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Outreau 2015 : les psychologues au procès de Daniel Legrand : Sachants et Experts. Par Marie-Christine Gryson-Dejehansart.
Parution : lundi 13 juillet 2015
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Je ne souhaitais plus m’exprimer sur le procès de Daniel Legrand qui vient de se tenir aux assises des mineurs à Rennes, ne remettant pas en cause la décision acquittement, mais de nouvelles polémiques suscitent des commentaires de la part de la psychologue clinicienne que je suis. Il s’agit de considérations relatives aux interventions des psychologues Sachants et Experts, y donner suite est parfaitement légitime et déontologique. Ce texte reprend donc les réponses apportées aux nombreuses interrogations de collègues posées lors des réunions et des formations professionnelles intervenues après ce procès en lien avec la sordide affaire d’Outreau. Pour une meilleure compréhension, il rapporte le déroulé des interventions des psychologues, les uns en tant que « Sachants » (invités) les autres en tant qu’experts (missionnés).

Sur le sujet, il été beaucoup débattu de ce qui semble être une démarche pour le moins invraisemblable pour un psychologue, tant au plan victimologique que déontologique, à savoir la proposition de diagnostic psychopathologique « sauvage » sans examen ni expertise des victimes une fois de plus au procès dit Outreau III, comme on avait déjà pu le constater lors des deux premiers procès d’Outreau avec l’intervention du Dr Paul Bensusssan [1].
C’est en effet une théorie anti-victimaire [2] inadéquate « les faux souvenirs » prônée par un psychologue - enseignant controversé, Hubert Van Gijseghem entendu comme « Sachant », qui a remporté la conviction de l’Avocat Général au procès de Rennes. Bien des questions auraient pu lui être posées, on pourra le constater.
Il s’est avéré tout à fait nécessaire d’expliquer pourquoi la référence à ses travaux inscrite dans le premier opus de « Outreau la vérité abusée » publié en 2009, en a été retirée pour sa réédition en e.book revue et augmentée en 2015 [3]. Notons qu’avant ce psychologue canadien, a été auditionné un psychologue belge auteur d’un ouvrage collectif sur le mensonge de l’enfant, professionnel « totalement inconnu au bataillon » selon l’un des meilleurs spécialistes de la parole de l’enfant en Belgique, le professeur Jean-Yves Hayez [4], psychiatre infanto-juvénile et Docteur en Psychologie, cité par mes soins lors de mon audition.
Il est très important d’évoquer l’intervention d’une autre Sachante, Hélène Romano, Docteur en psychopathologie clinique praticienne et universitaire renommée, qui a apporté les acquis de la recherche en matière de mémoire traumatique des victimes.
Pour ma part, psychologue de terrain ayant déjà à l’époque 20 années de travail auprès d’un nombre considérable d’enfants tout venants... dont environ 600 en expertise judiciaire, j’ai été auditionnée comme Expert ayant examiné la fratrie Delay, seule au plus près des faits, puis en dualité. Je reviendrai sur nos dépositions relatives aux travaux de ces expertises en y associant celles de mes deux collègues experts intervenus plus tardivement.
Enfin, la parole sera donnée à Jonathan et Chérif Delay deux victimes qui se sont portées parties civiles (tout comme leur frère Dimitri) qui expriment leurs réflexions critiques et informatives sur ce procès dans le cadre d’une interview relevée sur un site internet.

Le recours inapproprié aux « Faux souvenirs »

