Définition de la prise d’acte
La prise d’acte n’est pas réglementée par le Code du travail et constitue une voie de rupture alternative au licenciement et à la démission.
Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail, il incombe au juge de trancher ce litige en décidant quelle est la partie qui a rompu le contrat.
Les juges auront alors deux possibilités :
soit reconnaître que l’employeur a commis des fautes suffisamment graves justifiant la prise d’acte : cela produira alors les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (le salarié percevra alors son indemnité de licenciement, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que l’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés) ;
soit juger que la prise d’acte n’est pas justifiée. Dans ce cas, cette prise d’acte produira les effets d’une démission (le salarié n’aura droit à aucune indemnité de licenciement, ni de préavis, ni même droit à l’assurance chômage).
Manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail
Depuis un arrêt du 30 mars 2010, pour que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la Cour de cassation exigeait simplement que les manquements reprochés à l’employeur fassent obstacle à la poursuite du contrat de travail.
Depuis une série d’arrêts rendus le 26 mars 2014, la Cour de cassation a nettement infléchi sa jurisprudence en la matière, et précise dorénavant, aux termes d’une jurisprudence devenue constante, qu’il appartient au salarié de démontrer l’existence de manquements graves, empêchant la poursuite du contrat de travail.
Et ce sont les juges du fond qui sont chargés d’apprécier le niveau de gravité de ces manquements. La Cour de cassation n’opère plus qu’un contrôle léger sur cette appréciation.
Ces derniers doivent ainsi établir, d’une part les manquements de l’employeur, et d’autre part apprécier la gravité du manquement patronal, c’est-à-dire apprécier si ce manquement était suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, et donc justifier la prise d’acte par le salarié.
Monsieur Pierre Bailly, Conseiller doyen de la chambre sociale de la Cour de cassation, indiquait à ce titre, au sein de la Semaine Sociale Lamy, n°1635 :
« D’une certaine façon, le critère est proche de celui de la faute grave du salarié qui empêche, elle aussi, la poursuite du contrat de travail. Il y a une certaine parenté, même si l’assimilation ne peut être totale ».
« Si un salarié invoque un fait qui empêche la poursuite du contrat, mieux vaut en tirer les conséquences rapidement. Si l’intéressé reste un an ou deux dans l’entreprise, sans protester ni réagir, on pourra lui reprocher de n’avoir pas considéré que le manquement ensuite invoqué compromettait la poursuite de la relation contractuelle. Ceci vaut pour la prise d’acte mais aussi pour la résiliation judiciaire ».
Lorsque le juge considère qu’un doute subsiste sur la réalité et la gravité des faits invoqués par le salarié, le juge estime alors que le salarié n’a pas établi les faits qu’il alléguait à l’encontre de l’employeur comme cela lui incombait, et doit requalifier la prise d’acte de la rupture du contrat de travail en démission.
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Bonjour ; un salarié prenant acte pour cause d’heures supplémentaires non rémunérées peut à priori obtenir gain de cause devant un tribunal, mais si les faits reprochés remontent à plus de 3 ans, l’ancienneté de la situation est elle un obstacle à la reconnaissance de sa prise d’acte. Si je lis votre article plus haut je me dis que le salarié pourrait être condidéré comme démissionnaire, tout en obtenant le règlement de ses heures sup et accessoires attenants ? y a t-il des jurisprudence là dessus ?
Merci pour les précisions que vous pourrez m’apporter
C.D
Bonjour, merci pour cette analyse, auriez-vous qq exemples de jurisprudences montrant quel type de faute est suffisamment grave pour justifier la prise d’acte ?
Cordialement,
Cher Monsieur, il existe de multiples exemples très diversifiés de prise d’acte justifiée, au regard de la situation de chaque salarié. Cela peut être le fait de retirer ses fonctions à un salarié sans qu’un autre poste ne lui soit proposé, le fait d’avoir vidé de son contenu la prestation de travail du salarié, le non-paiement de primes prévues au contrat de travail du salarié et représentant une partie importante de sa rémunération, la modification unilatérale du contrat de travail, et, plus exactement, la modification des conditions de rémunération créant un lourd préjudice au salarié…
Pour plus de précisions sur ce point, n’hésitez pas à prendre contact avec moi.
