C’est en ces termes que le Conseil d’État, dans un arrêt du 4 mai 2016 (7ème et 2ème chambres réunies, n°396590) écarte la compétence du juge des référés précontractuels pour apprécier que les prestations fournies par une personne morale de droit privé faisant l’objet du contrat, entrent dans le champ de son objet social, à moins qu’un texte législatif ou règlementaire définisse expressément son objet social et ses missions.
En l’espèce, la Communauté de communes du Pays des Herbiers en Vendée a passé un marché à bons de commande portant sur des prestations de conseil auprès des particuliers dans le domaine de la rénovation énergétique des logements. Les prestations tendaient à assurer des permanences de conseil et d’évaluation énergétique et proposer aux habitants une instruction technique des dossiers d’aide et des audits et pronostics énergétiques sur plan et sur site.
L’association Agence Départementale d’Information sur le Logement et l’Énergie (ADILE) de Vendée a remporté le marché.
L’association locale ÉLISE a saisi le juge des référés précontractuels du tribunal administratif de Nantes pour l’annulation de la procédure de passation à compter de l’analyse des offres ainsi que l’annulation de la décision d’attribution du marché à l’association ADILE de Vendée.
Le tribunal administrai a accueilli ces demandes. L’association ADILE s’est pourvue en cassation.
Le juge des référés avait accueilli le moyen tiré de ce qu’il n’entrait pas dans les missions statutaires d’une ADILE de délivrer des prestations d’audit et de conseil spécialisés aux particuliers relatives à l’amélioration et à la performance énergétique de leurs habitats et d’instruire les demandes d’aides financières.
Le Conseil d’État exclut de la compétence du juge des référés précontractuels l’examen de l’objet social d’une personne morale de droit privé se portant candidate à un contrat public au vu de vérifier si les prestations effectuées à ce titre entrent dans le champ de son objet social et de ses missions.
Toutefois, il en est autrement si un texte législatif ou règlementaire prévoit expressément son objet social et ses missions, ce qui en l’espèce était le cas pour les ADILE.
Régies par l’article L366-1 du Code de la construction et de l’habitation, les ADILE ont pour mission : « (…) d’informer gratuitement les usagers sur leurs droits et obligations, sur les solutions de logement qui leur sont adaptées, notamment sur les conditions d’accès au parc locatif et sur les aspects juridiques et financiers de leur projet d’accession à la propriété, ceci à l’exclusion de tout acte administratif, contentieux ou commercial. »
Aux termes de l’article L232-1 du Code de l’énergie : « Le service public de la performance énergétique de l’habitat assure l’accompagnement des consommateurs souhaitant diminuer leur consommation énergétique. Il assiste les propriétaires et les locataires dans la réalisation des travaux d’amélioration de la performance énergétique de leur logement et leur fournit des informations et des conseils personnalisés ».
L’article L232-2 de ce Code dispose : « (les agences départementales d’information sur le logement) fournissent (au consommateur) les informations techniques, financières, fiscales et réglementaires nécessaires à l’élaboration de son projet de rénovation. Elles peuvent également assurer leur mission d’information de manière itinérante, notamment en menant des actions d’information à domicile, sur des périmètres ciblés et concertés avec la collectivité de rattachement et la commune concernée ».
Au regard de ces dispositions, la Haute juridiction estime que l’ADILE de Vendée est bien compétente pour proposer des missions de conseil aux particuliers en matière de performance et de rénovation énergétique des logements. Elle annule donc l’ordonnance du juge des référés précontractuels.
En revanche, il relève de la mission du juge du référé précontractuel de vérifier si les prestations objet du marché entrent dans le champ de compétence d’un établissement public, comme en décidait le Conseil d’État dans un arrêt du 18 septembre 2015 :
« Considérant qu’il appartient au juge du référé précontractuel, saisi de moyens sur ce point, de s’assurer que l’appréciation portée par le pouvoir adjudicateur pour exclure ou admettre une candidature ne constitue pas un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ; que, dans ce cadre, lorsque le candidat est une personne morale de droit public, il lui incombe de vérifier que l’exécution du contrat en cause entrerait dans le champ de sa compétence et, s’il s’agit d’un établissement public, ne méconnaîtrait pas le principe de spécialité auquel il est tenu ». (Conseil d’État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 18/09/2015, 390041)