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Prise d’acte de la rupture et indemnisation chômage. Par Houria Kaddour, Avocat.
Parution : samedi 18 octobre 2014
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Une circulaire de l’UNEDIC en date du 30 septembre 2014, visant à expliquer la nouvelle convention chômage du 14 mai 2014, apporte des précisions sur l’indemnisation chômage du salarié qui a pris acte de la rupture du contrat de travail.

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail est un mode de rupture à l’initiative du salarié qui n’est ni une démission, ni un licenciement, mais qui emprunte les effets de l’un ou l’autre.

Lorsqu’un salarié reproche à son employeur des manquements au contrat de travail, il peut être amené à prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur et demander au Conseil de prud’hommes que cette rupture produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (prise d’acte : rappel et actualités).

Dans l’attente d’un jugement du conseil de prud’hommes, le salarié est dans un premier temps considéré comme démissionnaire.

Il ne perçoit aucune indemnité de licenciement, ni de préavis.

Vis-à-vis de l’assurance chômage, le Pôle Emploi prend en considération les manquements de l’employeur qui ont provoqué la prise d’acte.

1. La prise d’acte n’est pas considérée comme une privation involontaire d’emploi

La circulaire UNEDIC du 30 septembre 2014 confirme que la prise d’acte ne constitue pas une privation involontaire d’emploi.

En principe, le salarié qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail ne perçoit aucune allocation chômage.

Il ne pourra éventuellement prétendre à une indemnisation qu’après le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes qualifiant la rupture (effets d’un licenciement ou au contraire d’une démission).

Si auparavant, les délais de procédure pouvaient retarder considérablement la prise en charge du salarié, la loi n° 2014-743 du 1er juillet 2014, qui a officiellement reconnu la prise d’acte comme un mode de rupture du contrat de travail, permet d’espérer un traitement du contentieux plus rapide.

Le nouvel article L 1451-1 du Code du travail permet au salarié de bénéficier de la procédure accélérée qui jusque-là n’était ouverte qu’aux requalifications des CDD et des contrats d’intérim.

Ainsi, le salarié qui prend acte de la rupture de son contrat peut espérer obtenir une date d’audience en bureau de jugement dans un délai d’un mois.

2. La prise d’acte peut dans certains cas être traitée comme une démission légitime

La circulaire UNEDIC poursuit en précisant qu’une prise en charge par l’assurance chômage peut être envisagée lorsque les faits invoqués par le salariés lors de sa prise d’acte correspondent à ceux qui pourraient motiver une démission légitime au sens de l’accord d’application n° 14 du 14 mai 2014.

Cet accord considère comme légitimes les démissions intervenues dans les situations suivantes :

– Lorsque le salarié démissionne en raison du non-paiement de ses salaires :

A condition que ce dernier justifie d’une ordonnance de référé lui allouant une provision de sommes correspondant à des rappels de salaire. Appliquée à la prise d’acte de la rupture, cette condition peut s’avérer compliquée.

En pratique, le salarié qui se retrouve contraint de prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison du non-paiement de son salaire ou accessoire, doit-il envisager de saisir le conseil de prud’hommes en la formation des référés (pour obtenir la condamnation de son employeur) et le bureau de jugement (pour apprécier les manquements de son employeur) ?

Depuis la réforme de la procédure prud’homale en matière de prise d’acte, il peut sembler inutile de multiplier les saisines.

Le salarié peut considérer comme inutile de saisir la section des référés alors qu’il peut espérer une audience en bureau de jugement dans un délai d’un mois.

Cependant, en pratique, si le conseil de prud’hommes doit garantir la tenue d’une audience dans un délai d’un mois, il peut arriver que la procédure fasse l’objet d’un renvoi.

En cas de report d’audience, les délais habituels d’audiencement s’appliqueront à nouveau.

A Lyon, par exemple, les délais de renvoi peuvent être très longs (environ 12 mois en moyenne).

Dans ces conditions, il est plus que recommandé de saisir la section des référés en même temps que le bureau de jugement.

– Lorsque le salarié est victime d’un acte susceptible d’être délictueux à l’occasion de son contrat de travail. A condition de justifier d’un dépôt de plainte auprès du procureur de la République.

3. Possibilité d’une reprise de droits

En cas de prise d’acte considérée comme une démission, une ouverture de droit aux allocations peut être accordée lorsque le chômage du salarié se prolonge contre sa volonté.

Pour bénéficier d’un réexamen de sa situation, le salarié doit réunir les conditions suivantes :

La notification de rejet de prise en charge doit dater depuis au moins 121 jours ou lorsque sa demande de rechargement des droits, le salarié doit avoir épuisé ses droits depuis au moins 121 jours ;

Le salarié doit remplir toutes les conditions auxquelles le règlement général subordonne l’ouverture d’une période d’indemnisation ;
Le demandeur d’emploi doit enfin apporter des éléments attestant de ses recherches d’emploi

Le point de départ du versement des allocations ou de la reprise des droits ainsi accordées est fixé au 122e jour suivant :

la fin de contrat de travail au titre de laquelle les allocations ont été refusées ;
la date d’épuisement des droits lorsqu’il s’agit d’une demande de rechargement

L’examen de cette situation est effectué à la demande du salarié par l’Instance Paritaire Régionale en vue d’une prise en charge au titre de l’allocation de retour à l’emploi.

Sources : CIRCULAIRE N° 2014-26 DU 30 SEPTEMBRE 2014 ; Accords d’application

Houria KADDOUR, Avocat cabinet@avocatlyonkaddour.fr http://avocatlyonkaddour.fr
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