Faits et procédure.
Les faits de la présente affaire sont loin d’être banals. Ils sont même, pour le moins, curieux. Une personne, directrice de société et utilisatrice d’un numéro de téléphone attribué par la société Orange Côte d’Ivoire, se dit être profondément et continuellement importunée et troublée par les nombreux messages reçus sur son numéro d’appel téléphonique. Les messages reçus, souvent des SMS de menace, pouvaient atteindre neuf cent (900) par jour. Signalons que cette situation avait commencé dès la première semaine d’utilisation du téléphone empêchant ainsi toute jouissance paisible de cet indispensable outil de communication personnelle et professionnelle. Mademoiselle R. [1] faisait également état d’humiliations devenues insupportables pour elle. Par ailleurs, il semblait que le numéro litigieux avait fait l’objet d’une attribution parallèle à une société française ; mademoiselle R. recevant des appels et des SMS des clients de cette dernière société.
Après avoir pris contact, à plusieurs reprises, avec l’opérateur de téléphonie Orange pour que soit mis fin à ces divers troubles, la situation de mademoiselle R. ne changera pas. Pire, « les messages et appels n’ont fait que se multiplier ».
C’est dans ces conditions que mademoiselle R. devait saisir le tribunal de commerce d’Abidjan en demandant une indemnisation pour sa perte de gains évaluée, par elle, à un montant de quarante-neuf millions (49) de Francs CFA – soit 74 700 euros – , une perte de bénéfice et d’opportunité d’affaire pour un montant de quarante-neuf millions (49) de Francs CFA – soit 74 400 euros – et pour son préjudice moral évalué à cinq cent (500) millions de francs CFA – soit 762 245 euros.
La situation de perturbation de la ligne téléphonique de la demoiselle R., ci-dessus décrite, pourrait trouver sa source dans un défaut de configuration de la puce insérée dans son téléphone. En effet, aux termes du jugement du tribunal de commerce, « menant ses investigations, [mademoiselle R.] s’est entendu dire que la puce de son téléphone fonctionne comme un serveur qui centralise une multitude d’appels téléphoniques et SMS, pour ensuite les redistribuer aux destinataires finaux, et que pour réparer son préjudice, la société Orange doit refaire la configuration de plus de quatre millions… de numéros » ; ce que ladite société n’était manifestement pas prête de faire.
Sans doute parce qu’agissant en qualité de gérant d’une société et étant opposée à une autre société (Orange Côte d’Ivoire), mademoiselle R. saisira le tribunal de commerce d’Abidjan. Pour sa défense, la société Orange soulèvera in limine litis l’incompétence du tribunal de commerce d’Abidjan. Selon elle, en effet, seule l’ARTCI était compétente à ce stade de la procédure. Pour soutenir cette prétention, la société Orange s’appuyait, à juste titre, sur l’ordonnance relative aux Télécommunications/TIC en Côte d’Ivoire [2]. Or, contre toute attente, le tribunal de commerce se déclarera compétent pour connaître de ce litige.
S’il reconnaît d’emblée la vaste étendue de la compétence juridictionnelle de l’ARTCI (1), le tribunal de commerce va toutefois lui dénier une compétence en l’espèce. Au-delà de l’incohérence juridique du jugement ainsi rendu (2), des non-dits peuvent être décelés (3). In fine, d’autres questions juridiques se posaient en manifestant la difficile appréhension, par les uns et par les autres, du droit émergent des TIC en Côte d’Ivoire (4).
1) La reconnaissance de la vaste étendue de la compétence juridictionnelle de l’ARTCI
Selon l’article 104 de l’ordonnance sur les télécommunications/TIC en Côte d’Ivoire, « l’ARTCI connaît, en premier ressort, de tout litige pouvant survenir dans le secteur des télécommunications/TIC notamment :
toute violation, par un opérateur ou un fournisseur de services de Télécommunications/TIC, des dispositions légales ou règlementaires en matière de Télécommunications/TIC ou de clauses conventionnelles ;
tout refus d’interconnexion ou de location de capacité ou d’infrastructures, non conformes aux conditions prévues par les textes applicables et tout désaccord relatif à l’application ou l’interprétation des conventions et des catalogues d’interconnexion ;
toute atteinte aux conditions d’octroi ou de refus d’octroi à un opérateur des droits d’occupation sur le domaine des personnes publiques ou des droits de passage sur une propriété privée aux fins d’établissement et de l’exploitation d’un réseau de Télécommunications/TIC ;
tout défaut d’application par un opérateur ou un fournisseur de services de Télécommunications/TIC de son cahier de charges ou de tout autre document similaire contenant les conditions attachées à son autorisation ou à sa déclaration ;
tout défaut d’application ou violation d’une clause figurant dans un contrat d’abonnement-type avec les consommateurs ».