Nous avions déjà eu droit à la théorie sur les mensonges des enfants carencés divulguée par le Dr Paul Ben Sussan [5] - qui ne les avait jamais rencontrés - lors des deux premiers procès d’Outreau. Ce qui avait eu pour conséquence d’éteindre l’information sur leur vérité judiciaire toujours aussi méconnue aujourd’hui qu’hier. Pourtant, 12 enfants, dont les 4 frères Delay ont bien été reconnus victimes de viols agressions sexuelles, corruption de mineurs et proxénétisme. La Justice avait suivi les 7 psychologues experts judiciaires mais les médias avaient fait écho au seul diagnostic du psychiatre expert qui ne les avait pas examinés et qui, lui seul, pouvait s’exprimer n’étant pas tenu à la même obligation de réserve que ceux qui étaient missionnés par la Justice.
Ce procès de Rennes devait donc juger devant les assises des mineurs les accusations portées par 3 frères Delay contre Daniel Legrand pour des faits de viols qu’il aurait commis avant sa majorité. On sait qu’il a été acquitté pour les faits reprochés lors de sa majorité au procès en appel à Paris. On sait aussi que Daniel Legrand avait fait des aveux circonstanciés devant le Juge et l’expert psychologue avant de se rétracter.
De manière incompréhensible, aucune expertise psychologique actualisée n’a été effectuée auprès Chérif, Dimitri et Jonathan adultes, alors qu’ils l’accusaient et qu’ils se sont portés partie civile.
Ils ont donc évoqué à la barre leurs souvenirs de viols et agressions sexuelles présumés et vécus 15 années auparavant. A l’époque, leur parole avait alors été authentifiée par 3 experts psychologues différents.
Je les avais d’abord examinés seule en 2001 puis en dualité avec le Professeur Jean-Luc Viaux en 2002 au cours de l’instruction de Fabrice Burgaud sur ordonnance de mission. Ils ont été ré-examinés en 2004 par Brigitte Bonnafé à la demande du Président Monier lors du procès de Saint Omer suite à mon départ volontaire [6].
Au procès de Rennes, on sait que le diagnostic à distance de « Faux souvenirs » a été adopté par l’Avocat Général Cantero et repris dans son réquisitoire, en référence à l’intervention du « Sachant » Hubert Van Gijeseghem, en visio-conférence depuis Montréal. C’était dans l’objectif de l’évocation de la théorie des Faux souvenirs chère à ce professionnel qu’il l’avait d’ailleurs invité. Cet état de fait a été pointé par Me Moneris avocat de Chérif Delay, comme relevant de la subornation de témoin.
La question se pose d’emblée sur la réelle pratique clinique et psychothérapeutique de ce psychologue, Hubert Vangijseghem étant essentiellement un universitaire-enseignant depuis longtemps à la retraite et réalisant parfois à notre connaissance des expertises en privé. Notons aussi qu’il a reconnu ne pas connaître le dossier et qu’il n’a pas pu croiser comme j’ai pu le faire, les révélations concordantes de tous les enfants avec ceux des 4 adultes qui reconnaissaient les faits avant de se rétracter.
Mon audition a eu lieu avant son intervention, ce qui est très dommageable pour l’éclairage des jurés, car il aurait été utile de lui poser les questions suivantes si on nous avait opposé de manière contradictoire :

1 - Dans quelle mesure est-il au courant de la recherche sur la mémoire traumatique sur un cerveau en construction et pour ce faire, a t-il suivi des enfants victimes à long terme ? Ce genre de suivi m’a permis comme à tous les psychothérapeutes d’identifier les traces mnésiques évolutives du psycho-traumatisme.

2 - Comment peut-on évoquer le concept de « Faux souvenirs » qui s’avère ici totalement inapproprié puisqu’il concerne normalement l’émergence de souvenirs qui n’étaient jamais apparus au niveau conscient auparavant ? En l’occurrence les prétendus « faux souvenirs » des frères Delay relèvent d’événements qui ont déjà été évoqués aux personnels de l’Aide à l’Enfance mais aussi aux policiers, aux magistrats et aux experts et ce, au plus près des faits lorsqu’ils étaient enfants.

3 - S’il s’agit de « Faux souvenirs » comment les trois frères Delay qui avant le procès de Rennes s’entre déchiraient - comme l’a révélé Jonathan - auraient élaboré par devers eux, les mêmes « Faux souvenirs » au sujet de la même personne ?

4 - Tous les travaux sur les « Faux souvenirs » connus concernent des événement banals, connaît-il des travaux relatifs à l’induction chez des enfants de faux souvenirs concernant viols ou meurtres et qui ont été évoqués d’abord dans leur enfance puis à l’âge adulte ?

5 - Comment expliquer que les déclarations des trois frères Delay, qualifiés de « Faux souvenirs » soient identiques aux aveux circonstanciés - avant rétractation - de l’accusé ?

6 - Les 4 condamnés pour viols sur mineurs qui viennent témoigner en faveur de l’accusé sont-ils susceptibles d’avoir aussi de « Faux souvenirs » (il s’ agissait aussi de rétractations sur la présence de celui-ci) ou est -ce réservé aux victimes ?

Pour que cette théorie du « Faux souvenir » soit plausible il aura fallu convaincre les jurés que les révélations des enfants expertisés en 2001, 2002 et 2004 n’étaient pas authentiques mais qu’elles avaient été contaminées [7]... Nous verrons que l’interrogatoire des deux collègues experts permettra d’infléchir leur conviction vers cette possibilité de contamination.
Mais Hubert Vangijseghem a dit des choses qu’il aurait été nécessaire de relever au bénéfice des victimes. J’aurais abondé dans son sens quand il a dit n’avoir jamais rencontré d’enfants qui accusaient plusieurs personnes pour que leurs parents soient moins sévèrement punis.
J’aurais également abondé dans son sens quand il a dit que c’était les adultes les moins « construits » qui avouaient.
Malheureusement il n’a pas été possible de débattre avec ce professionnel qui est intervenu lors des derniers jours du procès peu avant le réquisitoire de l’avocat Général qui de manière inhabituelle n’a pas soutenu les accusations des plaignants. M. Cantero n’a pas pris en compte les points d’accord précités mais a réussi à convaincre les jurés que les frères Delay s’étaient trompés et qu’ils avaient de « Faux souvenirs », ne gardant que cette proposition de Hubert VanGijeseghem.
Lors de ma déposition au procès de Rennes sur laquelle je reviendrai, j’ai émis un avis très mitigé à l’égard de ce psychologue Québécois. Aujourd’hui le chroniqueur Judiciaire Durand Soufland et un certain nombre de personnes se demandent pourquoi j’ai donné sa référence dans mon ouvrage « Outreau la vérité abusée » qu’il qualifie sur Twitter de « bible du révisionnisme judiciaire ». J’ai donc précisé qu’elle a été supprimée lors de la réédition en e.book de ce même ouvrage revu et augmenté en 2015 et j’en donne ci après les explications.