Bien à vous,
Bonsoir Maître ,
J’ai pris acte de la rupture de mon contrat de travail, il y a plus d’un an.
La cause étant que mon ex-employeur ne m’a pas payé mes primes ( primes que j’ai 2 fois par an depuis 9 ans) .
J’ai lu énormément d’articles et je suis dubitatif sur la décision à venir des juges.
L’audience n’a pas encore eu lieue car la partie adverse renvoie à chaque fois de nouvelles pièces quelques jours avant l’audience.
J’ai bien entendu engagé un avocat mais je ne me sens pas très soutenu par ce dernier.
Peut-être est ce par ce que je n’ai pas l’habitude de ce genre de procédure.
Pouvez-vous me donner un exemple d’arrêt sur le non-paiement des primes SVP ?
Je vous remercie par avance,
Bien cordialement,
Bonjour
Le non-paiement des primes n’est pas suffisant pour justifier la rupture du contrat de travail. Il faut, comme indiqué dans l’article que cela rende impossible la poursuite du contrat de travail.
Le conseil des prud’hommes devrait condamner l’employeur à payer les primes et les dommages intérêts à prouver résultant du non-paiement de ce primes mais l’employeur peut prouver que la non-réalisation du préavis lui cause un préjudice et obtenir des dommages intérêts.
Relisez l’article il est compréhensible par un non-juriste.
Cordialement
Bonjour
Est ce qu un non respect des minima de rémunérations conventionnelles est une faute suffisamment grave
pour justifier une prise d acte ?
Cordialement
Bonjour,
Dans ce cas, le Conseil de prud’hommes prendra en compte la différence entre le salaire perçu et le minimum conventionnel afin de se prononcer sur la gravité de la faute. Les juges prendront également en compte l’ancienneté du grief et le préjudice que vous subissez pour établir si cette faute justifie la prise d’acte de la rupture de votre contrat de travail. Tous ces éléments sont à apprécier au cas par cas.
Dans votre situation, une demande de résiliation judiciaire pourrait aussi s’avérer fondée, sans encourir le risque lié à une prise d’acte.
N’hésitez pas à me contacter directement pour plus de renseignement.
Mathieu Lajoinie
Avocat au barreau de Paris
www.avocat-lajoinie.fr
Bonjour.
J’ai signé un CDD à terme imprécis le 06/03/2017 pour remplacer une salariée en arrêt de travail.
Le 07/08/2017 je reçois un rappel à l’ordre concernant :
mes retards répétitifs (plus de véhicule, je prends l’autobus)
L’absence de téléphone portable
l’absence de véhicule personnel (elet substantiel de mon ct de travail)
mon comportement qui ne serait pas approprié et qualifié d’agressif par les collègues.
Lors d’une communication avec mon chef de service il y a 15 j environs, celle-ci m’apprend que j’aurais fait une faute
Le 17/10/2017 je reçois une convocation à un entretien préalable de licenciement.
J’ai lu que la procédure de licenciement n’est pas applicable aux CDD, mis à part celui pour faute.
J’ai demandé à mon employeur une augmentation de mes heures de travail puisque j’avais postulé pour un poste de jour à temps plein.
La chef de service m’a dit qu’elle avait un CDI à temps plein qui se libérait, mais qu’elle ne me le proposait pas car des patients se seraient plaint. Elle l’a proposé à une salariée arrivée après moi.
J’ai demandé dans un souci d’amélioration personnelle la teneur des propos tenus par les patients, jamais suivi d’effet, elle n’a pas le dossier.
Or moi les patients dont je m’occupe me disent leur satisfaction, et j’ai même un courrier de satisfaction.
De plus les nouvelles embauchées le sont sur la base d’un temps plein.
Des collègues ont dû démissionner pour aller travailler ailleurs sans toucher leur prime de précarité.
Il y a des heures de travail, ou des dimanches travaillés qui sont régulièrement oubliés sur les feuilles de paye.
Je comprends que l’employeur veuille cesser les relations contractuelles et moi également à présent.
