1 - La règlementation :
Un périmètre défini, une vigilance des institutionnels et avocats eux-mêmes (n’hésitant pas à attaquer en justice pour des marchés publics gagnés par des concurrents illégaux par exemple), les ingrédients sont là pour que l’ère du “laisser-faire” soit terminée.
L’interdiction de calculer les honoraires exclusivement sur le résultat permettrait par ailleurs aux avocats de se protéger des pirates qui utiliseront sans nul doute prochainement cet “excellent” argument commercial, s’ils parvenaient à s’associer avec des avocats plaideurs ou des médiateurs.
2 - La technologie, la qualité de la prestation et la formation :
L’intérêt général est au cœur du périmètre du droit (même si parfois, certains éléments concernent aussi, disons-le, une sorte de corporatisme, mais il faut bien vivre, n’est-ce pas ?). Et à cet intérêt général répond une déontologie rigoureuse de l’avocat. C’est cette déontologie qui constitue la force de l’avocat : son indépendance, le secret professionnel, l’absence de conflit d’intérêts, sa formation continue... Voilà de bons arguments qui devraient rassurer à long terme (car le saviez-vous, l’avocat ne vend pas que du conseil, il vend aussi de la sécurité, nous y reviendrons sur le Village de la justice).
Le RPVA participe justement à la confidentialité et la protection des justiciables, avantage que ne permet pas le recours à d’autres professionnels non réglementés. Christiane Féral- Schuhl souligne ainsi que “la normalisation technologique est un fer de compétitivité pour les avocats”. On peut en effet penser que cet outil est une garantie à terme (quand l’outil sera totalement adopté par les avocats, lui ou ses évolutions prévisibles.
Un label de l’ordre des avocats est d’ailleurs de plus en plus demandé et nécessaire pour apposer sur les sites internet, mais en réalité il existe peut-être déjà : il suffirait d’utiliser le logo de la profession et le suffixe pour les adresses de sites internet (.avocats.fr), puis de restreindre l’autorisation d’usage de ceux-ci aux seuls avocats.
3 - L’image et la communication :
Développer le recours à l’avocat par la prise de conscience du besoin de droit, voilà la stratégie de ces dernières années (avec une touche de défense de ce que chacun estime être son marché).
Les notaires ont répondu sur le même ton en surenchérissant sur la proximité (lorsque le CNB montre des rues illustrant la place du droit au quotidien, les notaires montrent des notaires qui conseillent, bien ancrés dans le réel) et sur “l’irréprochabilité” de la profession.
Que ce soit sur ce territoire ou d’autres, les avocats et leurs instances font un travail croissant d’information, pour que “avocat” soit une marque que l’on reconnaisse et que l’on redoute un peu (la condition sinequanone pour que l’on n’ait pas envie du recours à des faux plutôt qu’aux originaux...).
Erik Orsenna indiquait récemment à propos de la marque “Expert-comptable” que “cette marque représente le savoir, la confiance et l’excellence". Un objectif commun aux avocats, car les représentants de la profession veulent faire savoir que “les professions du droit investissent des années d’étude, la formation continue, ont une assurance professionnelle et sont une source de confiance. Ces nouvelles entreprises du web n’offrent pas ce niveau de qualité.”
Mais soyons conscients que cette communication, qui développe en effet peu à peu le recours au droit et aux avocats, aura automatiquement à la marge l’effet de développer le marché des concurrents, faussaires ou pirates...
4 - La proximité :
Si la société se dématérialise peu à peu, il n’en reste pas moins que la proximité reste pour encore assez longtemps un sujet important pour nombre de français et pourrait même marquer le prochain mouvement pendulaire du web (envisageons plutôt une association entre dématérialisation et proximité, permettant un arbitrage de chacun en fonction du cas : “J’ai besoin de mon avocat proche et accompagnateur pour une médiation, mais j’ai beaucoup moins envie de le voir pour la contestation d’un PV où je sais en plus être de mauvaise foi...” - exemple certes caricatural).
Le réseau national des 54.000 avocats français est rare et de valeur ; la réduction de la justice de proximité est de ce point de vue une erreur tactique - mais ordonnée pour d’autres motivations que la défense du droit et de la place des avocats, on le sait. Que les avocats continuent à occuper le terrain local et sortent des cabinets...
- Une maison du Droit et de la Justice (Nogent). On peut faire mieux ?
- Photo : Justimémo
Faire en sorte que l’avocat soit plus près des français, pas seulement dans la pub, c’est aussi dans ce sens que les ordres et le CNB poussent, mais il faut sans douter aller plus loin. Comment par exemple se fait-il qu’une “boutique/maison des avocats” n’existe pas encore dans les centres villes, sorte de “centre médical” pour les premières informations, accessible et humain, capable d’orienter vers le bon professionnel, l’association ou l’administration concernée ? Nous avons bien des “maisons de l’avocat”, mais réservées aux avocats... Nous avons bien des "maisons de Justice" mais les avocats y sont peu. Que les ordres fassent des consultations ouvertes une fois par mois n’est sans doute pas assez connu.
Enfin, la féminisation de la profession pourrait aussi jouer dans le sens d’une profession plus diverse, plus proche, dans l’esprit du public.
On le voit, les avocats ont des cartes en main... A suivre dans cette série de chroniques, "Consultations juridiques en ligne : ce qu’ils en disent..."