Il résulte manifestement de cette disposition, un domaine de compétence rationae materiae et rationae personae fort élargi de l’ARTCI. Signalons qu’en outre, c’est elle qui fait office d’Autorité de protection des données à caractère personnel et qui assure la gestion des noms de domaines et les adresses Internet de la Côte d’Ivoire en relation avec les structures spécialisées [3]. Pour rester dans le domaine des télécommunications stricto sensu, le champ de compétence de l’ARTCI n’en demeure moins assez large en raison de l’utilisation de l’adverbe « notamment » ; ce qui suppose que la compétence de cette Autorité puisse concerner d’autres litiges.
Cette circonstance n’avait pas échappé au tribunal de commerce qui notait que « cet article [104] énumère, de façon non exhaustive, les types de litiges dont l’ARTCI connaît en premier ressort » et reconnaissait lui-même, par voie de conséquence, que « le litige opposant actuellement la partie demanderesse à la société Orange fait partie de ceux-ci ». Autrement, le litige opposant mademoiselle R. à la société Orange, au sujet du dysfonctionnement de son téléphone, relevait des dispositions de l’article 104 de l’ordonnance relative aux télécommunications en Côte d’Ivoire. A bon droit donc, le tribunal de commerce a retenu, ab initio, que le présent litige devait être tranché par l’ARTCI.
Notons qu’il pouvait difficilement en aller autrement dans la mesure où la téléphonie, définie comme l’ « exploitation commerciale du transfert de la voix entre des utilisateurs raccordés aux points de terminaison d’un réseau de Télécommunications/TIC » [4] relève incontestablement des télécommunications, elles-mêmes, définies comme la « transmission (émission ou réception) d’informations de toute nature (textes, sons, images, signes ou signaux) par des moyens électromagnétiques sur des supports métalliques, optiques, radioélectriques ou tout autre support » [5].
Pour autant, si elle reconnaît, au départ, que le présent litige relevait bien de la compétence de l’ARTCI, le tribunal de commerce va curieusement se déclarer compétent pour connaître de la demande d’indemnisation présentée par mademoiselle R. Ce qui apparaît manifestement incohérent.
2) L’incohérence juridique de la solution retenue en définitive : le déni de la compétence de l’ARTCI
Pour arguer de l’incompétence du tribunal de commerce, la société Orange invoquait les dispositions de l’article 109 de l’ordonnance relative aux télécommunications. Selon cet article, « toute personne physique ou morale peut saisir l’ARTCI pour demander réparation d’un préjudice subi, la modification des conditions de fourniture d’un service, ou de toute autre demande survenant dans le cadre des activités de Télécommunications/TIC ».
Alors que l’on aurait pu s’attendre à ce que cette disposition soit mobilisée en renfort de la compétence exclusive de l’ARTCI, le tribunal de commerce nous en livre une tout autre teneur. Il est nécessaire de reproduire les considérations du tribunal. Celui-ci :
« constate que dans cet article [109], a été utilisé le verbe « pouvoir » conjugué à la troisième personne du singulier, qui, en legistique est un terme exprimant une permission ou une faculté ; au contraire du verbe « devoir » qui est, en legistique, un verbe d’obligation. Dans ces conditions, il est excessif, comme tente de le faire admettre la société Orange, de dire que le tribunal de commerce doit se déclarer incompétent au profit de l’ARTCI, à qui aucune compétence exclusive n’a été légalement donnée pour connaître des litiges du secteur des télécommunications ; l’article 109 de l’ordonnance sus énoncée laissant toute latitude aux personnes physiques et morales de saisir selon leur bon vouloir soit l’ARTCI soit les juridictions.
Mademoiselle R…. ayant choisi la voie judiciaire, le tribunal de commerce est compétent pour examiner sa demande en réparation ».
L’interprétation que fait le tribunal de commerce de l’article 109 du l’ordonnance relative aux télécommunications a de quoi laisser perplexe. En effet, cet article ne doit pas être lu et compris de façon isolée mais nécessairement de façon conjointe avec l’article 104 précité. Une telle interprétation conjointe des deux articles est même imposée par le fait que ces deux articles sont placés sous un même Titre VII relatif au règlement des litiges ; lequel règlement des litiges relève, en premier ressort, de la compétence exclusive de l’ARTCI, en vertu de l’article 104.
