1) Contexte.
La Haute juridiction a déjà eu l’occasion de définir les règles d’assistance d’un salarié lors de l’entretien (qui est obligatoire) précédant la signature de la convention de rupture.
Ainsi, le fait que l’employeur n’ait pas informé le salarié de la possibilité de se faire assister n’est pas une cause de nullité de la convention.
Cependant, la nullité de la convention est encourue si le salarié démontre en quoi ce défaut d’information a pu vicier son consentement (Cass. Soc., 29 janvier 2014 n°12-27 594 et Cass. soc., 19 novembre 2014 n°13-21207).
Dans l’arrêt que nous commentons aujourd’hui, la Cour de cassation aborde la question de la méconnaissance des règles d’assistance de l’employeur.
2) Faits et procédure.
M. Z a été engagé le 1er décembre 2010 en qualité de jardinier par la société Services-Antilles.Com.
Le salarié a signé une convention de rupture le 14 février 2013 et le 24 juillet 2013, il a saisi la juridiction prud’homale d’une contestation de la validité de cette rupture.
La Cour d’appel a validé la convention de rupture et l’a débouté de ses demandes indemnitaires pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le salarié s’est alors pourvu en cassation selon le moyen qu’il n’avait pas été informé de son droit à être assisté, ni de la circonstance que son employeur serait lui-même assisté lors de la signature de la convention.
3) Solution de la Cour de cassation.
Dans son arrêt du 5 juin 2019, la Cour de cassation affirme que l’assistance de l’employeur lors de l’entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l’entretien (Cass. Soc., 5 juin 2019, n°18-10901).
4) Analyse de la solution de la Cour de cassation.
4.1) Dans quel cas un employeur peut-il se faire assister ?
Selon l’article L. 1237-12 du Code du travail, le salarié peut se faire assister :
Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ;
Soit, en l’absence d’IRP dans l’entreprise, par un conseiller du salarié.
Avant l’entretien, le salarié doit informer l’employeur de son choix de recourir à un assistant.
L’employeur peut se faire assister uniquement lorsque « le salarié en a fait lui-même usage ».
Le cas échéant, l’employeur devra informer le salarié, avant l’entretien, de son choix d’être assisté.
Ainsi, l’employeur ne peut se faire assister si le salarié se présente seul à l’entretien. Dans les faits de l’arrêt commenté, l’employeur a méconnu cette règle : il était assisté (par le cogérant de la société) alors que le salarié ne l’était pas.
Le salarié plaidait qu’il s’était présenté seul (et donc non assisté) car l’employeur ne l’avait pas préalablement informé de son droit à être assisté et du fait qu’il était lui-même assisté.
Sur ce fondement, il a demandé l’annulation de la convention de rupture, plusieurs mois après.
4.2) La nullité de la convention de rupture n’est pas encourue en l’absence de vice du consentement du salarié.
4.2.1) Le fait pour l’employeur de se faire assister alors que le salarié n’a pas fait usage de cette possibilité n’entraîne pas automatiquement la nullité de la convention.
La Cour de cassation affirme que « L’assistance de l’employeur lors de l’entretien préalable à la signature de la convention de rupture ne peut entraîner la nullité de la rupture conventionnelle que si elle a engendré une contrainte ou une pression pour le salarié qui se présente seul à l’entretien ».
Ainsi, la Cour de cassation décide que le fait que l’employeur se fasse assister tandis que le salarié n’a pas fait usage de cette possibilité, n’entraîne pas automatiquement la nullité de la convention de rupture.
Cela n’est pas étonnant : la loi ne prévoit pas une telle sanction.
4.2.2) La nullité de la convention peut être obtenue par le salarié s’il prouve que l’assistance de l’employeur a entravé la liberté de son consentement.
Il est possible pour le salarié d’obtenir la nullité en démontrant que le fait que l’employeur ait été représenté a exercé sur lui une pression ou une contrainte l’ayant obligé à signer et altérant ainsi son libre consentement.
En l’espèce, le salarié ne démontrait pas une pression ou une contrainte, sa demande d’annulation a donc logiquement été refusée.
Source : C. cass. 5 juin 2019 n°18-10901