits financiers....