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Salariés, cadres : prescription de 5 à 3 ans aux prud’hommes, le changement, c’est maintenant ! Par Frédéric Chhum Avocat et Camille Colombo, Elève-Avocat.
Parution : vendredi 22 mars 2013
Adresse de l'article original :
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L’Accord National Interprofessionnel (ANI), conclu entre les partenaires sociaux le 11 janvier 2013, prévoit une réduction du délai de prescription de cinq à trois ans, pour les demandes, par les salariés, de rappel de salaires devant le Conseil de prud’hommes.

Nicolas Sarkozy en a rêvé. François Hollande l’a fait !

L’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013 va bouleverser le monde du travail et les droits sociaux des salariés dans les mois à venir.

Cet ANI, s’il prévoit des avancées majeures pour les droits des salariés (accès pour tous à une mutuelle d’entreprise, taxation des CDD courts), prévoit également une mesure extrêmement défavorable aux salariés, à savoir la réduction du délai de prescription en cas de contentieux.

Actuellement, ce délai de prescription est fixé, depuis la loi du 25 mars 1804, à cinq ans : par conséquent, un salarié peut intenter une action contre son actuel/ancien employeur pour des faits ayant eu lieu jusqu’à cinq ans auparavant et peut réclamer, devant la juridiction prud’homale, des rappels de salaires jusqu’à cinq ans en arrière.

Malheureusement, l’ANI prévoit une réduction de ce délai de cinq ans, puisqu’il déclare qu’ « aucune action ayant pour objet une réclamation portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail ne peut être engagée devant la juridiction compétente au-delà d’un délai de 24 mois », et que « les demandes de salaires se prescrivent par 36 mois si elles sont formées en cours d’exécution de contrat ».

Si la demande est formée dans le délai de 24 mois suivant la rupture du contrat, la période de 36 mois susvisée s’entend à compter de la rupture du contrat.
Cette mesure est une très mauvaise nouvelle pour les salariés, notamment pour les salariés précaires qui demandent la requalification de leurs CDD en CDI, un rappel de primes ou d’heures supplémentaires.

En effet, le délai de prescription de cinq ans permettait à ces salariés d’obtenir des rappels de salaires conséquents, qui seront désormais amoindris, puisque limités à trois années.

Cette disposition fait « tâche », dans cet ANI, que Laurent Berger, nouveau dirigeant de la CFDT, décrit comme « ambitieux pour les salariés », en ce qu’il leur « apporte des droits nouveaux », et que certains qualifient même d’ « historique »…

Elle paraît d’autant plus incongrue que l’ANI prévoit des mesures visant à lutter contre le recours abusif aux CDD et au temps partiel.

Le 6 mars dernier, le projet de loi sur la sécurisation de l’emploi, transposant l’ANI du 11 janvier 2013, a été adopté en Conseil des ministres.

Bien que son application nécessite l’adoption par le Parlement de ce projet de loi, qui sera déposé par le Gouvernement en avril 2013, l’ANI fait déjà office de « lettre d’engagement ».

Cependant, avant de voter cette loi, les parlementaires devraient se demander en quoi cette mesure constitue une avancée pour les salariés et aide à préserver l’emploi.

Les salariés ont donc tout intérêt à saisir le Conseil de prud’hommes avant la promulgation de cette loi, en juin prochain.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum
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