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Un décret pour délivrer plus rapidement les permis de construire. Par Véronique Bichot-Godineau , Directrice juridique.
Parution : mardi 28 juillet 2015
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Accélérer les projets de construction, telle est l’ambition du décret n° 2015-836 du 9 juillet 2015, entré en vigueur le 11 juillet, et relatif à la réduction des délais d’instruction des autorisations d’urbanisme.
Ce décret met en œuvre les propositions faites par le préfet Jean-Pierre Duport dans son rapport remis en mars 2015 au Premier ministre, afin d’atteindre l’objectif énoncé par le Président de la République en janvier 2014 de voir tous les permis de construire délivrés en moins de 5 mois.

En effet, si les projets de construction relevant uniquement du Code de l’urbanisme respectent ce délai [1], tel n’est pas le cas lorsque les travaux nécessitent l’octroi d’autres avis au titre de législations connexes au droit des sols : les durées d’instruction s’en trouvent alors augmentées, faute de coordination entre les différentes procédures d’autorisation et d’avis.

Le décret du 9 juillet 2015 modifie, en conséquence, les délais d’instruction pour les permis de construire ou d’aménager qui sont soumis à ces législations parallèles, afin que le délai total d’instruction ne dépasse pas 5 mois (demeurent toutefois quelques hypothèses d’instruction avec un délai supérieur... [2]).

Ledit décret apporte également des précisions en matière d’archéologie préventive.

1. La réduction des délais d’instruction et d’émission des avis/accords

Le décret du 9 juillet 2015 raccourcit plusieurs délais d’instruction et, logiquement, les délais d’émission des avis et accords requis par les législations connexes au droit de l’urbanisme. Le texte amende donc en ce sens les dispositions concernées dans pas moins de 5 codes : le Code de l’urbanisme, le Code de la construction et de l’habitation, le Code de l’environnement, le Code du Patrimoine et le Code forestier.

Sont notamment apportées les modifications suivantes :

Un délai d’instruction de 4 mois pour :

- un permis de construire ou d’aménager portant sur un projet situé dans le périmètre de protection des immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques ou sur un immeuble adossé à un immeuble classé au titre des monuments historiques [3] ;
- une demande de dérogation à l’interdiction d’atteinte aux espèces protégées [4].

Un délai d’instruction de 5 mois pour :

- un permis portant sur un immeuble inscrit au titre des monuments historiques et, le cas échéant, lorsqu’il y a lieu d’instruire une dérogation en application du cinquième alinéa de l’article L. 123-5 du code de l’urbanisme ;
- un permis de construire portant sur des travaux relatifs à un établissement recevant du public (ERP) et soumis à l’autorisation prévue à l’article L. 111-8 du Code de la construction et de l’habitation ;
- un permis portant sur des travaux relatifs à un immeuble de grande hauteur et soumis à l’autorisation prévue à l’article L. 122-1 du même code [5] ;
- un projet situé dans un espace ayant vocation à être classé dans le cœur d’un futur parc national [6] ;
- un projet nécessitant la consultation d’une commission nationale [7].

Un délai d’émission des avis/accords préalables réduit :

- Le préfet se prononce désormais dans un délai de 4 mois sur un projet situé sur un territoire en instance de classement ou classé en réserve naturelle nationale [8].
- La commission départementale de la nature, des paysages et des sites doit formuler son avis dans le délai de 4 mois sur un projet modifiant l’état ou l’aspect d’un site classé ou en instance de classement [9].
- Le préfet notifie, dans le délai de 4 mois, sa décision sur le projet de travaux relatif à un immeuble de grande hauteur (IGH) à l’autorité délivrant le permis de construire [10].

Bien entendu, il conviendra de veiller à répercuter les modifications de ces différents délais dans les conditions suspensives figurant dans les promesses de vente immobilières et relatives à l’obtention d’une autorisation d’urbanisme.

2. Les précisions en matière d’archéologie préventive

Enfin, le décret apporte des ajustements à la procédure de diagnostic d’archéologie préventive dont peuvent faire l’objet certains dossiers de permis.

Le décret vient combler un vide en fixant un délai pour signer la convention de diagnostic entre l’opérateur d’archéologie et l’aménageur [11] :
- Dans le délai d’un mois suivant la réception de la notification de l’attribution du diagnostic, l’opérateur élabore un projet d’intervention détaillant la mise en œuvre de la prescription et le soumet au préfet de région pour approbation.
- Après transmission du projet de convention à l’aménageur et au plus tard 3 mois après la notification de l’attribution du diagnostic, l’opérateur et l’aménageur signent une convention précisant les conditions de réalisation du diagnostic, telles que prévues à l’article R. 523-31.

A défaut de signature de la convention dans le délai prévu à l’alinéa précédent ou en cas de désaccord sur les éléments prévus à l’article R. 523-31, ceux-ci sont fixés par le préfet de région, saisi par la partie la plus diligente, dans le délai de 15 jours.

Après l’allongement de la durée de validité des autorisations d’urbanisme, prévu par le décret n° 2014-1661 du 29 décembre 2014, l’adoption des mesures susvisées traduit la volonté gouvernementale d’encourager les projets de construction.

Il reste, dès lors, à espérer que la réduction du temps écoulé entre la demande faite par le pétitionnaire et l’autorisation du projet par l’administration compétente favorisera la relance dans ce secteur.

Véronique Bichot-Godineau, Directrice Juridique - Ancienne avocate au Barreau de Paris

[1Le délai d’instruction de droit commun est de 2 mois pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle et de 3 mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes des permis d’aménager (article R 423-23 du Code de l’urbanisme).

[2Ainsi, par exemple, le délai est de 10 mois lorsque le permis porte sur des travaux soumis à autorisation spéciale du ministre de la défense ou du ministre chargé de l’aviation civile. Le délai est de 8 mois lorsque le permis concerne des travaux soumis à l’accord du ministre chargé des sites (article R 423-31 du Code de l’urbanisme). Quant au délai d’instruction d’une demande d’autorisation de défrichement, il est ramené à 6 mois (article R 341-7 du Code forestier).

[3Article R 423-28 du Code de l’urbanisme.

[4Article R 411-6 du Code de l’environnement.

[5Article R 423-28 précité.

[6Article R 423-26 du Code de l’urbanisme.

[7Article R 423-27 du Code de l’urbanisme.

[8Article R 332-24 du Code de l’environnement.

[9Article R 341-13 du Code de l’environnement.

[10Article R 122-11-5 du Code de la construction et de l’habitation.

[11Article R 523-30 du Code du patrimoine.

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