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Obligation de non-concurrence : la dispense doit intervenir au plus tard au dernier jour de travail effectif du salarié, à défaut la contrepartie financière est due. Par Dany Marignale, Avocat.
Parution : lundi 2 février 2015
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«  Attendu qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence, la date d’exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l’entreprise ; qu’il en résulte que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ».
(Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 21 Janvier 2015, 13-24.471, Publié au bulletin)

La clause de non-concurrence constitue une atteinte à la liberté de travailler. De ce fait, la jurisprudence a posé des conditions et limites à sa validité qui sont désormais bien connues : elle doit être limitée dans le temps, limitée dans l’espace et prévoir une contrepartie financière versée au salarié, à défaut cette clause est nulle.

L’employeur dispose par ailleurs de la faculté de dispenser le salarié du respect de cette clause, lorsqu’il prévoit cette faculté dans le contrat. Il doit dans cette hypothèse organiser dans la clause les conditions dans lesquelles cette dispense peut intervenir. Si l’employeur se décide à dispenser son salarié de son obligation de non concurrence, il n’est naturellement plus tenu de lui verser la contrepartie.

La Cour de cassation est venue faire une nouvelle précision s’agissant de la date jusque laquelle l’employeur peut encore user de la faculté de dispenser le salarié de son obligation de non concurrence.

Dans cette affaire un directeur régional avait signé un avenant à son contrat de travail prévoyant une clause de non-concurrence. Cet avenant prévoyait également les conditions dans lesquelles l’employeur pouvait l’en dispenser, soit à tout moment au cours de l’exécution du contrat, soit à l’occasion de sa cessation, sous réserve de notifier sa décision par lettre recommandée, au plus tard un mois suivant la notification de la rupture du contrat de travail.

Le salarié a été licencié le 24 avril 2008 et a été dispensé d’effectuer son préavis. L’employeur l’a libéré de son obligation de non-concurrence le 14 mai suivant.

Dans le cadre du contentieux prud’homal, le salarié soutenait que la dispense de non-concurrence de l’employeur était intervenue tardivement et sollicitait le paiement de la contrepartie prévue au contrat.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence amenée à se prononcer sur ce dossier a débouté le salarié de sa demande en paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence. Elle a jugé que le délai contractuel ayant été respecté pour la dispense, celle-ci n’était pas tardive et conforme aux dispositions contractuelles.

Par un attendu de principe rendu au visa de l’article 1134 du Code civil la Cour de cassation a jugé : « Attendu qu’en cas de rupture du contrat de travail avec dispense d’exécution du préavis par le salarié, la date à partir de laquelle celui-ci est tenu de respecter l’obligation de non-concurrence, la date d’exigibilité de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et la date à compter de laquelle doit être déterminée la période de référence pour le calcul de cette indemnité sont celles du départ effectif de l’entreprise ; qu’il en résulte que l’employeur qui dispense le salarié de l’exécution de son préavis doit, s’il entend renoncer à l’exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ».

Pour la Cour de cassation, puisque l’obligation de respecter la clause de non-concurrence et l’obligation d’en verser la contrepartie naissent au moment du départ effectif du salarié, celui-ci doit être fixé dès cette date sur le point de savoir si la clause s’appliquera. Les dispositions contraires à ce principe qui pourraient être prévues dans la clause ne produisent aucun effet.

Il convient dès lors pour les employeurs d’être particulièrement vigilants, notamment dans l’hypothèse d’une dispense du préavis, puisque même en cas de dispositions contractuelles contraires, c’est au dernier jour de travail effectif que le salarié doit être fixé sur l’application ou non de la clause de non-concurrence.

D’autant que la sanction est sévère, puisque la dispense tardive est réputée ne pas être intervenue et la contrepartie de la clause de non concurrence doit alors être payée, durant toute la durée de la clause.

Dany MARIGNALE Avocat au Barreau de PARIS