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Taux effectif global (TEG) : nouvelle jurisprudence. Par Yann Gré, Avocat.
Parution : mardi 3 septembre 2013
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Pour la première Chambre de la Cour de cassation, le calcul du taux effectif global (TEG) d’un prêt sur 360 jours entraîne la déchéance du droit aux intérêts de la banque, lorsque ce prêt est consenti à un consommateur ou à un non-professionnel.

La décision rendue le 19 juin 2013 par la première Chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n° 12-16.651) est particulièrement importante.

Elle va avoir pour effet de mettre un terme à un pratique ancienne des banques.

Ces dernières ont, le plus souvent, pris l’habitude de calculer les intérêts d’un prêt sur la base d’une année comptable fictive de 360 jours et non sur une année réelle de 365 ou 366 jours, ce qui a pour effet de fausser légèrement le coût réel du prêt.

Par sa décision, la Cour de cassation indique, dans des termes de principe que «  le taux de l’intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l’acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l’intérêt légal, être calculé sur la base de l’année civile  ».

Ceci signifie que la déchéance du droit aux intérêts de la banque devra être systématiquement prononcée lorsque l’étude de l’offre de prêt fera apparaître que le taux a été calculé sur 360 jours, aussi bien pour un prêt immobilier que pour un crédit à la consommation.

Le taux légal (0,04 % actuellement) sera alors substitué au taux contractuel.

Pour un prêt de plusieurs centaines de milliers d’euros, l’application du taux légal au lieu du taux contractuel pourrait représenter une économie très importante pour l’emprunteur, mais également une très lourde perte pour la banque, dont l’intérêt serait alors de transiger avec son client, en lui proposant, par exemple, de renégocier son contrat.

De très nombreux prêts sont, vraisemblablement, concernés par cette décision, dont la portée semble particulièrement importable, d’autant que la notion de « non-professionnel » semble nettement plus large que celle de « consommateur ».

Le texte de cet arrêt est le suivant :

« Vu l’article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation ;
Attendu qu’en application combinée de ces textes, le taux de l’intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l’acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global, sous peine de se voir substituer l’intérêt légal, être calculé sur la base de l’année civile ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’en vertu d’une offre de prêt acceptée le 15 février 2005, M. X... a contracté auprès d’une banque un « prêt relais habitat révisable » d’une durée de vingt-quatre mois, remboursable en une seule échéance différée, moyennant un taux effectif global et un taux de période variable « donnés à titre indicatif en fonction de l’indice Moy. arithm./15 j. Euribor douze mois », les conditions générales du prêt précisant que « le calcul des intérêts dus est effectué sur la base d’une année de trois cent soixante jours (soit douze mois de trente jours) » ; qu’en raison de la défaillance de l’emprunteur, la société Compagnie européenne de garanties et de cautions (la société CEGC), qui s’était portée caution solidaire de ce prêt, a désintéressé la banque puis exercé une action subrogatoire contre le débiteur principal, lequel a opposé à la caution subrogée la nullité de la stipulation de l’intérêt nominal, calculé d’après l’année dite « lombarde » de trois cent soixante jours ;
Attendu que, pour rejeter cette exception et condamner M. X... à payer à la société CEGC la somme de 312 239,72 euros, l’arrêt retient que si le taux effectif global doit être calculé sur la base d’une année civile, rien n’interdit aux parties à un prêt de convenir d’un taux d’intérêt conventionnel conclu sur une autre base, que l’acte de prêt du 15 février 2005 stipulant expressément que les intérêts conventionnels seront calculés sur la base d’une année de trois cent soixante jours, c’est de manière inopérante que M. X... oppose à la caution, subrogée dans les droits de la banque créancière, la nullité de cette stipulation, s’agissant de modalités qui, librement convenues entre les parties, ne peuvent être remises en cause ;
Qu’en statuant ainsi quand le prêt litigieux, visant expressément les articles L. 312-1 à L. 312-6 du code de la consommation, obéissait au régime du crédit immobilier consenti à un consommateur ou un non-professionnel, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 8 décembre 2011, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ; »

Avocat au Barreau du Val de Marne (94) site : http://www.yanngre.com blog : http://yanngre.blogspot.fr
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