Les titulaires de droits sur une marque ont plusieurs moyens afin de la protéger et d’en défendre les intérêts. Parmi ces moyens, il existe une voie préventive qu’est la procédure d’opposition à l’enregistrement d’une marque devant le directeur de l’Institution National de la Propriété Intellectuelle (INPI).
En effet, cette procédure va permette au titulaire d’une marque antérieure de s’opposer à l’enregistrement d’une marque, qui, s’il aboutit, pourrait lui porter préjudice.
Cependant, avant que le directeur de l’INPI fasse droit cette demande en refusant l’enregistrement de la marque contestée, le titulaire de la marque antérieure doit démontrer trois éléments cumulatifs : l’identicité ou la similarité des produits et services désignés par la demande à ceux de sa marque, la similarité des signes en cause et le risque de confusion entre les deux marques dans l’esprit du public.
Ce dernier est d’autant plus important.
Or, cette démonstration n’est pas simple, et la décision de rejet de la demande d’opposition formée par SFR contre l’enregistrement de la marque complexe « C carrément net » le prouve. En effet, il aurait pu sembler plus aisé pour SFR d’effectuer cette démonstration compte tenu de sa notoriété, mais ce ne fut pas le cas.
En l’espèce, la Société Française de Radiotéléphonie (SFR) a formé opposition à l’enregistrement de la marque « C carrément net » devant le directeur de l’INPI le 22 juillet 2014 sur la base de sa marque antérieure « Carrément vous.SFR ».
La demande d’enregistrement de la marque contestée vise les produits et services « Logiciels (programmes enregistrés) ; logiciels (programmes enregistrés) de gestion administrative, financière et comptable destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit ; logiciels en tant que service (SaaS) de gestion administrative, financière et comptable destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit ; Fourniture d’accès à distance à des logiciels en tant que service (SaaS) de gestion administrative, financière et comptable destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit ; fourniture d’accès à des données ou documents liés à la gestion administrative, financière et comptable et destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit, stockés électroniquement dans des fichiers centraux pour consultation à distance ; Élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour et location de logiciels (programmes enregistrés) ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour et location de logiciels (programmes enregistrés) de gestion administrative, financière et comptable destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour et location de logiciels en tant que service (SaaS) de gestion administrative, financière et comptable destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit ».
Ainsi, SFR fait grief à la marque contestée d’être enregistrée pour des produits identiques et similaires à certains des produits et services de sa marque antérieure, à savoir « logiciels, notamment logiciels de compression de données, logiciels pour le traitement de l’information, logiciels de création, de gestion, de mise à jour et d’utilisation de bases de données, logiciels de fourniture d’accès à un service de messagerie électronique, logiciels pour la fourniture d’accès à un réseau local sans fil, notamment à courte distance ou à un réseau de radiocommunication ; logiciels pour la fourniture d’accès à un réseau informatique ou de transmission de données, notamment à un réseau de communication mondiale (de type Internet) ou à accès privé ou réservé (de type Intranet) ; logiciels de jeux ; logiciels permettant de télécharger des images, du son et des données, logiciels permettant de télécharger des messages électroniques avec ou sans pièce jointe ; logiciels de contrôle d’accès à un service de messagerie électronique, logiciels de contrôle d’accès à un réseau local sans fil, notamment à courte distance ou à un réseau de radiocommunication ; logiciels permettant de se connecter à des bases de données, à des réseaux locaux et à l’Internet ; logiciels ou matériel pour le contrôle d’accès à un réseau informatique ou de transmission de données ; recueil de données dans un fichier central ; systématisation de données dans un fichier central ; Services de transmission de messages électroniques ; services de diffusion et de fourniture (transmission) de contenus multimédias sur des réseaux électroniques de communications, sur des réseaux de communication mondiale (de type Internet) ; service de fourniture d’accès à Internet pour des utilisateurs ; services de fourniture d’accès à des centres serveurs nationaux et internationaux. Services de location centres serveurs de base de données (logiciels), services d’élaboration (conception) de logiciels, services de maintenance de logiciels, services de mise à jour de logiciels ».
Elle reproche également à la marque contestée d’imiter le signe de sa marque antérieure et invoque la notoriété du logo SFR pour appuyer ses propos.
Dans ses observations en réponse à l’opposition, la société déposante de la marque « C carrément net » conteste d’une part la comparaison des signes effectuée par SFR, et d’autre part, la comparaison des produits et services en raison du domaine particulier de ceux de la demande d’enregistrement, à savoir le domaine de la gestion comptable, administrative et financière destinées professions juridiques et des professionnels du droit.
Dans sa décision, le directeur de l’INPI effectue lui aussi la comparaison des signes et la comparaison des produits et services afin déterminer s’il existe un risque de confusion entre les deux marques.
Ainsi, s’il reconnait l’identicité et la similarité des produits et services de la marque contestée à ceux de la marque antérieure du fait que ces derniers sont aussi susceptible de s’appliquer au domaine de la gestion comptable, administrative et financière destinés aux professions juridiques et aux professionnels du droit, il refuse d’admettre l’imitation du signe « Carrément vous.SFR » par la marque contestée.
En effet, la décision rappelle le principe selon lequel « l’imitation nécessite la démonstration d’un risque de confusion entre les signes, lequel doit être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; que cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs et dominants ».
Or en l’espèce, bien que le signe contesté et la marque antérieure comportent tous deux des éléments verbaux accompagnés d’éléments figuratifs, des ressemblances visuelles et phonétiques en raison de la présence du terme Carrément, d’un élément figuratif proche et de couleurs voisines, cela ne suffit pas a créer un risque de confusion entre les deux.
En outre, les signes se distinguent dans leur structure et dans leur présentation par des calligraphies employées qui leur confère des physionomies distinctes et que phonétiquement, les signes possèdent des rythmes et des sonorités finales différents.
L’impression d’ensemble distingue bien les deux signes.
De plus, si le terme distinctif commun « Carrément » apparaît essentiel au sein du signe contesté, ce n’est pas le cas dans la marque antérieure où c’est l’élément SFR, qui par sa taille et sa présentation, est mis beaucoup plus en évidence.
Et même si « le risque de confusion dans l’esprit du public doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, de sorte qu’un faible degré de similitude entre les signes peut être notamment compensé par la connaissance de la marque antérieure par une partie significative du public concerné », en l’espèce, cela ne fait que conforter l’idée que l’élément SFR est prépondérant au sein de la marque antérieure au détriment du slogan « carrément vous ».
Ainsi, tant en raison des différences visuelles et phonétiques entre les deux signes pris dans leur ensemble que de la prise en considération de leurs éléments distinctifs et dominants, il n’existe pas de risque de confusion, le public n’étant pas susceptible d’établir une association entre ces deux signes.
Le directeur de l’INPI a donc rejeté la demande d’opposition de SFR et a autorisé l’adoption comme marque du signe « C Carrément Net » pour désigner des produits identiques et similaires sans porter atteinte aux droits antérieurs de l’opposante sur la marque « Carrément vous.SFR ».