Le code de justice administrative prévoit la procédure de référé-suspension aux termes de son article L. 521-1 qui dispose que :
« Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état d’un moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ».
L’on sait qu’en droit de l’urbanisme, le référé-suspension nourrit une importante jurisprudence, notamment en ce qui concerne la condition de l’urgence à statuer.
A titre d’exemple, un référé-suspension dirigé contre un permis de construire bénéficie d’une présomption d’urgence, dans la mesure où la réalisation d’un bâtiment a des effets difficilement réversibles [2].
L’article 80 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique est venu conforter cet état du droit en complétant l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme qui indique désormais que « la condition d’urgence prévue à l’article L. 521-1 du code de justice administrative est présumée satisfaite » à l’occasion d’un recours dirigé contre une décision de non-opposition à déclaration préalable ou contre un permis de construire, d’aménager ou de démolir.
Cette présomption d’urgence n’est pas irréfragable et peut être renversée lorsque l’intérêt général du projet le justifie [3].
La décision rendue le 25 mars 2020 par le Conseil d’Etat porte sur la condition d’urgence dans le cas d’un référé-suspension dirigé contre une décision de sursis à statuer prise par le Maire en application des articles L. 153-11 et L. 424-1 du code de l’urbanisme.
Le tribunal administratif avait considéré comme remplie la condition d’urgence au motif que le pétitionnaire avait exposé d’importantes sommes d’argent pour la réalisation de son projet.
Le Conseil d’Etat annule cette ordonnance en estimant que le juge des référés du tribunal administratif a commis une erreur de droit.
Selon lui, le pétitionnaire se borne seulement à invoquer « les importantes sommes d’argent qu’il a exposées, de son propre chef, pour la réalisation de son projet, dont le recours à un emprunt avec un échéancier calculé en fonction de la revente d’une partie de la parcelle acquise, après sa division ».
Or, le Conseil d’Etat relève :
D’une part, que cet emprunt a été contracté plusieurs mois avant le dépôt de la déclaration préalable de division ;
D’autre part, qu’il existe un intérêt public qui s’attache à l’exécution du futur plan local d’urbanisme, notamment en matière d’implantation des constructions.
Pour toutes ces raisons, la condition d’urgence n’est pas retenue par le Conseil d’Etat.
Il semble donc que la seule solution pour répondre à la condition d’urgence posée par le code de justice administrative soit de démontrer que des circonstances particulières s’attachent à la réalisation du projet, notamment en ayant recours à la notion d’intérêt général.