A cet égard, contrairement à l’interprétation du tribunal de commerce, nous pensons que l’article 104 confère bien une compétence exclusive, en premier ressort, à l’ARTCI. Dans la formule « l’ARTCI connaît, en premier ressort, de tout litige », l’emploi du présent de l’indicatif a une valeur impérative c’est-à-dire, en l’occurrence, que « c’est l’ARTCI et seule l’ARTCI qui doit connaître de tous les litiges relatifs aux Télécommunications/TIC » et non une autre juridiction.
Dès l’instant où l’ordonnance lui confère une compétence exclusive, en premier ressort, pour connaître du contentieux en matière de télécommunications, c’est l’ARTCI qui devrait être saisie pour des demandes d’indemnisation pour autant que l’on se situe bien en première instance. Admettre le contraire viderait complètement l’article 104 de tout son sens. Or, comme le soulignait récemment un expert ivoirien du droit des télécoms, l’objet et l’intérêt de la compétence quasi-juridictionnelle reconnue à l’ARTCI « est de permettre un désengorgement des tribunaux classiques et de permettre à des instances spécialisées de pouvoir résoudre les litiges de façon préalable » [6].
Il nous paraît donc absolument incohérent, comme le fait le tribunal, d’admettre que le litige relève que la compétence de l’ARTCI – qui est, à notre sens, une compétence exclusive – et d’admettre dans le même temps qu’un autre tribunal est également compétent. Cela n’a pas de sens.
Tel que nous l’appréhendons, l’article 109 a pour objet de préciser le pouvoir pour l’ARTCI d’allouer des dommages et intérêts aux personnes estimant avoir subi des préjudices du fait d’une activité de télécommunications/TIC. Mais sans doute, cette précision n’était-elle pas nécessaire [7] ou, du moins, cet article aurait-il pu être mentionné de façon plus cohérente sous une autre rubrique de l’ordonnance [8]. En effet, plusieurs autres articles de l’ordonnance reconnaissent à l’ARTCI le pouvoir de prononcer des sanctions pécuniaires [9]. Par ailleurs, en tout état de cause, la compétence juridictionnelle reconnue à l’ARTCI implique qu’elle puisse allouer des dommages et intérêts aux personnes la saisissant [10].
Si donc, selon nous, le tribunal de commerce fait une mauvaise interprétation de l’article 109 de l’ordonnance [11], cela est la résultante d’une rédaction souvent problématique du texte de l’ordonnance. Mais au-delà de cette « incohérence rédactionnelle » du texte de l’ordonnance, la décision de tribunal peut laisser entrevoir des non-dits ou des intentions cachées.
3) Les non-dits du jugement : l’appel à une compétence juridictionnelle concurrente ?
En toile de fond de cette « bataille » autour de la compétence juridictionnelle en matière de télécommunications/TIC, il pourrait sans doute être décelé un appel du tribunal de commerce en vue de l’adoption d’un système de compétence concurrente entre l’ARTCI et les juridictions de droit commun.
Il faut, en effet, observer que la rédaction actuelle de l’article 104, alinéa premier, a pour conséquence de soustraire aux juridictions de droit commun un contentieux qui leur était jusque-là dévolu. En effet, les opérateurs et fournisseurs de services de télécommunications/TIC, en tant qu’ils exercent des activités commerciales, voyaient leurs litiges tranchés par les tribunaux de commerce. C’est ainsi qu’en invoquant un manquement, par la société Côte d’Ivoire Télécom à ses obligations contractuelles au titre de son offre domino, la société Buritel Technologies avait saisi le Tribunal de commerce d’Abidjan. En l’espèce, la société Buritel Technologies avait obtenu de l’ATCI – actuelle ARTCI – une licence d’opérateur de centre d’appel téléphonique. Pour le déploiement de ses activités, la société Buritel Technologies a souscrit à l’offre domino de la société CI-Télécom en acquérant deux numéros dominos ; le contrat prévoyant l’accès à ces numéros à « tout usager » disposant d’un « téléphone à clavier ». Or, la société Buritel Technologies se rendra compte de ce que ses services n’étaient accessibles qu’aux seuls abonnés de la société CI-Télécom ou au réseau téléphonique fixe.
Estimant que l’offre, dont les termes spécifiaient que les numéros domino étaient accessibles à tout usager muni d’un téléphone à clavier, ne pouvait valablement être limitée aux seuls abonnés de CI-Télécom, la société Buritel Technologies l’assignera devant le tribunal de commerce d’Abidjan le 9 avril 2013.
En l’espèce, la question de la compétence n’a pas été soulevée mais, dans une telle hypothèse, le tribunal de commerce aurait dû, en toute logique, se déclarer incompétent. Ledit tribunal, dont la compétence n’avait pas été remise en cause, a rendu son jugement le 02 juillet 2013 en condamnant la société CI-Télécom pour avoir manqué à ses obligations contractuelles [12].
