En l’espèce, le Préfet de l’Hérault avait déclaré, par arrêté en date du 2 juillet 2007, d’utilité publique la constitution par la communauté d’agglomération de Montpellier d’une réserve foncière au lieu-dit « Truc de Leuze » situé à Montpellier.
Le représentant de l’Etat avait également déclaré cessibles à son profit les parcelles désignées à l’état parcellaire annexé à cet arrêté.
Les représentants d’une indivision ont formé un recours en annulation à l’encontre de cet arrêté.
Par jugement en date du 22 septembre 2009, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé ce dernier. Cette annulation a été confirmée par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille en date du 10 octobre 2011.
La communauté d’agglomération de Montpellier a alors formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.
Au visa des dispositions des articles L. 221-1 et L. 300-1 du Code de l’urbanisme, la Haute Assemblée a apporté de nouvelles précisions en matière d’expropriation en vue de constituer des réserves foncières pour la réalisation d’actions ou d’opérations d’aménagement.
Les juges du Palais Royal ont considéré qu’il résulte de la lecture combinée de ces dispositions que les personnes publiques concernées peuvent légalement acquérir des immeubles par voie d’expropriation pour constituer des réserves foncières, d’une part, si elles justifient, à la date à laquelle la procédure de déclaration d’utilité publique est engagée, de la réalité d’un projet d’action ou d’opération d’aménagement répondant aux objets mentionnés à l’article L. 300-1 du Code de l’urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n’auraient pas été définies à cette date.
La jurisprudence avait déjà reconnu cette faculté par le passé en matière de préemption [1].
Le régime de l’expropriation vient donc ici s’aligner sur celui de la préemption.
Le Conseil a également rappelé que tel n’était le cas que si en outre le dossier d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique faisait apparaître la nature du projet envisagé, conformément aux dispositions du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
Il s’agit sur ce point d’une exigence et position constante de la jurisprudence [2].
Dès lors, par cette décision, tout en rapprochant le régime de l’expropriation de celui de la préemption, le Conseil réaffirme dans le même temps sa jurisprudence traditionnelle.
La jurisprudence va encore plus loin en ce domaine en considérant que l’autorité titulaire du droit d’expropriation doit également indiquer le montant des acquisitions foncières, mais en outre le coût des travaux et aménagements projetés afin de permettre à tous les intéressés de s’assurer que ces travaux ou ouvrages, compte tenu de leur coût total réel, ont bien un caractère d’utilité publique [3].
Dans le cas étudié, la notice explicative jointe aux dossiers d’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique et d’enquête parcellaire indiquait que la communauté d’agglomération de Montpellier avait pour projet de réserver les terrains en cause pour garantir la réalisation d’un aménagement conforme à la vocation de la zone définie par le plan local d’urbanisme, correspondant à l’extension du parc d’activités " Parc 2000 ".
Cette notice précisait également que l’aménagement de cette zone serait réalisé dans le cadre du développement économique de l’agglomération, après la définition du schéma d’aménagement d’ensemble.
Tirant les conséquences du principe qu’il venait de dégager et des éléments du dossier, la Haute Assemblée a censuré l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille en considérant que cette dernière s’était livrée à une inexacte qualification des faits de l’espèce.
L’affaire a ensuite été renvoyée devant ladite Cour.
Références : CE, 21 mai 2014, Communauté d’agglomération de Montpellier, n°354804 ; CE, 7 mars 2008, Commune de Meung-sur-loire, n°288371 ; CE, 14 décembre 2012, Commune de Saint-Agnant, n° 352647 ; CE, 17 novembre 1965, n°58843 ; CAA Paris, 11 avril 2013, n° 12PA02353