Fruit de longues années de batailles et de revendication le Kosovo accède à l’indépendance. Sa renaissance sur la scène internationale laisse ajouter un nouveau sujet de droit international.
C’est dans cette optique que nous essayerons de mener une réflexion sur l’indépendance de ce pays. Enigme qui exige une réponse. Une réponse qui va dissiper les apparats critiques qui planent sur le jeu : reconnaissance – indépendance.
Sur ce, les points qui retiendrons notre attention sous-entendent une liaison qui tape sur trois aspects : droit, reconnaissance et indépendance.
Il nous a semblé, alors, utile de décrypter ce contexte tout en se rapportant à la réalité juridique des faits.
I – LA RECONNAISSANCE
La reconnaissance est définie en droit international comme étant un acte unilatéral et discrétionnaire. La reconnaissance peut être de jure ou de facto.
A vrai dire, deux grandes théories sont à la base de cette notion : la théorie constitutive et la théorie déclarative.
Selon la théorie constitutive un Etat nouvellement crée n’a pas de personnalité internationale tant qu’il n’a pas été reconnu, même si tous les éléments constitutifs de l’Etat sont réunis.
Alors que, pour la théorie déclarative, là où on constate que la plus grande partie de la doctrine militent en sa faveur, consiste tout simplement dans la constatation de l’existence des attributs dudit Etat.
Il suit de cette brève identification, selon notre constat, que le Kosovo a été reconnu selon les principes de la dernière théorie, c’est-à-dire celle déclarative.
En fait, au lendemain de la proclamation de l’indépendance, le Kosovo a recueilli un nombre pas mal de reconnaissance émanant de plusieurs Etats notamment européen (à l’exception de l’Espagne), américains et d’autre pays (à l’exception de la Russie)…
En effet, la reconnaissance n’est que le produit de la proclamation d’indépendance. La reconnaissance consolide cette indépendance et ce, en officialisant des relations diplomatiques entre l’Etat qui reconnaît et l’Etat reconnu.
Mais, à l’aune de cette logique, est-ce possible pour toute entité qui réclame son indépendance sera nécessairement et systématiquement reconnue ?
A vrai dire, la réponse ne sera pas aussi claire, et ce, vu la non-clarté du statut même de la reconnaissance qui n’existe pas encore. La reconnaissance ne connaît pas de règle particulière. Dés lors, on ne parle guère de légalité sur ce propos. Parle-t-on, donc, de légitimité ? Sur cette question, on peut dire que la légitimité reste guidée par des rapports de force et on ne parle souvent que de légitimité a posteriori. (à titre d’exemple la légitimité posteriori est retenue pour Israël, aujurd’hui peut être pour le Kosovo. Mais elle n’est pas encore bien retenue pour la Palestine).
Sur ce chef, il faut rappeler que la C.I.J, à plusieurs reprises, a admis l’existence d’une obligation de ne pas reconnaître une entité créée en méconnaissance ou en violation des règles du droit international.
Mais, cela que veut-il dire ?
En fait, si l’on s’en tient au cas du Kosovo, on constate que son indépendance est à la base issue d’une conduite sécessionniste. Or, on sait bien que ladite sécession n’est pas admise par le droit international, la sécession est reconnue comme acte illicite et hors la loi.
Il suit de là que le Kosovo a acquis son indépendance à travers des actes contraire aux règles internationales et en violation de celles-ci.
Dès lors, peut-on déduire que la reconnaissance du Kosovo est illégale, de même, illégitime ?
Ainsi, la reconnaissance n’évoque-t-elle pas dans ce sens qu’une atteinte aux affaires internes de la Serbie et conséquemment l’acte de reconnaissance est en soi contraire aux principes et buts de la charte des Nations Unies notamment en ce qui concerne le principe de non-ingérence.
A vrai dire, la question reste sans lendemain et sans conséquence.
Cette perplexité, comme l’on a dit ci-dessus, est due à l’absence d’une règle permettant de normer la reconnaissance. Cette dernière sans un cadre normatif reste le maître champ des rapports de forces.