Il est intéressant de noter ici que, dans cette dernière affaire comme dans nombres d’autres, c’est le tribunal de commerce d’Abidjan qui a été saisi par les parties et qui a tranché les litiges à lui soumis et relevant pourtant du domaine de télécommunications/TIC [13].
La question de la compétence du tribunal de commerce n’a été soulevée dans aucune de ces nombreuses affaires [14], pas plus d’ailleurs que ce dernier n’a lui-même relevé d’office son incompétence [15].
Cet état de fait est révélateur d’une réalité : la compétence juridictionnelle exercée par le tribunal de commerce de façon concurrente avec l’ARTCI. Cette réalité militerait sans doute en faveur de l’adoption d’un système de compétence juridictionnelle concurrente, en premier ressort, en matière de télécommunications/TIC [16]. Les parties pourront, ainsi, à leur choix, saisir l’ARTCI ou une juridiction de droit commun comme le tribunal de commerce [17].
Dans une telle configuration, seule la pratique permettra de voir qui de l’ARTCI ou du tribunal de commerce ou une autre juridiction de droit commun est plus efficace dans la résolution des litiges relatifs aux Télécommunications/TIC [18].
Cependant, une meilleure appréhension, par les uns et par les autres, du droit émergent des TIC en Côte d’Ivoire est une condition préalable à un tel partage de compétence. Or une analyse de la pratique relative à une période récente, laisse apparaître des difficultés dans l’appréhension des nouvelles règles juridiques encadrant les Télécommunications/TIC en Côte d’Ivoire.
4) Les perspectives
Comme plusieurs autres jugements rendus par le tribunal du commerce d’Abidjan dans le domaine des Télécommunications/TIC, celui-ci fourmille également de questions juridiques qui laissent apparaître la difficile appréhension du droit émergent des TIC en Côte d’Ivoire [19].
Nous nous limiterons ici à un seul exemple : existe-t-il un droit de propriété sur un numéro de téléphone ? Nous posons cette question car dans sa saisine du tribunal de commerce, mademoiselle R. alléguait de « son droit de propriété sur le numéro […] qui est un élément de son identité ». Existerait-il donc un droit de propriété sur un numéro de téléphone ? Un tel droit de propriété s’entendrait-il notamment de la possibilité de céder le numéro à titre onéreux ? En cas de décès du « propriétaire » du numéro, celui-ci pourrait-il être transmis à sa succession ?
Le tribunal de commerce ayant ordonné une instruction dans la présente affaire, laquelle a été renvoyée au 5 juin 2014 [20], nous ne savons qu’elle a été ou sera sa position sur cette intéressante question.
Pour l’heure, sur le fondement de l’ordonnance relative aux Télécommunications/TIC, nous pouvons relever que, comme les fréquences radioélectriques, les ressources de numérotation sont des ressources rares qui font partie du domaine public de l’Etat [21]. Elles ne sauraient dès lors l’objet d’une quelconque appropriation privative.
Comme en dispose même l’article 61 alinéa 3 de l’ordonnance, « les numéros et blocs de numéros ne peuvent devenir la propriété des demandeurs ou utilisateurs finals. Ils ne peuvent être protégés par un droit de propriété industrielle ou intellectuelle. Ils sont attribués après réservation par l’Autorité de Régulation des Télécommunications/TIC, pour une durée limitée qui correspond à la durée de l’exploitation du service ou de l’application ».
Au-delà de cette précision, la question du rapport d’une personne à son numéro de téléphone n’en demeure moins intéressante et cruciale et ce, d’autant plus que mademoiselle R. se prévalait, elle-même, de « ses droits sur la ligne téléphonique qui fait partie intégrante de son identité ». Si un numéro de téléphone est incontestablement une donnée à caractère personnel [22] permettant indirectement l’identification de la personne physique à laquelle il se rapporte, l’identité d’une personne peut être ainsi ramenée à un numéro ?
Selon l’article 1er de la loi française relative à l’Informatique aux libertés [23], « l’informatique doit être au service de chaque citoyen. Son développement doit s’opérer dans le cadre de la coopération internationale. Elle ne doit porter atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droits de l’homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques ».
*Note sous Tribunal de commerce d’Abidjan, 8 mai 2014, n° 669/14 [Décision accessible sur le site internet du Tribunal de commerce d’Abidjan, www.tribunaldecommerceabidjan.org]
**Le secteur des télécommunications était antérieurement régi par la Loi n° 95-536 du 07 juillet 1995 portant Code des Télécommunications en Côte d’Ivoire.