Pourquoi avoir supprimé la référence à Hubert Vangijseghem ?

Revenons aux années 96, 97 si mes souvenirs sont bons, car je n’ai pas mes agendas au moment où j’écris cet article. Les plus anciens d’entre nous se souviendront de la déferlante sur la France des nouveaux outils d’investigation de la parole de l’enfant avec l’association belge « Parole d’Enfants ». Le psychologue – déjà enseignant en retraite Hubert Vangijseghem qui venait de traduire l’échelle scientifiquement mise au point par la recherche, l’analyse de la validité de la déclaration » (SVA) de Steller § Koehnken (1989) et Taskin §Yuille (1989) en était l’intervenant principal.
Deux séquences d’une semaine étaient alors proposées aux experts psychologues mais aussi une adaptation aux magistrats, policiers et travailleurs sociaux qui concernaient entre autre l’apprentissage des questions ouvertes en référence à la suggestibilité de l’enfant.
Cette échelle qui comporte 19 critères de validation et tout autant de vérification, a été élaborée en référence à des recherches statistiques en laboratoire à partir de cas avérés et un certain nombre de critères avaient été sélectionnés. A titre d’exemple, l’un des critères concerne l’arrêt de l’action de l’agresseur suite à un événement inattendu... un enfant qui fabule n’aura pas l’idée de faire allusion à cet imprévu.
Nous avons été gratifiés d’un entraînement avec de nombreux exemples d’application à visionner qui ont été réalisés par les professionnels de « Parole d’enfants », association belge spécialisée en victimologie (accueil de victimes, formations et expertises). L’enseignement a été également mis en pratique la passation de l’échelle à partir de nombreux cas cliniques relevant parfois de fausses allégations. Par ailleurs, un certain nombre de travaux de recherche en psychologie infantile ont été présentés par cet universitaire canadien. Ils concernaient entre autres les données sur la mémoire de l’enfant selon l’âge mais aussi la spécificité des récits d’enfants selon qu’il avait assisté ou non à un événement.
La procédure dite Mélanie a été adoptée à partir de cette échelle SVA dans de nombreux commissariats et gendarmeries et j’y ai participé en 1998 auprès de la brigade spécialisée des mineurs de Liévin (Pas-de-Calais).
Jusque là rien à dire. Comment ne pas être reconnaissante envers ce professionnel qui nous transmettait des acquis de la recherche déjà très utilisés et éprouvés outre atlantique.
Pourtant, lors de cette formation, nous étions divers participants à réagir à certains discours de Hubert Vangijseghem. Il se disait par exemple opposé à la mise en place d’une prévention des abus sexuels pour ne pas « sexualiser » l’enfant. (Aucun risque de ce côté ayant l’expérience de la prévention par le théâtre dans ce domaine).
Il disait également que les personnes qui avaient révélé avaient plus de troubles que celles qui n’avaient pas révélé. Donc autant s’abstenir. Il s’est avéré que la méthodologie utilisée posait problème : les personnes n’avaient pas été interrogées sur leurs relations avec leurs enfants. Or je suivais déjà à l’époque des mamans qui n’avaient pas déposé plainte, qui n’osaient pas changer leur bébé ou donner le sein... mais aussi qui pouvaient aller jusqu’ à gaver leur fillette pour qu’elle soit disgracieuse et que l’on ne les touche pas comme elles l’avaient été enfant.
Il a rapporté également avec conviction l’idée que les enfants chez qui on aurait induit des abus sexuels présenteraient les mêmes troubles qu’un enfant réellement victime. La pratique que j’en avais était radicalement opposée à cette thèse qui condamnait donc tout dévoilement d’agressions sexuelles car elles auraient alors été qualifiées systématiquement de révélations induites.
On arrivait de manière détournée, sans le nommer au syndrome d’aliénation parental (SAP) qui a mis à mal les révélations d’inceste durant de nombreuses années jusqu’à ce que le consensus psychiatrique international refuse son entrée dans le DSM V [8] pour absence de fondement scientifique.
Ces discours avaient été relativisés dans la mesure où il s’agissait de l’avis d’une personne qui n’avait a priori aucun rôle à jouer dans la protection de l’enfance en France ou ailleurs compte tenu de son statut de retraité. J’avais confiance en la lucidité des collègues qui savaient faire la part des choses de par leur pratique.
Nous avancions tout doucement à l’époque sur les connaissances en la matière et le grand nombre de cas nous éclairait davantage d’années en années. Toutefois la parole de l’enfant n’a jamais été sacralisée puisqu’en 2001 plus de 200 médecins pédiatres et psychiatres avaient été poursuivis par le Conseil de l’Ordre quand leurs signalements n’avaient pas abouti et que selon Claire Brisset la Défenseure des enfants, seulement 30% des signalements débouchaient sur un processus judiciaire.
En 2009 alors que l’ouvrage « Outreau, la vérité abusée » était présenté dans différents colloques, de nombreux spécialistes des victimes ont marqué leur étonnement à propos de cette référence, étant donné que Hubert Van Gijseghem s’illustrait à présent comme promoteur - tout comme le Dr Bensussan - de théories référencées anti-victimaires comme le SAP déjà cité, mais aussi de la théorie des faux souvenirs [9]. J’ai donc retiré cette référence de la réédition en ebook de la version revue et augmentée.
Il n’est pas question de réfuter l’existence de « Faux souvenirs » dans certaines conditions d’induction par un « gourou » ou dans le contexte d’un protocole expérimental, mais d’en dénoncer l’instrumentalisation pour ne pas porter crédit aux révélations de viols et d’agressions sexuelles à distance des faits.

