La jurisprudence n’a de cesse de rappeler que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis (cass. soc., 26 févr. 1991, n° 88-44.908).
La Cour de cassation rappelle que si pendant la période des congés payés, le contrat de travail est naturellement suspendu, ce n’est pas le cas de l’obligation de loyauté qui elle, demeure. Tirant profit de ce principe, la haute juridiction rappelle régulièrement que mettre sa force de travail au profit d’un concurrent pendant une période de suspension du contrat de travail constitue un manquement à l’obligation de loyauté qui peut déboucher sur un licenciement.
Dans l’arrêt de la Cour de cassation, était posée la question de savoir si l’employeur doit justifier d’un préjudice particulier pour licencier un salarié ayant travaillé pour la concurrence pendant ses congés payés.
Une salariée a été engagée le 1er décembre 2007, en contrat à durée indéterminée, par une société de sécurité et a occupé en dernier lieu les fonctions de chef d’équipe sécurité cynophile. En parallèle dudit contrat, elle s’est fait engager, alors qu’elle était en congés payés, par une société de sécurité concurrente en contrat à durée déterminée pour la période du 15 au 26 avril 2013 en qualité de maître-chien.
Apprenant cette activité parallèle, son 1er employeur a pris la décision de la licencier pour faute grave.
Cette salariée va saisir la juridiction prud’homale aux fins que soit déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre.
La cour d’appel d’Orléans, par arrêt en date du 25 février 2016, va débouter la salariée de ses demandes et confirmer le licenciement de cette dernière.
La salariée va alors se pourvoir en cassation.
La salariée à l’appui de son pourvoi va notamment arguer que :
la conciliation du principe de libre exercice d’une activité professionnelle et de l’obligation de loyauté, qui continue à peser sur le salarié pendant la période de suspension de son contrat de travail, implique que l’exercice d’une activité professionnelle pour le compte d’une entreprise concurrente, au cours d’une période de congés payés, ne puisse justifier un licenciement que s’il cause un préjudice à l’employeur ;
qu’en considérant que le fait pour la salariée d’avoir exercé des fonctions de maître-chien pour le compte d’une société concurrente pendant une dizaine de jours, au cours d’une période de congés payés, constituait une faute grave justifiant son licenciement immédiat, sans avoir caractérisé l’existence d’un préjudice subi de ce chef par l’employeur.
La Cour de cassation va rejeter le pourvoi formé par la salariée en affirmant que « que la salariée, qui occupait le poste de chef d’équipe et avait une fonction de référente à l’égard de ses collègues, avait exercé pendant ses congés payés des fonctions identiques à celles occupées au sein de la société AVC Intervention, pour le compte d’une société directement concurrente qui intervenait dans le même secteur d’activité et dans la même zone géographique, et avait ainsi manqué à son obligation de loyauté en fournissant à cette société, par son travail, les moyens de concurrencer son employeur, a pu en déduire, sans avoir à caractériser l’existence d’un préjudice particulier subi par l’employeur, que ces agissements étaient d’une gravité telle qu’ils rendaient impossible le maintien de l’intéressée dans l’entreprise »
Il faut donc en retenir que le fait d’avoir exercé pendant ses congés payés des fonctions identiques pour le compte d’une société concurrente est constitutif d’une faute grave.
L’intérêt de l’arrêt est que les employeurs confrontés à une telle situation pourront rompre le contrat du salarié sans avoir à établir l’existence d’un préjudice particulier.