II – LES DROITS DU KOSOVO, LES DROITS DE LA SERBIE
A – Les droits du Kosovo
L’indépendance est sans doute un droit que proclame le Kosovo depuis des années. Mais l’indépendance vaut-elle l’implication systématique du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes tel qu’il est prévu par l’article 1 de la charte des NU ?
Pour résoudre ce problème là aussi, il faut poser une autre question capitale : à qui s’adresse ledit droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ? Le peuple Kosovar en est-il concerné ?
La réponse à ces questions trouve, bel et bien, des issues historiques :
Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes tel qu’il est édicté par la charte en 1945 s’est vu consolidé plus tard par certaines résolutions adoptées par l’AGNU. Des résolutions touchant quasiment à trois cas ou situations de peuples : notamment, les peuples sous colonisation, les peuples soumis à une discrimination et les peuples sous occupation territoriale.
Sous cet angle d’analyse, rien ne prouve dans la réalité des faits que le peuple Kosovar est sous colonisation, ni soumis à une discrimination, n’en plus il est sous occupation territoriale.
Le peuple Kosovar n’était, aucunement, sous ces trois qualifications.
Autrement dit, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne peut jamais être, du moins selon cette logique, une revendication légitimement exigible par le Kosovo.
On en déduit dès lors que la proclamation d’indépendance par le Kosovo est hors la loi.
Une autre fois la réalité des faits montre que la question de l’indépendance du Kosovo n’est que le produit des rapports de forces, et n’est que le fait de deux aspects :
D’abord, l’indépendance témoigne largement d’un processus sécessionniste. Or, la sécession comme l’on a montré précédemment n’est plus érigé en droit et reste un acte refusé et réfutable par le droit international tant qu’un texte n’est pas intervenu en l’admettant expressément. L’acte n’est, en fait, appréhendé que comme une conséquence des rapports de forces, et est administré dans un cadre d’ordre politique et non dans un cadre d’ordre juridique.
Ensuite, l’indépendance du Kosovo peut trouver son alibi dans l’existence d’un précédent dans la région, notamment les proclamations antérieures d’indépendances au niveau de l’Albanie, la Macédonie, la Bosnie-Herzégovine…
B – Les droits de la Serbie
En contre partie il faut bien constater que la Serbie ayant ainsi des droits.
Partant du fait qu’un Etat est l’ensemble de certains éléments constitutifs, notamment, le territoire, le peuple et l’autorité politique. Depuis lors, il appartient à tout Etat indépendant et donc souverain de revendiquer son droit à l’intégrité territoriale et politique du pays.
C’est précisément ce droit qui entre en conflit avec les doits des indépendantistes kosovars.
Dans ce sens, l’Etat Serbe fait valoir les principes directeurs de la souveraineté, autrement-dit : l’exclusivité, la plénitude et l’autonomie constitutionnelle.
Au rebours, on scrutant cette affaire, on a constaté que la reconnaissance du Kosovo constitue en soi une violation aux règles et principes du droit international notamment les règles afférentes au principe de non-intervention.
L’atteinte porte d’abord sur l’élément de l’exclusivité. Cette dernière veut dire que sur le territoire Serbe ne s’exerce, en principe, que la compétence de l’Etat Serbe et non d’une autre entité.
Ensuite, elle porte sur l’élément de l’autonomie. Cette dernière veut dire que l’Etat n’a pas de supérieur et n’obéit qu’à sa propre volonté.
Par conséquent, si on oblige un Etat de faire reconnaître ou d’accepter l’indépendance de l’une des ses propres entités ou circonscriptions territoriales, alors il faut constater là-dessus qu’il s’agit bel et bien d’un acte illicite violant les règles de la souveraineté ainsi que les buts et principes de la charte des NU.
Enfin, il sied de conclure que, suite à cette analyse juridique, l’Etat Serbe a en principe droit de se contredire à toute tentative touchant illicitement à l’intégrité territoriale et politique de son pays.
Cependant, il n’en reste pas moins vrai, que le télescopage ethnique et la balkanisation accrue et conçue dans la région, laisse favoriser la solution de l’indépendance du Kosovo, étant donné que l’indépendance puisse mettre fin à l’escalade des conflits et guerres qu’a connu la région depuis longtemps.
Par le Jst. AL-Bachir Sofiaine Samari
(Chercheur en thèse)