L’intervention de la Sachante Docteur en psychopathologie : Hélène Romano

En amont du procès, cette professionnelle HDR (habilitée à diriger des recherches) et auteure de nombreux ouvrages de référence avait eu le courage de venir s’exposer dans ce champ de mines anti-personnelles destinées aux spécialistes de la parole des victimes. Elle a fait état utilement des données les plus récentes de la recherche, en particulier sur la mémoire traumatique. Elle a pu démontrer que les neuro-sciences et les supports de l’imagerie cérébrale confirmaient les données cliniques utilisées dans les expertises psychologiques sur la spécificité des récits traumatiques.
Il était donc fort intéressant pour les jurés de comprendre les déclarations des frères Delay qui parlaient de flashs et d’images isolées en référence à la mobilisation actuelle de leurs souvenirs. Très sollicitée par les médias du fait de ses publications en phase avec les faits de société, elle y était très présente peu avant le procès de Rennes ayant écrit un brûlot avec Boris Cyrulnik « Je suis victime » sur l’exploitation de la souffrance lors des catastrophes et autres attentats, par le biais des cellules psychologiques. Elle a osé parler de « l’imposture d’Outreau » en rappelant tout simplement que contrairement à ce qui était prétendu sur le mensonge des enfants, 12 avaient bien été reconnus victimes de viols. Son intervention favorable à la partie civile lors du procès, a essuyé les foudres de la défense et de son bras armé, le chroniqueur judiciaire Stéphane Durand Soufflant.
Aucun article en revanche pour s’interroger sur les positions peu claires de Hubert Vangijseghem dans ses écrits sur la pédophilie.

