Village de la Justice www.village-justice.com

Les avenants dans les marchés publics. Par Claude Richard, Avocat.
Parution : mercredi 2 septembre 2015
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/Les-avenants-dans-les-marches,20311.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

La liberté contractuelle confère aux parties à un marché public la faculté de modifier celui-ci par avenant. Cette liberté doit néanmoins être conciliée avec les principes qui gouvernent le droit de la commande publique (liberté d’accès à la commande publique, égalité de traitement entre les candidats).
L’article 20 du Code des marchés publics autorise la modification d’un contrat par avenant à la condition qu’elle ne bouleverse pas l’économie du marché, ni n’en change l’objet. Cette limitation cède toutefois lorsque la modification du contrat résulte de sujétions techniques imprévues.

1° le principe : l’absence de bouleversement de l’économie du contrat :

Un avenant ne peut bouleverser l’économie du marché, ni en changer son objet. Dans le cas contraire, la personne publique doit conclure un nouveau contrat dans le respect des règles de publicité et de mise en concurrence.
Aucun texte ne fixe toutefois de seuil au-delà duquel un avenant bouleverserait l’économie du contrat. Il s’agit d’une appréciation au cas par cas.
S’inspirant des critères dégagés par le juge communautaire [1], le juge administratif considère traditionnellement qu’est illégal un avenant qui étend le marché, dans une mesure importante, à des services non initialement prévus ou qui change l’équilibre économique du contrat en faveur du titulaire du marché, d’une manière qui n’était pas prévue dans les termes du marché initial.
Ainsi, un avenant augmentant le montant d’un lot de 12,29 % ne bouleverse pas l’économie initiale du marché [2]. Il en va différemment pour un avenant portant sur des travaux supplémentaires augmentant de 40 % le montant initial du marché [3].
En pratique, il y a lieu de considérer qu’une augmentation par avenant dépassant 15 à 20 % du prix initial bouleverse l’économie du contrat.

2° l’exception : l’existence de sujétions techniques imprévues :

L’exception à l’interdiction de bouleverser l’économie du contrat par voie d’avenant concerne les sujétions techniques imprévues rencontrées au cours de l’exécution du contrat, c’est-à-dire les obstacles non imputables aux parties et consécutifs de difficultés imprévues et exceptionnelles. Un avenant peut alors être conclu pour y faire face et ce, sans limite de montant.
La notion de sujétions techniques imprévues est toutefois d’interprétation stricte : il doit s’agir de difficultés matérielles rencontrées lors de l’exécution du marché qui présentent un caractère exceptionnel, imprévisible lors de la conclusion du contrat et dont la cause est extérieure aux parties. Ainsi, si les travaux supplémentaires proviennent de l’absence d’études sérieuses de sous-sol, le critère d’imprévisibilité n’est pas satisfait et l’entreprise ne peut demander à être indemnisée par voie d’avenant.

Claude Richard Avocat au barreau de Nancy Spécialiste en droit public DESS Droit des contrats publics DEA Droit privé général

[1CJCE, 19 juin 2008, aff. C-454/06

[2CAA Marseille, 28 juin 2012, n° 10MA01801

[3CE, 8 mars 1996, n° 165075