Qu’ils soient sous maîtrise d’ouvrage privée ou publique, les réseaux de chaleur et de froid sont des outils de performance énergétique avérés. Dans un rapport publié en février 2015, le Programme des Nations Unies pour l’Environnement les mentionne parmi les leviers principaux pour engager une transition écologique à l’échelle des villes. Dans l’Hexagone, la Loi LTE tend, d’ici 2030, à multiplier par cinq la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux.
Afin de faciliter l’atteinte de cet objectif, aujourd’hui codifié à l’article L.100-4 du Code de l’Energie, l’accès à certaines mesures d’accompagnement des collectivités, antérieures à la LTE, a été facilité et/ou développé. Il en est ainsi de la procédure de classement des réseaux, outil de planification énergétique du territoire et de développement des énergies renouvelables, créée par la loi du 15 juillet 1980 relative aux économies d’énergie et à l’utilisation de la chaleur, révisée par la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996.
Cette procédure induit, selon les modalités et conditions exposées ci-après, une obligation de raccordement dans des zones définies ou des périmètres de développement jugés prioritaires de toute installation d’un bâtiment neuf ou faisant l’objet de travaux de rénovation importants excédant un niveau de puissance de 30 kilowatts. Il peut s’agir d’installations industrielles ou d’installations de chauffage de locaux, de climatisation ou de production d’eau chaude sanitaire.
Cette obligation de raccordement a pour effet de faciliter le développement et la densification du réseau ce qui est de nature à rassurer à la fois les collectivités dans le processus décisionnel de mise en place d’un réseau de chaleur et les gestionnaires de réseaux qui sécurisent alors leurs investissements liés aux travaux de création ou de réhabilitation desdits réseaux. En effet, la création ou la modernisation d’un réseau de chaleur est très capitalistique et son classement permettra de maintenir l’équilibre financier de l’exploitation puisque un nombre ciblé d’utilisateurs sera garanti.
Pour autant, cette procédure était peu usitée, en raison notamment de sa complexité. Seul le réseau de Fresnes Sud (94) a été classé en 2006.
Convaincu de son intérêt et conscient du rôle du classement du réseau dans l’atteinte des objectifs en matière d’énergie renouvelable, le législateur est venu :
simplifier la procédure par la loi « Grenelle 2 » [1] qui a supprimé le recours à l’enquête publique jusqu’alors obligatoire et a remplacé la compétence du préfet en la matière en soumettant la décision de classement à la collectivité compétente après avis de la commission consultative des services publics locaux prévue à l’article L.1413-1 du code général des collectivités territoriales ;
obliger toute collectivité réalisant son Schéma Directeur Energie à évaluer la possibilité et l’intérêt de procéder au classement de son réseau.
S’agissant des prérequis nécessaires au classement d’un réseau existant ou à créer, celui-ci n’est envisageable que si le réseau répond aux conditions cumulatives prévues à l’article L.712-1 du Code de l’Energie, à savoir :
D’une part, le réseau doit être alimenté à plus de 50 % par une énergie renouvelable ou de récupération (biomasse, géothermie, déchets et énergies de récupération). Cette obligation date de 1999, auparavant une utilisation rationnelle des énergies suffisait au classement. Ce seuil est apprécié de manière globale en considérant l’énergie injectée dans le réseau. Hors circonstances particulières, est prise en compte comme période de référence soit l’année civile précédant celle de la décision de classement, soit une période de douze mois consécutifs sur lesquels la gestionnaire a établi son rapport d’exploitation. Pour les réseaux à créer, le seuil est évalué selon des valeurs attendues avec possibilité de déclassement du réseau s’il n’atteint pas les 50% en moyenne sur trois années consécutives.
D’autre part, le comptage des quantités d’énergie livrées doit être réalisé par point de livraison. La loi Grenelle 2 ayant rendu obligatoire ce type de comptage depuis 2015, il ne devrait plus faire obstacle au classement.
Enfin, l’équilibre financier de l’opération pendant la période d’amortissement des installations doit être assuré au vu des besoins à satisfaire, de la pérennité de la ressource en énergie renouvelable ou de récupération, et compte tenu des conditions tarifaires prévisibles.
Une fois le réseau classé, les obligés ne peuvent déroger à l’obligation de raccordement que s’ils démontrent qu’il ne leur est pas bénéfique, sur un plan technique ou économique, sur la base de critères limitativement définis par la collectivité.
Certes, le système de classement a gagné en attractivité puisque depuis 2014 cinq réseaux ont été classés. Toutefois, eu égard à l’intérêt de la procédure et du positionnement des réseaux de chaleur en tant que solution en faveur de la transition écologique, on ne peut qu’inviter les collectivités et les gestionnaires à entreprendre les démarches nécessaires au classement. Rappelons qu’afin de les accompagner dans ce processus, le Ministère de l’Ecologie a publié, en janvier 2013, son « Guide pratique de la procédure de classement des réseaux de chaleur et de froid ».