La déposition des Experts au procès de Rennes

J’ai donc été citée à comparaitre, n’ayant été ni récusée ni disqualifiée au procès de St Omer comme il a pu être écrit ou dit dans certains médias [10].
Malgré les bons retours, j’ai conscience que je n’ai pas pu être suffisamment pédagogue lors de ma déposition du fait de la pression, mais aussi de par l’hostilité générale, facilement perceptible. J’étais avec Fabrice Burgaud, l’autre coupable de substitution la plus ciblée négativement par les médias en écho aux contre vérités et autres caricatures des avocats de la défense lors des précédents procès... Le Président Dary, est resté neutre et bienveillant mais l’Avocat Général a montré d’emblée par ses attaques déstabilisantes qu’il n’accordait aucun crédit à mes démonstrations.
Il fallait pourtant rester lucide et concentrée, penser aux jurés pour la clarté, prévoir les attaques des avocats de la défense et les caricatures de certains journalistes... et ne plus penser que de longues démonstrations peuvent être réduites à quelques tweets...( J’ai pu constater après coup l’effet désastreux de ces tweets réducteurs).
J’ai vite pris conscience que c’était peine perdue, l’expert étant en quelque sorte la dépositaire de la mémoire des enfants d’alors, il fallait neutraliser nécessairement ce qui aurait pu être convaincant.
Il faut bien se rendre compte de la difficulté de la tache si l’on me permet de m’y attarder quelque peu mais qui dans un procès dit « normal » est tout à fait gérable [11] quand on a de l’expérience. Ce qui a du être expliqué en une heure et demi demande généralement une semaine pour les cours en formation continue. On me pardonnera d’y revenir. J’y évoque la psychologie de l’enfant, sa spécificité du monde infantile, avec la pensée magique, l’animisme, la mémoire et la métabolisation des événements, le mensonge, la fabulation et enfin les récits traumatiques sachant qu’il s’agit d’un psychisme en cours de construction. Sont également enseignées les échelles de validité de la déclaration dont celle que j’ai publiée après plus de 900 cas de victimes avérées.
En préambule de ma déposition, il m’ a semblé indispensable d’évoquer l’interdépendance entre les trois parties de l’expertise : l’examen de la personnalité, l’examen du récit et de son retentissement traumatique éventuel en prenant pour exemple le thème de la « cohérence ». Elle est envisagée en fonction de l’âge, du développement intellectuel, affectif du contexte socio-familial mais aussi par rapport à ce que l’on sait d’un récit de l’enfant qui a subi ou été témoin ou à qui on a raconté un événement. La cohérence est aussi envisagée par rapport à ce que l’on sait d’un récit traumatique. Elle est enfin envisagée par rapport aux répercussions psychotraumatiques mais aussi par rapport au dossier. En l’occurrence le récit de tous les enfants sur les viols en réunion étaient concordants, il faut insister sur ce point, concordants entre eux mais aussi au regard des récits des adultes qui reconnaissaient les faits avant de se rétracter.
Les Présidents d’assises me précisaient souvent que les jurés appréciaient beaucoup les illustrations par les tests. Le dessin étant le mode privilégié d’expression des enfants, on ne peut s’en priver. J’ai donc montré lors de mon audition deux exemples d’effraction dans le test de l’arbre et du « Patte Noire » [12] extrait des expertises des enfants Delay. Ces indices ne comptent toutefois que pour 1 point sur les 47 critères d’évaluation. Lorsque le corps de l’enfant est pénétré par un sexe d’adulte, il ne peut expliquer ce qu’il ressent en dehors de la douleur et de la peur face à l’incongruité d’un tel acte. Mais le vécu de pénétration est une effraction qu’il projette dans ses réalisations graphiques et dans les tests projectifs car elle reste fortement inscrite dans son univers mental. C’est un critère qui s’ajoute à ceux des évaluations des échelles de validité et des retentissements traumatiques sur le comportement. Les « fausses allégations » quand elles se présentent, de manière rarissime, ne résistent pas aux 47 critères étudiés (Voir :Test transversal).
J’ai donc résumé mes rapports d’expertise en prenant soin de lire l’énoncé exact des récits de viols pour en montrer la spécificité des données de forme et de contenu lorsque l’enfant victime en parle spontanément, protégé par un espace transitionnel (pendant le dessin, le test du village). Les souvenirs reviennent par flashs mnésiques qui relèvent d’un vécu sensoriel de douleurs, qui rappelle une posture, (vécu kinesthésique) qui rappelle une parole, qui rappelle un visage, et c’est à ce moment là que les enfants Delay et les autres (j’en ai examiné 15) citaient le nom des personnes en tant qu’agresseurs.
Lors des questions des avocats de la défense, le sujet de ma partialité a été évoqué, à savoir la demande de récusation qui avait été actée en mon absence alors que Me Berton réitérait ses contre-vérités sur mon prétendu suivi en thérapie des enfants d’Outreau dans l’association « Balise la vie » dont j’étais la Présidente bénévole.
J’avais apporté le paragraphe du rapport de l’Inspection Générale des Services Judiciaire qui infirme cette notion de partialité mais le Président n’en a pas voulu. J’aurais dû insister et montrer la lettre du Directeur de l’enfance qui infirme également cette accusation [13]. J’avais également la lettre du Rapporteur Houillon qui reconnaît son erreur alors qu’il a écrit que j’avais été récusée pour ces raisons là. J’ai toutefois précisé que si j’avais quitté volontairement le procès, c’était suite aux insultes de Me Berton, il a d’ailleurs nié les avoir proférées !
