Par « créneaux horaires » (slot en anglais), on entend l’heure prévue d’arrivée ou de départ attribuée à un mouvement d’aéronef à une date précise dans un aéroport précis.
Les créneaux horaires sont attribués par un coordonnateur qui les répartit entre les compagnies et surveille la manière dont ils sont utilisés (Article 4 du Règlement (CEE) n° 95/93 du Conseil, du 18 janvier 1993, fixant des règles communes en ce qui concerne l’attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté). Chaque État membre de l’Union européenne possède son coordonnateur.
En France la Cohor, l’association pour la coordination des horaires, qui regroupe la plupart des compagnies et les aéroports les plus importants, est chargée de cette mission [1]. Le Règlement n° 95/93 du Conseil insistait sur la présence d’un « coordonnateur dont la neutralité soit incontestée ».
L’attribution des créneaux horaires suit la procédure suivante [2] : un transporteur qui a exploité un créneau horaire approuvé par le coordonnateur peut prétendre à ce même créneau pour la période de planification horaire correspondante suivante.
Cependant, lorsque toutes les demandes de créneaux horaires formulées par les transporteurs ne peuvent être satisfaites, le coordonnateur en communique les raisons au transporteur aérien demandeur et lui indique le créneau de remplacement le plus proche ; la préférence est accordée aux services aériens commerciaux.
Le cas d’Aigle Azur.
En Europe, le créneau horaire est majoritairement gratuit. En théorie, il n’est pas monnayable. Alloué gratuitement aux compagnies aériennes – elles n’en sont pas propriétaires [3].
Néanmoins sur certains aéroports saturés, comme à Londres Heathrow [4], les compagnies peuvent échanger certains créneaux horaires moyennant compensation financière.
De manière générale les créneaux horaires peuvent, en toute liberté, être échangés entre transporteurs ou transférés par un transporteur d’une liaison à une autre, unilatéralement ou d’un commun accord, ou encore à la suite d’une prise de contrôle partielle ou totale. Tout échange ou transfert doit être transparent et est soumis à la confirmation, par le coordonnateur, que l’opération est réalisable.
Ainsi, il est aisé de comprendre l’intérêt de la reprise d’Aigle Azur : son acquéreur aurait par la même occasion obtenu ses 9000 créneaux horaires à Orly. Ce qui représente plus d’une dizaine de vols quotidiens.
Faute de reprise, la Cohor distribuera les créneaux début novembre.
L’enjeu est important puisque les créneaux horaires d’Orly sont artificiellement bas : l’arrêté du 6 octobre 1994 relatif aux créneaux horaires sur l’aéroport d’Orly a fixé le trafic de l’aéroport à environ 200.000 mouvements par an. Alors qu’il pourrait en accueillir près de 500.000. Aussi, la faillite d’une compagnie est une aubaine pour les concurrents. Par exemple, la faillite de la compagnie Air Berlin l’an dernier a permis à la Cohor d’attribuer les créneaux qu’elle détenait à Orly (près de 5.000).
Officiellement, par l’instauration d’une forme de couvre-feu nocturne, la prise de cet arrêté tendait à réduire le bruit des avions pour les riverains.
Ces trente dernières années, les avions sont devenus moins bruyants, mais la cause officieuse de la prise de l’arrêté demeure : Air France ne souhaite pas de concurrence à Orly. Et cette indigence de créneaux permet effectivement de repousser certaines compagnies en dehors de la capitale : elle est la cause de l’absence, notamment, de Ryanair à Orly.
Comme le créneau horaire est une denrée rare, pour le conserver, une compagnie doit l’utiliser plus de 80% du temps. Dans le cas contraire, tout créneau horaire non utilisé est retiré et versé dans un pool, sauf si la non-utilisation peut se justifier par l’immobilisation au sol d’un type d’aéronef, la fermeture d’un aéroport ou d’un espace aérien ou par tout autre motif exceptionnel analogue.
Les créneaux horaires versés dans les pools sont répartis entre les transporteurs ayant introduit une demande. 50 % de ces créneaux abandonnés ou nouvellement créés sont réservés – pour des questions d’ouverture à la concurrence – à de nouveaux arrivants, à moins que, logiquement, les demandes de nouveaux arrivants représentent moins de 50%.
Le fait qu’un transporteur se soit vu attribuer certains créneaux horaires n’ouvre pas à ce transporteur un droit à la même série de créneaux pour la saison suivante, à moins qu’il ne puisse apporter la preuve au coordonnateur qu’il a utilisé ces créneaux, avec l’autorisation dudit coordonnateur, pendant 80 % au moins de la période pour laquelle ils ont été attribués.
Autrement dit, les compagnies ont la garantie que les créneaux qu’elles ont exploités l’année précédente leur seront réattribués si elles les ont suffisamment utilisés.
En France, le grand marché du créneau horaire a lieu deux fois par an.
En novembre, puis en mars, les coordonnateurs du monde entier et les compagnies se retrouvent, pour un marché du créneau horaire.
On lit que le coordonnateur d’un État membre « participe aux conférences internationales de planification des mouvements d’aéronefs des transporteurs aériens dans le respect du droit communautaire » (Article 4 du Règlement (CEE) n° 95/93 du Conseil, du 18 janvier 1993, fixant des règles communes en ce qui concerne l’attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté).
Lors de l’attribution, biannuelle, les autorités compétentes — généralement les autorités aéroportuaires — déterminent la capacité disponible pour l’attribution de créneaux horaires. Les résultats sont communiqués en temps utile au coordonnateur de l’aéroport, avant que n’ait lieu l’attribution initiale des créneaux horaires.
Le Règlement n° 95/93 du Conseil considère notamment que « l’attribution de créneaux horaires dans les aéroports saturés devrait être fondée sur des règles neutres, transparentes et non discriminatoires ».
Lorsque toutes les demandes de créneaux horaires formulées par les transporteurs concernés ne peuvent être satisfaites, comme dit précédemment, la préférence est accordée aux services aériens commerciaux.
Un système de sanctions en cas de manquement à l’utilisation adéquate d’un créneau horaire attribué est instauré dans le dispositif règlementaire français conformément aux dispositions du paragraphe 5 de l’article 14 du Règlement n°95/93.
Les sanctions prennent la forme d’amendes administratives dont les montants peuvent s’élever jusqu’à 40.000 euros.
Dans le cas général, les sanctions associées à ces manquements sont prononcées par le ministre chargé de l’aviation civile après avis de la Commission administrative de l’aviation civile (CAAC). Les dispositions des articles R. 160-1 à 15 du Code de l’aviation civile fixent ce système de sanctions.
Discussion en cours :
Excellent article sur l’attribution des créneaux horaires dans les aéroports : clair, précis et synthétique.
Je comprends bien mieux maintenant l’intérêt de la reprise d’Aigle Azur...