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La protection des slogans. Par Marie-Cécile Roussel, CPI.
Parution : vendredi 15 mars 2013
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Votre société souhaite protéger à titre de marque un slogan qu’elle a créé ou sa « baseline » (slogan qui ponctue une annonce publicitaire) ? Voici ce qu’il vous faut savoir.

Un slogan peut, par principe, être enregistré à titre de marque au regard de l’article L. 711-1 du Code de la propriété intellectuelle qui dispose que peuvent constituer une marque les « assemblages de mots ».

Toutefois, et à l’instar de tout autre signe protégeable à titre de marque, le slogan doit être distinctif.

La jurisprudence communautaire a précisé la question de la protection des slogans dans de nombreuses décisions récentes, dont voici les principaux apports :

Si le slogan donne "une information exclusivement promotionnelle", il ne peut pas être protégé à titre de marque. Il doit donc d’emblée être perçu comme une indication d’origine commerciale par le public pertinent pour pouvoir être enregistré (Tribunal de l’Union Européenne, Décision REAL PEOPLE REAL SOLUTIONS, 2002).

La Cour de Justice de l’Union Européenne précise ensuite que :

"Pour autant que de telles marques ne sont pas descriptives (…), elles peuvent exprimer un message objectif, même simple, et être néanmoins aptes à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits ou des services en cause. Tel peut notamment être le cas lorsque ces marques ne se réduisent pas à un message publicitaire ordinaire, mais possèdent une certaine originalité ou prégnance, nécessitent un minimum d’effort d’interprétation ou déclenchent un processus cognitif auprès du public concerné" (Cour de Justice de l’Union Européenne, Arrêt AUDI 2010).

"Pour autant que le public concerné perçoit la marque en cause comme une indication de (l’) origine commerciale, le fait qu’elle soit simultanément, voire même en premier lieu, appréhendée comme une formule promotionnelle est sans incidence sur son caractère distinctif" ((Cour de Justice de l’Union Européenne, Arrêt BEST BUY, 2011). Le slogan peut donc être enregistré à titre de marque dans ce cas.

Si la combinaison des mots du slogan est correcte d’un point de vue grammatical et véhicule un message clair sur les produits et les services visés, le slogan ne sera pas considéré comme distinctif et sera donc refusé à titre de marque. Le Tribunal de l’Union Européenne requiert "un écart perceptible par rapport à la terminologie employée dans le langage courant" (Tribunal de l’Union Européenne, Décisions RUN THE GLOBE et PASSION FOR BETTER FOOD, 2011).

Pour conclure, voici quelques exemples de slogans qui ont été acceptés ou refusés à l’enregistrement par les instances communautaires :

Acceptés :
Naturally active (classe 18)
Vorsprung durch technik (traduction : Le progrès par la technologie - classes 9, 12, 14, 25, 28, 37, 38, 39, 40, 42)
Das Prinzip der Bequemlichtkeit (traduction : Le principe du confort - classes 8, 12, 20)

Refusés :
Naturally active (classe 3, 5, 16, 35, 44)
Light and space (classe 2)
Live richly (classe 36)
Real people, real solutions (classes 35, 37, 42)
Dream it, Do it (classes 35, 36, 41, 45)

Le juge français a été moins strict que les instances communautaires jusqu’en 2008.

Depuis, il tend à s’aligner sur les décisions de ces instances.

Marie-Cécile ROUSSEL