Et lorsque Me Berton m’a reproché certains paragraphes de mon livre « Outreau, la vérité abusée » et certaines publications sur internet, j’ai pu répondre, mais j’avais virtuellement quitté le procès, persuadée qu’il était inutile de persévérer. Le paragraphe sur Florence Aubenas dont il a donné lecture, ne méritait aucun commentaire, je me suis bien entendu abstenue, sachant à quelles récupérations je pouvais m’attendre [14].
J’ai tout de même obtenu avec satisfaction l’assentiment de l’Avocat Général au niveau de son réquisitoire lorsque j’ai évoqué la nécessité de protéger le statut légal de victime, en citant l’abbé Wiel qui a écrit et dit lors de ses interviews que les enfants Delay ont dénoncé à tort leurs parents et qu’ils sont donc des menteurs impénitents. Il y aurait alors possibilité pour eux de déposer plainte en diffamation, ce qui n’est pas possible actuellement.
Lorsque mes collègues sont apparus en visio-conférence, je n’ai pas été surprise de leur prise de distance, n’étant pas installés dans la solennité du tribunal qui permet de prendre conscience de l’impact de chaque mot et de la gravité de chaque commentaire. Ils ont adhéré de manière presque naturelle, sans sembler céder à la pression, aux suggestions de l’Avocat Général relatives aux possibles contaminations susceptibles d’avoir alimenté des « Faux souvenirs. »
Mais la question qui se pose est la suivante : Comment et par quel tour de démotivation, ce qui a été validé comme relevant de l’authenticité victimologique dans nos expertises des enfants Delay, relèverait donc aujourd’hui de contaminations, non repérées en amont ?
Je ne sais si mes collègues ont été piégés ou s’ils voulaient d’une certaine façon, rentrer dans le rang, aller dans le sens de l’avocat Général et échapper au lynchage médiatique, ce qui serait totalement compréhensible.
Interpellée par l’acquiescement aux suggestions de M.Cantero de mon confrère universitaire Jean- Luc Viaux et invitée par le Président à réagir à sa déposition, je lui ai quand même posé la question sur l’existence éventuelle d’études et de recherche sur des cas semblables : un souvenir d’événements traumatiques constaté quand l’enfant a 10 ans et réitéré 10 années plus tard à 20 ans qui seraient tous les deux des « Faux souvenirs. Je faisais allusion bien sûr au récit traumatique de Jonathan Delay sur le meurtre d’une fillette que nous avions recueilli séparément. Chacun avait en tête les aveux de Daniel Legrand sur le sujet, aveux effectués par courrier, mais aussi devant le juge et l’expert psychologue Michel Emirzé. On se souvenait également des descriptions données par Myriam Badaoui devant le juge avec un tel réalisme qu’une avocate s’est évanouie .
C’est l’Avocat Général qui s’est précipité pour répondre et parler d’expérience avec des enfants chez qui on a induit de « Faux souvenirs » (ce n’était pas ma question). Je doute que l’on ait pu pour des raisons éthiques leur suggérer expérimentalement des viols d’autant que selon les références des neuro-sciences sur les « neurones miroir » les enfants n’ont pas les ancrages cognitifs qui permettent de les mémoriser s’ils ne les ont pas vécus dans leur corps. J’ai évoqué les neurones miroir pour répondre à la question d’un assesseur sur le visionnage des films pornographiques. Les séquelles traumatiques ne sont pas les mêmes que lors d’un viol sur lui-même car l’enfant ne s’identifie pas aux adultes.
Il aurait fallu illustrer mes dires, non pas avec l’anecdote présentée moins démonstrative, mais avec celle de cette fillette examinée à l’âge de 7 ans alors qu’elle était hospitalisée pour une chirurgie réparatrice en lien avec un viol avec objet suite à un enlèvement. Elle n’avait subi aucune pression car il s’agissait d’un étranger, mais deux années plus tard au procès d’assises. Elle parlait d’un monsieur qui l’avait enlevée sur sa mobylette et que, une fois arrivés dans la forêt, elle était tombée sur une branche et s’était fait mal. Le viol avec objet n’avait pas été mémorisé (alors qu’elle en avait parlé à tous à l’hôpital) faute de présence d’ancrage cognitif pour l’installer, ou pour faire simple : en l’absence de représentation dans l’imaginaire de l’enfant.
Avec le recul un certain nombre de regrets relatifs à cette déposition ont été exprimés auprès de mes collègues lors des échanges professionnels :
- regret de ne pas avoir rappelé que la confusion et la culpabilité des enfants d’Outreau était entretenues par le fait qu’ils devaient avoir des relations sexuelles entre eux lors des viols en réunion.
- regret de ne pas avoir parlé du mensonge si ce n’est que pour dire qu’il relève d’un processus rationnel qui n’a rien à voir avec le processus de réactivation de la mémoire traumatique lors de l’expertise.
- regret de ne pas avoir insisté suffisamment sur le fait que c’est lors de la reviviscence des viols en réunion que les enfants évoquaient les personnes concernées par telle posture, telle parole, telle douleur etc... comme peut en témoigner le jeune Damien, l’un des enfants de l’affaire dont des extraits de l’expertise ont été rapportés lors de mon audition à la Commission Parlementaire et dans « Outreau, la vérité abusée ».
- regret enfin, de n’avoir pas pu évoquer l’entretien avec Jean Luc Viaux alors que nous avons signé le rapport en commun. Jonathan y avait bien cité Daniel Legrand comme faisant partie de ses agresseurs et non pas seulement pour dire que celui-ci s’était rétracté au sujet du meurtre de la fillette. Il faut rappeler qu’il a été rapporté lors des débats que deux fillettes avaient bien été signalées disparues par interpol à l’époque de ce meurtre prétendument imaginaire [15].

