Suite à un sinistre naturel endommageant une habitation, il est nécessaire de procéder à des travaux, de plus ou moins grande ampleur. En pratique, l’assurance propose une indemnisation et il appartient alors à l’assuré de contacter le professionnel de son choix pour faire disparaître les effets du sinistre. Or, fréquemment, ce dernier propose devis et factures mentionnant une TVA à 20%. Les assurés découvrent parfois une différence avec ce que leur assurance indemnise, avec un taux de TVA à 10%. Sur les montants en jeu, cela peut créer une différence non négligeable !
I- Présentation des taux de TVA
Pour mémoire, la TVA est la taxe sur la valeur ajoutée. Il existe actuellement 4 taux de TVA applicables :
Le taux normal de 20% (fixé par l’article 278 du Code général des impôts [1]).
Le taux réduit, dit intermédiaire, à 10% (existant depuis le premier janvier 2014 et prévu par les articles 278 bis, 278 quater, 278 sexies A, 278 septies, 279, 279-0 bis et 279-0 bis A [2]).
Le taux réduit de 5,5% (rendu applicable par les articles 278-0 bis, 278-0 bis A et 278 sexies du CGI [3]).
Un taux super-réduit de 2,10 % (aux articles 281 quater à 281 nonies du CGI [4]).
Concernant les travaux sur un bien immeuble, ce sont les articles 278, 278-0 bis A et 279-0 bis qui prévoient un taux réduit.
Le premier de ces articles est celui qui prévoit le taux général, à 20 %, applicable par défaut [5].
Le second [6] fait application d’un taux à 5,5% pour les travaux d’amélioration de la qualité énergétique, et donc n’est pas applicable par hypothèse dans le règlement d’un sinistre naturel.
Enfin, le dernier article [7] visé concerne les « travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien », pour lesquels il est fait application d’un taux à 10% s’ils portent sur des « locaux à usage d’habitation, achevés depuis plus de deux ans », et dès lors qu’ils ne concourent pas à la production d’un immeuble neuf et qu’ils n’amènent pas à une augmentation de plus de 10% de la surface plancher existante.
II- Taux applicables aux travaux de réparation des effets d’un sinistre naturel
Indiquer la détermination du taux applicable est nécessaire pour contrer des erreurs de devis ou facturation. Parfois, ce sont même les experts qui commettent des erreurs. Apporter ici cette précision est nécessaire également en raison de l’obscurité des textes de l’administration fiscale ; la complexification qui leur est inhérente conduit dans certains cas à considérer que le taux plein s’applique alors que ce n’est pas le cas.
De fait, une certaine hésitation a existé entre l’application du taux par défaut (20%), et l’application du taux réduit (5,5 ou 7 ou 10%, selon les époques).
Concernant les gros travaux (reprise des fondations, reconstruction), la jurisprudence est venue apporter la solution.
Un arrêt de la troisième chambre civile a affirmé que le taux réduit devait être appliqué dans le cadre d’un sinistre naturel : « les désordres (étant) directement liés à un état de catastrophe naturelle résultant de la sécheresse (…) leur réparation rendait nécessaire la reprise des fondations suivie de travaux de second œuvre, ce dont il résultait que le coût des travaux était soumis à la TVA au taux réduit » [8]. La condition principale réside dans l’origine du sinistre, qui doit être d’origine climatique (en lien avec une catastrophe naturelle – causée par la nature). Cette position a été confirmée par deux arrêts de 2012 [9] de la deuxième Chambre [10], à chaque fois évoquant le gros œuvre accompagné de travaux de moindre importance (dits de « seconde œuvre » ou de « sous-œuvre »).
Ces arrêts ont été prononcés relativement à des faits ayant eu lieu sous l’empire du taux réduit antérieur, alors que l’article 279-0 bis du Code général des impôts prévoyait un taux à 5,5%. Depuis 2014, le taux qui y est prévu est de 10% (il était de 7% du 01/01/2012 au 31/12/2013).
Concernant des travaux de moindre ampleur seuls, la réponse est à chercher du côté du BOFIP [11], qui énonce que le taux intermédiaire s’applique pour certaines opérations seulement. La condition de base est que les travaux envisagés portent sur des locaux d’habitation.
S’agissant des immeubles achevés depuis moins de deux ans, le taux intermédiaire est applicable aux travaux d’urgence. Sont des travaux d’urgence « ceux qui s’avèrent nécessaires pour maintenir ou rendre au logement une habitabilité normale » [12]. Cette qualification d’urgence permet de faire bénéficier les travaux de réhabilitation (« travaux de réfection d’une toiture ou d’une façade », entre autres [13]) du taux intermédiaire, sans que ce taux soit rendu applicable aux travaux par nature exclus de son champ d’application (ex : ramonage, travaux d’installation d’une alarme, d’un clavier codé d’accès, d’un interphone, d’une caméra de surveillance, etc.).
S’agissant de locaux achevés depuis plus de deux ans, seuls certains travaux sont éligibles au taux intermédiaire, s’ils présentent un caractère d’urgence : remplacement d’une porte ou d’une baie vitrée suite à accident ou effraction, travaux de serrurerie en cas d’effraction et de perte de clés, travaux de réfection d’une toiture ou d’une façade suite à sinistre naturel, travaux de plomberie en cas de fuite, assèchement de locaux suite à dégâts des eaux, élimination de la suie et de dépôts corrosifs de bâtiments à usage d’habitation contaminés par un incendie, travaux de remise en état de murs de clôture ou de portails, etc. Il s’agit généralement de travaux rendus nécessaires par un sinistre (fréquemment couvert par une assurance) et rendus urgents pour permettre l’habitation effective du bien en toute sécurité. Les autres travaux de réparation suite à un sinistre naturel ne peuvent bénéficier du taux intermédiaire.
En synthèse, le taux applicable aux travaux de réparation suite à sinistre naturel dépend du caractère urgent ou non de ces travaux, à savoir s’ils sont rendus nécessaires pour pouvoir y procéder à l’activité d’habitation. Si c’est le cas, le taux de TVA est celui intermédiaire de 10%, et le professionnel qui procède aux travaux doit l’appliquer, de même que l’assurance qui indemnise le cas échéant. A défaut, le taux de 20% est applicable.