Votre nouveau statut Facebook ou votre dernier tweet pourrait-il constituer un délit d’injure ou de diffamation et par conséquent engager votre responsabilité ?
A cette question, la première chambre civile de la Cour de cassation vient d’apporter une réponse éclairante dans son arrêt du 10 avril 2013 (n°11.19-530).
En l’occurrence, une société et sa gérante avaient assigné leur ancienne salariée principalement en paiement de dommages et intérêts à la suite de propos que cette dernière avait tenus sur divers réseaux sociaux. La salariée avait, entre autres, pu déclarer sur son profil Facebook : « sarko devrait voter une loi pour exterminer les directrices chieuses comme la mienne !!! » ce que la société et sa gérante estimaient être de l’injure.
Par définition, un des éléments constitutifs du délit d’injure (comme celui de la diffamation) est son caractère public d’où la question de savoir si les propos tenus par la salariée sur les réseaux sociaux présentaient ou non ce caractère.
Les demanderesses faisaient notamment valoir que les informations publiées par la salariée étaient accessibles à ses « amis », or ceux-ci ne formaient pas légalement une « communauté d’intérêts » (définie comme étant un groupe de personnes liées par une appartenance commune, des aspirations et des objectifs partagés). Les propos devaient par conséquent être qualifiés de publics.
La Cour de cassation confirme opportunément l’arrêt de la Cour d’appel de Paris et juge que les comptes Facebook et MSN en cause n’étaient accessibles « qu’aux seules personnes agréées par l’intéressée, en nombre très restreint », et que par conséquent celles-ci formaient une communauté d’intérêts confinant ainsi les propos litigieux à la sphère privée.
On constatera avec attention que le « nombre très restreint » d’amis a été un élément pris en compte par la Haute juridiction pour qualifier les propos de la salariée de privés…
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L’utilisation de la notion de "communauté d’intérêts" était attendue de tous.
Cependant, peut-on parler de communauté d’intérêts quand, dans une liste "restreint" de "d’amis" nous avons des personnes issues d’horizons différentes ?
Par exemple, sur une liste de 30 personnes, peut on parler de communauté d’intérêts quand nous avons 12 membres de la famille, 5 collègues, 3 amis d’enfance et 10 amis ( au sens propre du terme) ?
A priori, toutes ces personnes ne sont pas personnellement touchées par un problème commun.
De plus, l’utilisateur de facebook a la possibilité de créer des sous-listes "d’amis" de manière à rendre visible une information à des personnes précises, choisies par lui et donc exclure la visibilité de cette information aux autres personnes.
Bonjour,
Je suis d’accord avec vous. D’autant plus qu’il est fréquent de voir des gens disposer de plus de 600, 700 "amis"... est-on encore dans une "communauté d’intérêts" ? Pas si sûr... Une limite devra être posée par la jurisprudence et ce que laisse sous-entendre cet arrêt.
Bonjour,
Par "restreint", qu’elle est la proportion legalement acceptable ou tolerable ? Est-ce un public < ou > a 1000 personnes ?
Comment produire la preuve de gestion des parametres de confidentialite au moment ou la supposee infraction est constatee ou portee devant les juridictions ?
Merci.
Bonjour,
La Cour ne donne pas d’indication sur le nombre d’"amis" qui rendraient les propos public. Il s’agit du premier arrêt de la Cour de cassation qui statue sur ce sujet, il faut donc attendre les prochains arrêts pour avoir plus de précision. Quand à la preuve, c’est au demandeur de la fournir (constat d’huissier, etc.).
Je ne comprend pas très bien. est-ce que ce sont tous les amis du titulaire du compte qui étaient peu nombreux ? ou alors est- ce que le titulaire du compte facebook a choisi un nombre restreint de personnes parmi ses amis pour diffuser son message ?
Bonjour,
Il s’agit du nombre total d’"amis" de cette personne que la Cour a qualifié de "très restreint".