Les interviews des victimes Jonathan Delay et Chérif Delay à propos du procès de Rennes

Nous savons que Jonathan Delay a bénéficié de quelques interventions dans les médias mais l’asymétrie a été grande en comparaison du nombre d’émissions de télévision, de radio et d’articles consacrés à l’accusé et jetant l’opprobre sur les soutiens des victimes. Les mot piégés de « révisionnistes, voire de « conspirationnistes » ont mis à mal toute volonté d’information du citoyen sur le contradictoire de cette affaire.
Jonathan Delay était présent en permanence, Chérif Delay a assisté au procès de manière ponctuelle étant incarcéré pour des faits de violence. Il n’avait pas les mêmes souvenirs que ses frères car il n’était présent chez lui que le Week end, ayant été placé dès l’âge de 2 ans.
Quant à Dimitri Delay, il n’est apparu que pour sa déposition, disant qu’il maintenait toutes ses anciennes accusations.
Il ne serait pas décent d’extrapoler sur leur ressenti durant et après le procès, leur donner la parole me semble être une exigence éthique.
Ces interviews ont été trouvés sur internet via Agoravox, source Pedopolis et sur Facebook Karl Zéro :

http://www.agoravox.tv/tribune-libre/article/outreau-3-reactions-de-jonathan-50194

http://www.agoravox.tv/tribune-libre/article/outreau-3-entretien-avec-cherif-50351

https://www.youtube.com/watch?v=R0X6iJYzRW4&utm_content=bufferf41a2&utm_medium=social&utm_source=twitter.com&utm_campaign=buffer

Conclusion

Le procès de Rennes et ses commentaires ont eu tendance à scotomiser l’ensemble du dossier en passant sous silence l’autre vérité judiciaire, celle des 12 enfants reconnus victimes de viols et proxénétisme. Il ne restait dans cette affaire d’Outreau, en tant qu’accusateurs, que les 3 frères Delay et leur mère dont les motivations de la rétractation - comme celle des adultes qui avaient reconnu dans un premier temps - n’ont jamais été analysées.
Pour avoir décrypté les stratégies de la Défense utilisées lors des deux premiers procès d’Outreau, je savais et je l’avais écrit dans mon ouvrage précité, que cette théorie anti-victimaire des « Faux souvenirs » serait évoquée le jour où les victimes devenues adultes reviendraient demander qu’une autre Justice leur soit rendue.
Ce nouveau référentiel Outreau à Rennes a consacré la théorie anti-victimaire des « faux souvenirs » qui sera vraisemblablement utilisée de manière systématique lorsque des enfants ou des adultes dévoileront des agressions sexuelles. On sait que depuis les premiers procès ce référentiel a provoqué une régression majeure de la prise en compte de la parole de l’enfant, ce que déplorent avec force tous les professionnels de l’enfance dont le Pédopsychiatre, ex-professeur de Psychologie Maurice Berger.
C’est cette incidence déviante qu’ont eu ces procès d’Outreau sur la psychologie de l’enfant agressé qui a toujours été et aujourd’hui encore, le moteur de ma motivation de ré-information.
Le procès de Rennes comporté un certain nombre de caractéristiques rappelant les deux premiers procès pour ce qui concerne d’abord le grand nombre d’avocats : Daniel Legrand bénéficiait pour lui seul d’une armée de 6 avocats redoutables dont Me Dupond Moretti. Les 3 parties civiles ne bénéficiaient que de 4 avocats dont un seul ténor du barreau Me Forster. On retrouvait aussi l’inégalité du traitement médiatique et une émission phare très compassionnelle et partisane « Envoyé Spécial » diffusée peu avant le procès, consacrée à l’accusé sans aucun contradictoire pour la partie civile. Citons lors du procès, la familiarité entre l’accusé et ses avocats avec certains journalistes, et de plus ici, la familiarité entre l’Avocat Général et certains témoins. Ce qui ne se voit jamais habituellement dans les autres procès d’assises.

