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Rupture conventionnelle de contrat de travail et transaction. Par Philippe Cano, Avocat.
Parution : mardi 28 avril 2015
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Les arrêts de la Cour de cassation se succèdent, au sujet des ruptures conventionnelles du contrat de travail qui manifestement ont le vent en poupe dans les relations employeurs/salariés, mais ne se ressemblent guère, tant le contentieux à ce propos est divers et varié.

Dans l’espèce connue de la Chambre sociale de la Cour de cassation amenant à son arrêt du 25 mars 2015 [1], employeur et salarié avaient signé un accord de rupture conventionnelle et, avant même d’attendre son homologation, s’étaient empressés de conclure une transaction dans l’intervalle ; transaction qui devait régler non seulement tous litiges relatifs à l’exécution du contrat, mais aussi le différend relatif à la rupture de celui-ci !

La lecture de cet arrêt apprend en outre que l’employeur a, quelques mois après cet accord mal ficelé entre les parties, licencié son salarié.

Le litige naquit ainsi devant la juridiction prud’homale, entre un employeur qui soutenait la nullité de la transaction conclue, et un salarié qui sollicitait le règlement des causes de celle-ci.

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel qui validait cette transaction, en retenant que " les parties à la rupture conventionnelle ne peuvent, pour remettre en cause celle-ci, éluder l’application des dispositions de l’article L. 1237-14 du code du travail prévoyant la saisine du conseil de prud’hommes et qu’il résultait de ses constatations que la transaction avait notamment pour objet de régler un différend relatif à la rupture du contrat de travail, la cour d’appel a violé les textes susvisés ".

Trois enseignements à tirer de cet arrêt :

- La transaction est affectée de nullité, car son objet recoupait notamment celui de la rupture conventionnelle ;

- Cette nullité est d’autant plus évidente, qu’aucune transaction sur une rupture ne peut intervenir avant que celle-ci ne soit consommée ;

- Enfin, la rupture conventionnelle du contrat de travail, homologuée postérieurement à cette transaction, n’avait manifestement pas été au centre du litige prud’homal, chacune des parties s’attachant à évoquer la transaction (sa validité ou sa nullité) : or, la Cour de cassation rappelle implicitement en faisant mention de l’article 1237-14 du Code du travail que cette rupture conventionnelle, parfaite pour avoir été homologuée, n’a été contestée devant le Juge prud’homal par aucune des deux parties...et cela a sans doute été une erreur stratégique pour le salarié.

Philippe CANO, Avocat Associé au Barreau d'AVIGNON SCP Corinne CANO et Philippe CANO

[1N° pourvoi 13-23368.