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L’absence d’avocat lors du déféré devant le Parquet entraîne la nullité de l’acte de saisine du Tribunal. Par Arnaud Adelise, Avocat.
Parution : mercredi 25 juin 2014
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La nouvelle loi de procédure pénale en vigueur depuis le 2 juin 2014 offre à la défense de nouveaux moyens de nullités. En témoigne celle obtenu le 17 juin dernier, en comparution immédiate, devant le TGI de Créteil sur le fondement de l’article 393 du Code de procédure pénale.

L’article 393 (version du 2 juin 2014) impose la présence de l’avocat aux côtés du prévenu lors du déféré devant le Parquet. Durant cette procédure, le prévenu peut être assisté d’un avocat qui aura (théoriquement) accès au dossier. L’avocat pourra faire des observations "notamment sur la régularité de la procédure, sur la qualification retenue, sur le caractère éventuellement insuffisant de l’enquête et sur la nécessité de procéder à de nouveaux actes". Ce n’est qu’à l’issue de ces observations que le parquetier choisira d’orienter en CI / CRPC / ouverture d’info.

Concrètement, un PV pré-rempli est à disposition du parquet qui y inscrit le nom de l’avocat et ses observations ainsi que le celles du prévenu. Deux cases sont à cocher (accès au dossier / demande d’interprète).

En l’espèce, le prévenu, Monsieur B. avait demandé l’intervention d’un avocat choisi et à défaut, l’avocat de permanence. A Creteil, il n’existe pas encore de protocole liant le Parquet et le Barreau sur la forme que doit revêtir l’avis au Bâtonnier. Le Parquet a décidé unilatéralement que l’envoi d’un fax, en début de matinée avec le nom de tous les prévenus sans avocats suffisait.

Mais dans notre cas, Monsieur B. n’apparaissait pas sur cette liste.

Le prévenu a été déféré au Parquet vers 15h30 en l’absence de son conseil.

Par la suite, Monsieur B est présenté devant la juridiction de CI vers 17h30 -18h et ce, sans avocat. Etant de permanence, le dossier me revient et j’interroge immédiatement le parquet sur l’absence de notification à l’Ordre concernant le déféré. Vérification du dossier opéré avec le parquetier et nous constatons que si un avis a bien été adressé à l’avocat choisi, rien n’a été adressé à l’Ordre.

Je rédige immédiatement des conclusions de nullité sur le fondement de l’article 393 du CPP au motif que le prévenu avait sollicité conjointement et à défaut de son conseil la présence de l’Avocat de permanence et que ce dernier n’avait pas été prévenu pour assister à la notification.

Le débat sur la nullité est assez houleux. Le parquetier sollicitant même une suspension après que j’eus plaidé et avant de répondre. Suspension qui a duré plus d’une heure durant laquelle il est allé voir sa hiérarchie pour prendre des instructions sur ce point.

Le Tribunal a fait droit à ma nullité considérant que l’absence d’avocat lors de la notification faisait grief au prévenu.

Le procès verbal du déféré a été annulé ainsi que l’acte saisissant la juridiction.

Victoire pour la défense.

PS : Le Ministère Public a immédiatement fait appel, la Cour d’appel de Paris sera amenée à se prononcer dans les prochaines semaines.

Décision du Tribunal correctionnel de Créteil, 17 juin 2014
Me Arnaud ADELISE Avocat au Barreau du Val de Marne