La stratégie du bouc émissaire a été rejouée alors que l’instruction de Fabrice Burgaud [16] n’avait pas été remise en cause par l’IGSJ. Le réquisitoire à décharge du Ministère Public pour l’accusé a également été rejoué à l’identique tel qu’au procès de Paris, ce qui a permis aux 6 avocats de la défense de ne pas plaider . L’avocat de Jonathan Delay a jugé sévèrement ce dernier acte du procès lors de sa plaidoirie et dans ses commentaires. Mais comment ne pas être interpellée par l’annonce de l’avocat du plaignant le plus engagé, qui semblait se contenter au final que « tout soit dit » alors que son travail était plus que convaincant.
Par ailleurs, Me Reviron n’a pas voulu prendre en compte les expertises dans sa plaidoirie, donc acte ; mais si cela avait été le cas, il aurait été bien en peine de le faire, deux experts sur trois ayant infléchi leur position sous la pression.
Contrairement au procès de Paris, le verdict n’a pas fait l’unanimité du public et ceux qui soutiennent les victimes et qui ont été surnommés les « révisionnistes », ont manifesté leur réprobation.
Ce procès de Rennes a toutefois permis aux frères Delay de récupérer le statut de victimes qui leur avait été contesté jusqu’alors.
Les 4 frères qui ont ensemble reconstitué une famille, ne comptent pas en rester là et ils se tournent à présent vers la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
On me permettra pour terminer une autre forme de conclusion sur ce site qui accueille de manière privilégiée les articles des avocats, des magistrats, des juristes et des experts, elle portera sur une réflexion relative au travail de l’expert psychologue au niveau de la Justice pénale.

Ce travail est vraiment très ingrat. Vous travaillez toujours de la même façon, consciencieusement et avec le même sérieux et vous pouvez recevoir des compliments de la part des différents protagonistes des procès ou vous faire recadrer avec plus ou moins de dextérité pour des raisons de stratégie. Mais lorsqu’il s’agit d’affaires de viols sur mineurs et que les aveux et les preuves ADN sont absents, si vous avez mis en évidence des signes traumatiques évocateurs d’abus sexuels, vous devenez la cible des avocats dits de rupture et votre compétence et votre expérience reconnues la veille, n’existent plus le lendemain. Toutefois les limites en termes d’éthique n’avaient jamais été dépassées jusqu’à ces procès d’Outreau à nul autre pareils. Tous les coups ont été permis, même les attaques ad hominem, les caricatures et les contre-vérités qui seront reprises par les médias sans pédagogie sur l’objectif stratégique de la Défense. Les demandes de droits de réponse ne sont jamais acceptées, ou quand elles le sont, on ne les voit jamais diffusées ce qui maintient les arguments péjoratifs sur les experts dans leur capacité à valider la parole des victimes.
Il sera donc de plus en plus difficile pour les experts psychologues et psychiatres de faire face aux assises, à l’utilisation par la défense du nouveau référentiel Outreau sur les « Faux souvenirs ».

Marie-Christine Gryson-Dejehansart Psychologue Clinicienne Expert Judiciaire

[1Ce dernier n’a pas manqué de donner son avis sur mon audition en « sur-expert » multicarte. Voir : http://blogs.mediapart.fr/blog/marie-christine-gryson/090615/outreau-le-dr-paul-bensussan-et-le-conseil-de-lordre-des-medecins.

[2Terme proposé par le psychiatre Gérard Lopez, Président de l’Institut de victimologie et auteur de nombreux ouvrages de référence.

[3Cet article en signe l’épilogue.

[4Auteur entre autre de « La parole de l’enfant en souffrance » avec E. De Becker Dunod 2010 et préfacier de mon ouvrage « L’enfant agressé et le Conte créatif » Dunod 2013.

[6Je ne pouvais plus exposer sereinement dans le contexte de la stratégie installée par la défense (Bronca, contre-vérités, injures).

[7Rappelons ici que Eric Legros, Membre du Collège des Droits de l’enfant, Directeur des Maisons d’enfants ayant accueilli les victimes, s’est insurgé contre l’accusation de contamination des déclarations des enfants à l’endroit des assistantes maternelles et des travailleurs sociaux. Il l’exprime dans le film de Serge Garde « Outreau, l’autre vérité ». Ce film donne la parole aux acteurs du contradictoire (Magistrats, avocats, Experts, travailleurs sociaux, journalistes mais aussi à l’ancien Ministre de la Justice, au procureur Général de Paris et à l’ancien Ministre devenu avocat pour mineurs, Pierre Joxe) :https://www.youtube.com/watch?v=bP1MmPKIwoA.

[8Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux.

[9Il faut y ajouter celle de l’enfant carencé et celle du syndrome de Münchhausen instrumentalisé lors des révélations d’agressions sexuelles.

[11Les procès d’Outreau ont été des procès hors des normes judiciaire puisque la téléréalité et les médias en général, ont été partie prenante, instrumentalisée par des avocats de la défense dont le nombre était totalement inhabituel.

[16Ce n’est pas Fabrice Burgaud qui a renvoyé 17 accusés aux assises mais les magistrats de la Chambre de l’Instruction à l’unanimité. Ils ont renvoyé les personnes pour lesquelles il y avait des révélations croisées adultes-enfants et en plus des charges lourdes et concordantes. Les révélations croisées n’étaient pas un motif de renvoi suffisant.

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