Se doit-il de privilégier les rapports entre les personnes en assimilant « l’homme » [1] à un être social ?
Et puisque toutes les relations sont basées sur l’affect, doit-il prendre en considération le fait que ces relations se manifestent à la fois dans des comportements et dans des mécanismes cognitifs tels que les préjugés et stéréotypes que nous produisons au cours de nos échanges [2] .
Le DRH est-il un psychologue social ?
Ou bien au contraire, se doit-il d’exercer ses fonctions de gestion des hommes et de leurs ressources aux seules fin de l’intérêt de l’entreprise pour laquelle il officie, sans prendre en considération un domaine qu’en tout état de cause, peu de DRH connaissent ?
J’ai souvenance d’une algarade en 2006 avec madame Geneviève IACONO, alors Maître de conférences en RH à Lyon 2 et pour qui un Directeur des Ressources Humaines se devait de trouver toutes solutions aux fins de régler les conflits. Quitte à s’abstenir des directives de ses employeurs...
Vision pour le moins humaniste mais ô combien peu réaliste de la fonction ! J’avais à l’époque cité Emannuel KANT, « Cela peut être bon en théorie, mais ne vaut rien en pratique » en rajoutant que le monde des bisounours est à cent lieux des préoccupations des actionnaires !
Hors l’ire de mon interlocutrice, ses convictions m’avaient (dois-je l’avouer ?) quelque peu ébranlé !
Pour autant, son discours était alors aux antipodes de mes convictions, puisque je soutenais que le DRH, salarié comme les autres, se devait d’obéir aux directives de son employeur, et qu’en tout état de cause, il ne relevait pas de ses fonctions de jouer le médiateur, rôle qu’endossent à merveille les tiers à un conflit grâce à ce nouveau mode de régulation sociale.
L’occasion de la lecture d’un article de Jacques ZIOUZIOU me permets donc de revenir sur cette question.
Pour Jacques ZIOUZIOU [3], « la qualité relationnelle dans les organisations est un préalable essentiel à leur efficacité et au bon fonctionnement des rapports humains au travail » [4] et « gérer les ressources humaines est un vocabulaire d’actionnaires... (sic) » [5].
Cette appréhension des Ressources Humaines s’oppose à celle du Professeur François GEUZE [6], qui ne manque pas de rétorquer vertement que cette vision « relationnelle » indique une « parfaite méconnaissance du métier RH » exposant que la fonction de DRH est une fonction de négociateur et non de médiateur [7].
Alors le DRH se doit-il d’être négociateur ou bien médiateur ?
Rappelons qu’en négociation, chaque partie représente ses intérêts et les représentants des parties sont là pour défendre les intérêts de leur(s) mandataire(s).
Tandis que dans le cadre de la médiation, chacune des parties est affirmée sur ses positions et représente ses intérêts et le médiateur (très souvent un tiers aux parties) n’est qu’est un régulateur relationnel qui permet aux parties de clarifier leurs positions et d’éventuellement les transformer pour considérer de manière différente la conception de leurs intérêts.
En négociation, il s’agit d’approches possibles centrées sur des intérêts, en médiation, il s’agit d’un processus centré sur des positions.
En clair, la négociation est évidente lors des choix « politiques » de l’entreprise (nouvelles actions commerciales entraînant de lourds investissements par exemple).
Quand à la médiation, elle n’intervient que lors de la survenance de tensions dans l’entreprise (suite à une annonce de délocalisation par exemple).
Le DRH est-il dans son rôle s’il prône, au détriment de la négociation, la médiation ?
En réalité la médiation n’est qu’un processus de la négociation [8] . Cette médiation est souvent effectuée par un tiers (c’est la seule condition de son acceptation par les parties) qui n’a aucun pouvoir de décision et dont la seule finalité est de rechercher à résoudre un conflit en proposant des solutions. [9]
La médiation n’est donc pas du ressort du DRH.
D’ailleurs serait-il accepté en cette qualité par les syndicats ?
Évidemment non !
Chargé d’une mission par la Direction qui l’emploie, son travail ne consiste qu’à négocier.
A-t-on jamais vu un DRH, lors d’une crise grave, revêtir les habits d’un médiateur ?
Le médiateur n’est ni conseil, ni juge !
Il intervient indépendamment des principes du droit, laissant aux parties le soin de s’informer sur l’état du droit. Il doit laisser au DRH (si tant est que ce dernier ait des connaissances en la matière...) le soin d’envisager les aspects juridiques éventuels qui peuvent encadrer les accords futurs entre les parties.
Pour faire simple, entre la Direction et les syndicats.
A chacun son métier. Le DRH ne sera jamais un médiateur, le médiateur ne sera jamais DRH [10] !
A défaut, la fonction RH se trouverai décrédibilisée et les entreprises ne pourraient avoir confiance en leur DRH.
Ne reste qu’à instaurer un Code de déontologie du DRH lui imposant droits et devoirs et qui régira ses fonctions en vue d’une certaine éthique que d’aucuns, atteint de bariolage intellectuel, ne perçoivent pas aujourd’hui.