Il existe une controverse à propos de la République galactique. Est-ce un État ou une organisation intergouvernementale ?
Même si l’hypothèse d’une organisation internationale à l’échelle d’une galaxie peut être séduisante, la République galactique décrite dans la prélogie de Star Wars est indubitablement un État. Elle est fondée sur une Constitution et réunit toutes les conditions classiques d’existence de l’État.
Premièrement, les films présentent des sujets de droit, personnes physiques, ce qui permet de matérialiser la compétence personnelle de la République galactique. Ces sujets disposent de droits qu’ils peuvent faire valoir devant des juridictions. Ils sont également soumis à des obligations, notamment en matière fiscale. Deuxièmement, même si l’échelle est inhabituelle puisqu’il faut raisonner à celle d’une galaxie, il existe un territoire, des frontières qui le délimitent. Celui-ci est composé des systèmes planétaires intégrés par opposition à ceux de la « bordure extérieure », c’est-à-dire des systèmes périphériques. Or certains systèmes intégrés souhaitent se dissocier. Ici encore, la terminologie disqualifie l’organisation
intergouvernementale. Les concepts de sécession ou de séparatisme sont consubstantiels à la logique étatique. En droit des organisations internationales, les parties contractantes disposent généralement d’une clause de retrait prévue par les traités constitutifs et, dans le cas contraire, l’article 56 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 stipule deux possibilités supplémentaires de dénonciation ou de retrait selon l’intention originelle des parties ou la nature de l’engagement. En toute hypothèse, même lorsque le retrait se fait en dépit de la légalité internationale, le recours à la force armée est inenvisageable. Troisièmement, la République galactique est dotée d’une organisation politique et juridique, exerce les fonctions régaliennes de l’État. Elle dispose d’une police, d’une armée, d’une monnaie...
Pourquoi cette confusion ?
Il faut garder à l’esprit que Star Wars reste un divertissement. Malgré tous ses talents, George Lucas n’est pas armé pour une réflexion pointue en droit international. Il ne fait que restituer et réinterpréter des références personnelles, c’est-à-dire le modèle institutionnel américain pour la République galactique et le modèle de l’Allemagne nazie pour l’Empire. Deux modèles antagonistes du point de vue des valeurs, mais deux modèles étatiques. De là procèdent de très nombreuses approximations mises au service d’une esthétique globale. L’usage de la notion de traité est, par exemple, totalement galvaudé. Dans Star Wars, le terme renvoie aussi bien à des accords conclus entre États, qu’à des contrats d’États, voire à des accords passés entre des personnes morales de droit privé et des entités fédérées. On retrouve ce flou artistique dans l’utilisation alternative et parfois équivalente des notions d’agents, de délégués, de représentants et de diplomates ou dans la confusion récurrente entre immunité diplomatique et immunité parlementaire. Nonobstant, il faut se rappeler que la saga Star Wars n’a pas vocation à venir enrichir la science juridique. Elle propose une vision simplificatrice et peu approfondie d’un système institutionnel uniquement destinée à servir de décor crédible. Comme souvent à Hollywood, la vraisemblance prime l’authenticité.
Quels sont l’organisation et le régime politique de cet État ?
La République galactique emprunte de nombreux traits institutionnels et constitutionnels aux États-Unis. En premier lieu, il s’agit d’un État fédéral, de ce fédéralisme dont le point de mire est le libéralisme politique et le respect des libertés individuelles. Ces dernières sont précisément préservées par la limitation des interventions de l’État au strict minimum. Par conséquent, l’autonomie des entités ou systèmes fédérés est particulièrement grande. La seule obligation réside dans le caractère approximativement démocratique des gouvernements. En second lieu, si la République galactique est parlementaire et comporte des adaptations par nécessité scénaristique, elle recycle les institutions américaines. Elle dispose d’un carré institutionnel composé d’un législateur (le Sénat galactique), d’un gouvernement réuni autour de son chef le Chancelier, d’une Cour suprême galactique et d’une institution originale mais beaucoup plus obscure, bien qu’elle soit censée représenter le côté lumineux de la Force, le Conseil Jedi. Les pouvoirs du Sénat galactique sont assez classiques : il vote des lois, peut proposer des motions de censure, approuve l’intervention de l’armée. Quant au Chancelier, il est inspiré en tout point d’Adolf Hitler. L’octroi des pleins pouvoirs à son bénéfice fait directement référence à la loi du 24 mars 1933, la « Gesetz zur Behebung der Not von Volk und Reich » qui conféra à Hitler le pouvoir de gouverner par décret, loi adoptée à une écrasante majorité. Le contexte est identique. Rare opposante, la sénatrice Padmé Amidala le constate : « C’est ainsi que s’éteint la liberté... sous une pluie d’applaudissements » !