Le sujet est intéressant, il est au cœur de la question de la modernisation de la justice. En effet, depuis quelques années on peut constater que, du point de vue du justiciable comme de celui des professionnels du droit, l’informatique tend à prendre une place prépondérante.
Les outils informatiques permettent de répondre à deux impératifs propre à une bonne administration de la justice :
• La démocratisation et la transparence de la justice : aujourd’hui, il est possible pour le justiciable de consulter tous les textes de loi par le biais de légifrance.com, celui-ci peut aussi consulter le site internet de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat pour se tenir au courant de l’évolution de certaines jurisprudences sensibles.
• Une justice plus rapide et moins couteuse : en effet l’utilisation des outils informatiques permet indéniablement de gagner du temps. Par exemple le système RPVA (réseau privé virtuel avocat) créé en 2005 permet à l’avocat de communiquer par la voie électronique les actes de procédure devant le Tribunal de Grande Instance, la Cour d’Appel et depuis le 27 mai 2013, devant les juridictions commerciales.
Le nouveaux décret vient modifier le titre XXI du code de procédure civile nommé « la communication par voie électronique ».
La principale modification apportée est la création de l’article 748-8 et 748-9 du Code de procédure civile. Il est désormais possible, pour le greffe, de transmettre les avis et convocations aux parties par voie électronique, notamment par le biais de SMS ou bien d’email. Deux conditions existent pour que cette envoi puisse avoir lieu ainsi :
• Il faut que le texte prévoyant l’envoi indique que la communication se fasse par « tout moyen ». La communication par voie électronique est aussi impossible en matière pénale, en effet, La loi n°2015-177 du 16 février 2015 (article 14) relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures permet aux greffes de transmettre les avis et convocation tout moyen, et donc par voie électronique.
• Le consentement du destinataire doit être recueilli dans le cadre d’une déclaration préalable faite au greffe.
On est donc encore loin d’une justice totalement informatisée, un grand nombre d’actes doivent encore être faits par lettre simple (notamment la saisine du Tribunal de Grande Instance par voie de requête), Lettre recommandée avec avis de réception, ou par le biais d’un huissier de justice, notamment en matière d’assignation.
Le principal obstacle au développement de la communication par voie électronique est l’absence d’une interface permettant au justiciable de communiquer avec les juridictions administrative, civile, commerciale et pénale. S’il existe le RPVA, celui-ci ne concerne que les avocats.
Dans le cadre du projet « Justice du XXIème siècle », le ministère de la justice prévoit de créer une interface nommé « Portalis » qui remplirait cette fonction. De nombreuses critiques se sont élevées contre le projet qui a été jugé irréaliste. Certains ont notamment pointé le fait que les juridictions utilisent chacune des logiciels différents ce qui rendrait l’entreprise impossible.
Ces critiques, régressives, doivent être combattues. En effet, il ne fait pas de doute que la réforme de la justice doit inévitablement passer par la création d’une telle interface.
Cependant, la chancellerie a indiqué que le projet aboutirait cette année, or, pour l’instant, celle-ci n’a communiquée aucune information sur le nouveau système.
Ainsi, l’informatisation de la justice semble être une perspective inévitable. La transmission par voie électronique des convocations est en effet une évolution naturelle de la procédure civile. Néanmoins, il existe des cas où des évolutions souhaitables ne font l’objet d’aucune réflexion. C’est le cas notamment de la visio-conférence qui, si elle est beaucoup utilisée en matière pénale, reste délaissée en matière civile. Son utilisation permettrait pourtant de faciliter un grand nombre de litiges, notamment en matière familiale dans les conflits à vocation internationale, où l’impossibilité de réunir les parties à un même endroit tend à rallonger de manière substantielle la résolution du litige.
Discussion en cours :
En effet, ce sujet est certainement aussi important que la montée de la profession de médiateur qui est un autre volet de ce décret et qui fait l’objet de discussion parfois très animée et a contrario quelques peu virulentes.
Des questions très simples en viennent à être posées concernant l’informatisation de la justice. Le risque n’est-il pas d’en arriver à produire des décisions dépersonnalisées nivelées par le bas ? La politique TAFTA n’est-elle pas en train de trouver une porte d’accès par la voie informatique ?