Discussions en cours :
Brillant article ! pouvez vous me contacter svp je souhaite directement échanger avec vous sur ce sujet.
Votre article est intéressant. Cependant, je ne partage pas l’interpretation que vous faites des articles 104 et 109 de la loi relatives aux telecommunications.
La concurrence (ou l’alternative) entre la compétence du regulateur (organe administratif) et le tribunal de commerce (organe juridictionnelle) n’est pas singulière.
Cette alternative existe dejà (en matière de travail) sans que l’une des options n’exclut l’autre. La possibilité qui est donnée à l’inspection du travail de regler les litiges par la voie de la conciliation n’exclut pas la competence de la juridiction sociale. La redaction de l’article 104 laisse penser que le regulateur tranche les litiges ; Et meme dans ce cas, le reglement administratif des litiges par l’ARTCI, une sorte d’arbitrage administratif, de notre point de vue, ne devrait être perçu que comme une alternative à la voie judiciaire.
Le jugement de l’espèce du tribunal de commerce reconnaissant sa propre compétence en matière de ntic nous semble le plus proche de la vérité juridique.
Me Eric BABLY, Avocat,
BK & Associés, Abidjan
Cher confrère,
Je vous remercie de l’intérêt que vous avez bien voulu porter à mon article. Toutefois, votre réponse suscite certaines observations de ma part.
Le secteur ivoirien des Télécommunications /TIC fait l’objet d’un nouvel encadrement juridique et institutionnel (ordonnance n° 293 du 21 mars 2012 relative au Télécommunications/TIC).
C’est dans ce cadre qu’a été instituée l’Autorité de Régulation des Télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI). Il s’agit d’une autorité administrative indépendance qui a une compétence quasi-juridictionnelle en plus de sa compétence administrative en matière de Télécommunications/TIC.
Plusieurs articles de l’ordonnance illustrent cette nouvelle compétence juridictionnelle de l’ARTCI. Il s’agit notamment de :
• l’article 72, selon lequel, l’ARTCI a pour missions : « de connaître et de régler, en premier ressort, les litiges du secteur ;….. »
• l’article 104, selon lequel : « l’ARTCI connait en premier ressort, tout litige pouvant survenir dans le secteur des Télécommunications/TIC…… »
• l’article 109, selon lequel : « toute personne physique ou morale peut saisir l’ARTCI pour demander réparation d’un préjudice subi… dans le cadre des activités de Télécommunications/tic …… ».
Il faut noter que c’est eu égard à cette compétence juridictionnelle que les décisions rendues par l’ARTCI, en matière de Télécommunications/TIC, « en premier ressort », sont des jugements susceptibles d’un recours en appel.
Au vu de ce qui précède, c’est donc une méprise que de cantonner l’ARTCI à un rôle uniquement administratif alors que sa compétence juridictionnelle est clairement établie par la loi.
Cette compétence juridictionnelle de l’ARTCI est d’ailleurs l’une des innovations majeures justifiant même la création cette structure qui se trouve être l’organe le mieux à même de statuer sur les conflits techniques portant sur les télécommunications/TIC.
Ce qui n’est pas le cas du tribunal de commerce.
Ainsi, l’argumentation selon laquelle l’ARTCI serait uniquement un organe administratif est, d’une part, dénuée de tout fondement juridique.
D’autre part, cette argumentation manque de pertinence. En effet, le choix de l’ARTCI comme juridiction vise à désengorger les tribunaux classiques et de permettre à cette instance spécialisée de résoudre de façon préalable des litiges souvent complexes.
Par conséquent, le fait pour le tribunal de commerce de reconnaître sa compétence en matière de télécommunications/TIC, loin d’être « le plus proche de la vérité juridique » comme vous le soutenez, n’est plus ni moins qu’une méconnaissance de l’ordonnance qui est claire à ce propos.
Cela dit, la question de la vaste étendue de la compétence de l’ARTCI mérite d’être posée.
Me Bably,
L’inspection du travail n’est pas une autorité administrative indépendante (AAI) et ne dispose pas de pouvoirs aussi importants que l’ARTCI ( voir l’ordonnance 2012-293, le décret 2012-934 et le règlement intérieur).
Bonjour Dr,
je viens par ce message vous demandez s’il existe une disposition faisant état de poursuivre l’ARTCI en justice en cas de manquement d’elle ?
Merci
Bonjour M. YAO,
Merci pour l’intérêt porté à l’article.
Cela dit, votre question ne m’apparaît pas claire.
Pourriez-vous la préciser ?
Cdlt,