La Cour de cassation est venue à plusieurs reprises définir les contours de la mauvaise foi. Il en ressort que la mauvaise foi ne peut résulter que de la connaissance par l’intéressé de la fausseté des faits qu’il dénonce [2], et non de la seule circonstance que les faits qu’il dénonce ne sont pas établis [3]. Ce qui implique que la seule preuve que les accusations ne sont pas fondées ou que les faits invoqués ne sont pas établis est insuffisante, il convient de démontrer que le salarié avait pleinement connaissance du caractère mensonger de ses accusations, et ce au moment où il les a formulées.
Dans deux arrêts en date du 10 juin 2015, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur des accusations de harcèlement moral ou sexuel de nature à caractériser la mauvaise foi.
Dans la première espèce [4], il s’agissait d’un salarié licencié pour faute grave, celle-ci étant motivée par la dénonciation de faits de harcèlement moral non avérés afin de s’opposer aux directives de l’employeur. La Cour de cassation a relevé d’une part que la lettre de licenciement reprochait au salarié d’avoir accusé son employeur de harcèlement moral, et d’autre part que l’employeur n’établissait pas la mauvaise foi qui ne se caractérise que par la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce. Par conséquent, le licenciement est entaché de nullité.
Dans la seconde espèce [5], la Cour d’appel a prononcé la résiliation judiciaire d’un contrat d’apprentissage aux tords de l’apprentie au motif que celle-ci a porté des « accusations très graves et totalement infondées de harcèlement moral voire sexuel » en invoquant des faits anodins qui se sont déroulés en dehors du temps de travail. La Cour de cassation a cassé le jugement d’appel au motif que la Cour d’appel n’a pas caractérisé la mauvaise foi de l’apprentie, laquelle ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits dénoncés.
La Cour de cassation rappelle ici que l’immunité d’un salarié dénonçant des faits de harcèlement moral ou sexuel ne peut être levée que si l’employeur caractérise la mauvaise foi de l’intéressé, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par celui-ci de la fausseté des faits dénoncés. Il découle de ces arrêts, qu’accuser son employeur de harcèlement moral pour s’opposer à ses directives ou invoquer des faits anodins à l’appui d’une accusation de harcèlement moral voire sexuel ne suffisent pas à établir la mauvaise foi de l’intéressé.