Le parasitisme se définit comme la circonstance selon laquelle, à titre lucratif et de façon injustifiée, une personne morale ou physique s’inspire ou copie la valeur économique d’autrui individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissement. Le parasitisme suppose ainsi la démonstration d’une reprise à l’identique et/ou en similitude d’une valeur économique par un tiers ayant eu la volonté de se placer dans le sillage économique du parasité afin d’en tirer profit.
La Cour d’appel de Paris a, ainsi, rappelé dans un arrêt du 15 avril 2016 (RG n°2012072530) les conditions du parasitisme en confirmant notamment que « le grief de parasitisme peut être retenu sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence d’un risque de confusion entre les produits et leur origine ».
En l’espèce, la société Debonix France, spécialisée dans la vente d’outillages électroportatifs et semi-stationnaires avait mis en ligne en mars 2011 une nouvelle version de son site internet ayant fait l’objet d’importants investissements humains et financiers. En juin 2012, cette dernière découvre que la nouvelle version du site internet de la société concurrente Quincaillerie Angles reprenait l’essentiel de la présentation de son site.
Estimant avoir subi un préjudice de ce fait, la société Debonix France avait assigné la société Quincaillerie Angles sur le fondement de l’article 1382 du Code civil pour actes de parasitisme devant le Tribunal de Commerce de Paris. Par jugement en date du 14 février 2014, ce dernier avait débouté la requérante de ses demandes au motif que le risque de confusion entre les deux sociétés, pourtant concurrentes, n’avait pas été démontré.
C’est dans ce contexte, que le litige a été porté devant la Cour d’appel de Paris par la société Debonix France afin de demander à la Cour si la reconnaissance d’un acte de parasitisme nécessitait ou non la démonstration d’un risque de confusion dans l’esprit du public entre les produits ou services litigieux.
La Cour d’appel de Paris répond par la négative et confirme que « le grief de parasitisme peut être retenu dans la compétition que se livrent (…) des acteurs économiques concurrents [ou non] (…) sans qu’il soit nécessaire de démontrer l’existence d’un risque de confusion entre les produits ou leur origine ».
En outre, la Cour d’appel de Paris précise eu égard à l’évaluation du préjudice apprécié notamment par i) les impacts économiques pour le parasité, ii) l’économie réalisée par le parasitaire par l’utilisation ou la reprise de l’actif économique du parasité ou encore, iii) la perte de notoriété du parasité qu’il importe peu « au stade de l’appréciation de la faute, que le nombre de visiteurs [du site internet] ou le chiffres d’affaires de la société Debonix n’aient pas été sensiblement affectés ».
La Cour condamne ainsi la société Quincaillerie Angles à verser à la société Debonix la somme de 15.000 euros pour la réparation du préjudice subi au motif la société Debonix a été privée « d’un avantage concurrentiel et de la rentabilisation optimale de ses investissements ».
Il est intéressant de relever le raisonnement de la Cour d’appel de Paris qui semble désormais apprécier le préjudice du parasité non plus sur le terrain du gain réellement manqué mais davantage sur la perte de chance de rentabiliser de façon optimale ses investissements.
L’évaluation du préjudice, à plus forte raison, dans le cadre de litiges en parasitisme de sites internet est une question délicate en raison notamment de la difficulté pour le parasité d’apporter la preuve de son préjudice. Très souvent, les entreprises innovantes à forte croissance, victimes de parasitisme, ne voient pas leur chiffre d’affaires baisser ou le nombre de visites de leur site internet décroitre en raison de ces actes de parasitisme alors qu’elles subissent un préjudice.
Rappelons qu’en tout état de cause, la Cour de cassation a précisé que « s’infère nécessairement un préjudice d’un acte de concurrence déloyale et de parasitisme » (Cass. Com 21 février 2012, n°10-27966).
Il conviendra donc de rester attentif aux prochaines décisions des juridictions sur cette question.