Puis-je demander une rupture d’un commun accord dans un premier temps en réponse à cet entretien préalable au licenciement et une prise d’acte ensuite, ou dois-je faire une prise d’acte immédiatement ?
Est ce que les motifs que j’expose sont suffisants pour que la prise d’acte soit reconnu par les juges, car rupture du contrat il y aura c’est sûr, mais je ne démissionne pas de mon poste, c’est l’employeur qui intrigue pour que je m’en aille.
De plus il me semble que je subit un préjudice puisque l’employeur n’a jamais voulu m’accorder de temps plein ce qui m’a maintenu dans la précarité, empêchée d’acheter un véhicule et de retrouver du travail ailleurs.
Je ne souhaite pas mettre mon employeur en difficulté financière car j’ai crû comprendre qu’ils étaient en déficit depuis plusieurs années (même si actuellement il renouvelle sa flotte de véhicule).
Que puis-je faire s’il vous plaît pour que mes droits soient respectés par mon employeur ?
Chère Madame,
J’ai bien pris note de vos interrogations.
Compte tenu de l’ensemble des éléments portés à ma connaissance, un entretien téléphonique me semble préférable.
Si vous le souhaitez, n’hésitez pas à me contacter au 06.42.98.66.25 ou directement par mon site internet : www.avocat-lajoinie.fr
Bien à vous,
Mathieu Lajoinie
Bonjour,
Je suis embauchée en CDI dans une société depuis 1 an et 4 mois sur un poste dont mes fonctions sont, entre autres, la réalisation des créations graphiques pour communiquer sur nos événements (4X3, flyers etc...).
Etant limitée à 3000 caractères, je ne peux énumérer et détailler tous les faits que je reproche à mon employeur, ils sont nombreux mais je vais me concentrer sur le dernier fait qui m’a fait prendre un arrêt maladie sur les conseils de mon médecin.
La semaine dernière lors d’une réunion d’équipe avec ma nouvelle direction alors que j’avais déjà fait part à ma direction que je me sentais isolée de l’équipe, mon directeur a passé une bonne partie de la reunion à discréditer mon travail en disant que j’avais fait quelque chose de grave, et qu’il s’agissait même d’une faute professionnelle. La faute qu’il qualifie de grave est le fait, pour moi qui suis freelance en communication en plus d’être salariée dans cette société, d’avoir publier sur ma page Facebook "professionnelle" (book de mes créations) les créations que j’avais faites dans le cadre de mon activité salariée. En "faisant croire" dit-il que c’est ma société qui les a faite. Alors que mon but n’a jamais été celui-là, mais de partager les travaux que j’ai réalisé MOI. Je précise que ma micro-entreprise porte le même nom que moi vu que je suis auto-entrepreneur. Je lui ai juste dit que là n’était pas mon but, que je comprends mais qu’il y avait tout de même une notion de propriété intellectuelle à ne pas oublier. Il m’a répété plusieurs fois, agacé, que les productions que je fais dans le cadre de mon activité salariée ne m’appartiennent pas, il a même tourner cela en ridicule en disant "votre collègue il fait un compte-rendu ce compte rendu lui appartient alors ?". Je lui ai précisé que dans mon contrat aucune clause ne régit cette cession de droit il a dit que "justement lorsqu’il n’y a aucune clause, par défaut l’entreprise en est propriétaire, pas vous, cela ne vous appartient pas madame !". Sous pression, j’ai dis que je supprimerai les publications ce à quoi il m’a répondu "Oh mais j’espère bien Madame !". Je me suis exécutée par peur des conséquences mais je lui ai tout de même envoyé par mail un lien d’information sur les droits d’auteur dans le cadre d’une activité salariée. Il m’a répondu par écrit que ce lien ne contredit pas son analyse et que je ne dois pas publier sur ma page professionnelle les créations que j’ai faites dans le cadre de mon activité salariée, que cela est constitutif d’une faute professionnelle et que cela remet en cause la confiance qui m’avait été accordé à son arrivée.
En plus de ce dernier fait parmi bien d’autres, j’ai enchainé encore 10 jours consécutifs de travail avant cette dernière humiliation en réunion qui m’a fait consulté un médecin qui a pris la décision de m’arrêter.
La faute professionnelle est-elle justifiée ?