Libres propos - La distinction est-elle encore d’actualité ?
Il a été longtemps enseigné que dans l’entreprise le mandataire social et le salarié avaient des statuts différents tant au regard du droit de la sécurité sociale que de celui du travail, le premier étant considéré comme indépendant, le second tenu par un lien de subordination.
De cette summa divisio (alors que le latin était encore compris), il en résultait que le mandataire social était bénéficiaire d’une protection sociale au titre de non-salariés, non justiciable du juge prud’homal, le salarié relevant du régime général, autorisé à saisir le Conseil de Prud’hommes.
Si le droit des sociétés n’est pas étranger à l’évolution des deux statuts, il est manifeste que cette distinction s’estompe, le dirigeant étant souvent soumis au régime général de sécurité sociale, bénéficiant d’une assimilation de par la loi, le même dirigeant soumis au droit du travail par « analogie ».
Si une même protection sociale peut être admise au regard de la sécurité sociale, il n’en est pas de même à l’aune du Code du Travail.
En effet, le juge prud’homal reconnaît volontiers la qualité de salarié à un Président de Conseil d’Administration, de Président du directoire, de membres du conseil de surveillance, soit par « autorisation » de la loi, soit par droit prétorien… selon les critères habituellement retenus (réalité d’un emploi salarié, subordination juridique, fonction technique distincte de la fonction de direction et si possible rémunération éclatée).
En d’autres termes, soit le législateur, soit l’autorité judiciaire privilégie le salariat en faisant appel à des considérations étrangères à la définition « universitaire » du contrat de travail qui est l’engagement d’une personne à travailler pour le compte et sous la subordination d’une autre moyennant rémunération.
A qui s’adresse encore une telle définition que la doctrine ne modifie pas ?
Il est permis de s’interroger sur le maintien du concept de mandataire social dans la vie économique, puisqu’aussi bien chaque dirigeant souhaite bénéficie d’une protection sociale accrue, dont celle de l’assurance-chômage, et de la possibilité de saisir le juge « naturel » du contrat de travail qui est le juge prud’homal.
Cette réflexion s’inscrit dans une perspective de mise en harmonie de situations de droit et de fait mélangées.