Un détenteur d’un compte collectif peut être interdit bancaire sans défaut de paiement qui lui soit imputable !
Définition d’un compte collectif
Il s’agit d’un compte avec plusieurs titulaires (compte joint ou compte indivis). Le compte joint présume une solidarité des titulaires, et le compte indivis fonctionne selon les règles de l’indivision (pas de solidarité).
Conditions : un défaut de provision suffisante, imputable à un cotitulaire
L’interdiction bancaire d’un seul titulaire d’un compte collectif peut affecter les autres titulaires : c’est ce que prévoit l’art. L.131-80, alinéa 2, du Code monétaire et financier (CMF) :
« lors du rejet d’un chèque pour défaut de provision suffisante, les dispositions des articles L. 131-72 et L. 131-73 sont de plein droit applicables à tous les titulaires du compte en ce qui concerne ce compte et les autres comptes dont ils pourraient être individuellement titulaires ».
Les conditions sont énoncées à l’alinéa précédent : « lorsque l’incident de paiement est le fait de l’un quelconque des titulaires d’un compte collectif, avec ou sans solidarité… » (art.L.131-80, al.1er). Cela signifie que l’incident peut provenir de n’importe lequel des cotitulaires, et l’incident peut provenir de n’importe lequel des comptes de ces cotitulaires.
Les articles visés sont ceux qui organisent la procédure en cas de défaut de provision suffisante (art. L131-73 CMF) et prévoient une neutralisation des moyens de paiement des titulaires du compte collectif (art. L.131-72, al.1er) : les chèques ne peuvent plus être délivrés s’il y a « un incident de paiement relevé au nom du titulaire du compte pour défaut de provision suffisante ».
Conséquence : il y a risque d’interdiction bancaire pour des personnes qui ne sont pas auteurs d’incidents de paiement
En effet, l’article L.131-84 prévoit que la banque doit avertir la Banque de France, en cas d’incident de paiement pour défaut de provision suffisante, et absence de régularisation.
Le motif de l’interdiction bancaire (défaut de provision suffisante) est justement celui visé par l’article concernant le compte collectif (alinéa 2 de l’article L.131-80).
La jurisprudence et la doctrine confirment cette solution :
- « si (…) aucun des cotitulaires n’a été désigné responsable du compte collectif, l’interdiction bancaire s’applique au compte collectif et à tous les comptes détenus individuellement par chaque cotitulaire » (Th. BONNEAU, Droit bancaire, LGDJ-Domat, 10ème éd., §506, p.361) ;
- A un risque de défaut d’approvisionnement, Mme Clément envisage celui « d’être exposé aux sanctions de l’interdiction bancaire sur l’ensemble de ses comptes à raison de l’émission par son partenaire d’un chèque sans provision sur le compte joint, sauf désignation à l’avance d’un titulaire donné comme responsable des incidents de paiement à survenir sur ce compte collectif » (Ch. CLEMENT, Solidarité et compte bancaire, D. 2007.1805, nbp n°12, qui vise : VUITTON, A propos de la loi du 3 janvier 1975 - Les comptes collectifs ou joints et l’interdiction bancaire d’émettre des chèques, Gaz. Pal. 1976. 1. Doctr. 369).
- CA Paris, 19/10/1989, Rev. dr. bancaire et bourse, n°17, janvier-février 1990, 40, obs. CREDOT et GERARD.
Exception
Les titulaires d’un compte collectif peuvent désigner un « responsable » en cas d’interdiction bancaire (art. L131-80, al.1er) : mais cette faculté doit avoir été mise en œuvre avant l’incident de paiement.
A défaut, l’interdiction s’applique à tous les cotitulaires, et pour tous leurs comptes.