La question est alors de savoir quelles sont les garanties que peut offrir cette entreprise. À part consigner les fonds, qui ne sont pas là en général, sinon elle aurait déjà payé, elle va pouvoir proposer d’autres garanties comme notamment la caution personnelle du dirigeant ; cette garantie, de mon point de vue, est dangereuse et je conseille le plus souvent de l’éviter, sauf si on est sûr que la société pourra honorer la dette ; dans ce cas, pas de problème, mais uniquement si l’on est certain que ce sera vraiment facile.
Autrement, l’Administration peut se voir offrir ce qu’on appelle le nantissement du fonds de commerce. C’est à dire qu’on informe l’Administration que si demain on vendait le fonds, le prix de vente du fonds serait gelé au profit de l’administration. En lui offrant cette garantie, c’est un peu comme si on lui disait : "si je ne paye pas, tu as le droit de vendre le fonds". Il faut savoir que l’Administration est très, très réticente à accepter cette garantie à l’égard de sociétés qui ne sont pas cotées ; elle a beaucoup de difficultés à admettre qu’un fonds de commerce ait une valeur. Pourquoi ? Parce qu’en fait l’administration ne sait pas vendre un fonds de commerce judiciairement, elle n’est pas équipée pour cela ; elle ne le fait pas et ce n’est pas du tout dans son ADN. Il est vrai que c’est une démarche un peu compliquée, et comme elle ne le fait pas, elle va refuser cette garantie.
Si l’administration refuse cette garantie vous avez la faculté bien évidemment de saisir le juge administratif en référé pour demander au juge par voie d’ordonnance d’accepter cette garantie ; c’est très rapidement jugé dans un délai d’un mois.
J’attire votre attention sur le fait que récemment j’ai eu quelques dossiers où le juge en référé a refusé d’accepter la garantie alors même que l’entreprise avait produit beaucoup d’éléments. Je voudrais vraiment mettre l’accent sur ce point-là. Si on vous refuse la garantie et que vous êtes conduit à saisir le juge, il faut bien documenter. C’est-à-dire qu’il faut dès le départ ne pas hésiter à fournir le maximum d’éléments pour démontrer que votre fonds a une valeur.
De quels éléments s’agit-il ? Il faut être en capacité de présenter au juge, en première instance et le cas échéant en appel, les bilans, l’attestation d’assurance et éventuellement une estimation par un ou deux professionnels qui auront calculé la valeur du fonds. Il faut savoir que quand on saisit le juge en référé en première instance, l’affaire n’est même pas audiencée. Vous n’avez pas le droit à la parole, c’est un dossier écrit. Il est donc très important de particulièrement bien étayer ce dossier parce que les rejets de la part du juge en référé sont extrêmement fréquents, même quand on dispose de garanties ayant une valeur.
Vous avez un fonds de commerce que vous avez créé de toutes pièces, il a une valeur parce que vous faites un chiffre d’affaires important, que vous avez un positionnement, un lieu physique si vous êtes en magasin en ville, et enfin une valeur rien que par l’existence du droit au bail. Il est donc essentiel de faire accepter cette garantie et pour donner envie aux juges de l’accepter il faut un dossier convaincant. Parce que l’effet pour vous, si l’administration vous refuse cette garantie, est qu’elle peut faire ensuite ce qu’elle veut : vous saisir à titre conservatoire ou vous geler à titre conservatoire et presque tuer votre entreprise à titre conservatoire. Veillez donc à bien documenter lorsque vous fournissez un nantissement de fonds de commerce comme garantie.