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L’activité partielle. Par Gilles Courtois, Juriste.
Parution : lundi 21 septembre 2015
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L’activité partielle, appelée chômage partiel avant la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, connaît, à mesure que les difficultés des entreprises se sont accentuées, un succès qui ne s’est pas démenti.

Conçue à l’origine comme un outil de préservation de l’emploi, le recours à l’activité partielle peut s’avérer particulièrement utile pour les entreprises et leur permettre tout en adaptant leur activité aux réalités du marché, de ne pas avoir à se défaire définitivement d’une partie du personnel.

I : L’entreprise face à l’activité partielle.

A : Les cas de recours.

Le législateur en son article R 5122-1 du code du travail a fixé une liste limitative de cas de recours à l’activité partielle. Il peut ainsi :

« placer ses salariés en position d’activité partielle lorsque l’entreprise est contrainte de réduire ou de suspendre temporairement son activité pour l’un des motifs suivants :

1° La conjoncture économique ;
2° Des difficultés d’approvisionnement en matières premières ou en énergie ;
3° Un sinistre ou des intempéries de caractère exceptionnel ;
4° La transformation, restructuration ou modernisation de l’entreprise ;
5° Toute autre circonstance de caractère exceptionnel. 
 »

Les termes utilisés, volontairement généraux, permettent d’envisager de faire rentrer dans les cases de l’activité partielle, l’essentiel des cas pouvant être rencontrés par les employeurs.

B : La demande de l’employeur.

Le recours à l’activité partielle nécessite que l’employeur ait consulté les représentants du personnel et qu’il ait obtenu l’autorisation préalable du préfet.

1 : La consultation des représentants du personnel.

Préalablement à la demande d’autorisation d’activité partielle, l’employeur doit s’assurer qu’il a bien consulté pour avis le comité d’entreprise, ou le cas échéant les délégués du personnel, sur son projet de recourir à l’activité partielle.

L’entreprise dépourvue de représentants du personnel doit informer ses salariés du projet de mise en activité partielle de leur établissement.

La consultation doit porter sur :
- les motifs de recours
- les catégories professionnelles et les activités concernées
- le niveau et les modalités de mise en œuvre des réductions d’horaire
- les actions de formation envisagées ou tout autre engagement pris par l’employeur

2 : l’autorisation préalable du préfet.

L’employeur doit ensuite adresser sa demande d’autorisation au préfet du département où est implanté l’établissement concerné.

L’article R 5122-2 du Code du travail indique que la demande doit préciser :

« 1° Les motifs justifiant le recours à l’activité partielle ;
2° La période prévisible de sous-activité ;
3° Le nombre de salariés concernés.
 »

Particularités :

En principe, l’autorisation d’activité partielle peut être accordée pour une durée maximum de six mois.

Toutefois,,lorsque l’employeur a, préalablement à sa demande, déjà placé ses salariés en activité partielle au cours des trente-six mois précédant la date de dépôt de la demande d’autorisation, cette dernière mentionne les engagements souscrits par l’employeur.

La demande est accompagnée de l’avis préalable du comité d’entreprise en application de l’article L. 2323-6 ou, en l’absence de comité d’entreprise, de l’avis préalable des délégués du personnel.

L’employeur doit adresser par voie dématérialisée la demande dans les conditions fixées par l’article R. 5122-26.

Il se verra notifier la décision d’autorisation ou de refus dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception de sa demande d’autorisation.

Il convient de préciser que l’absence de décision dans un délai de quinze jours vaut acceptation implicite de la demande.

Dans tous les cas, que la décision soit positive ou négative, l’employeur doit en informer le comité d’entreprise ou, en l’absence de comité d’entreprise, les délégués du personnel.

C : La demande de remboursement des indemnités versées.

Lorsque l’employeur obtient l’autorisation pour recourir à l’activité partielle il est tenu de verser à ses salariés une indemnité horaire correspondant à une part de leur rémunération antérieure.

Dans le souci de ne pas aggraver la situation de l’entreprise, l’article R 5122-5 du Code du travail prévoit que l’employeur peut adresser à l’Agence de services et de paiement une demande d’indemnisation au titre de l’allocation d’activité partielle.

L’octroi de cette indemnisation lui permet ainsi d’obtenir le remboursement mensuel des rémunérations versées aux salariés concernés par la réduction d’activité.

La demande doit être formulée chaque mois et comporter :

1° Des informations relatives à l’identité de l’employeur ;
2° La liste nominative des salariés concernés ainsi que le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques ;
3° Les états nominatifs précisant notamment le nombre d’heures chômées par salarié.

L’allocation d’activité partielle, versée à l’employeur, est attribuée dans la limite d’un contingent annuel d’heures indemnisables fixé actuellement à 1000 heures par an et par salarié.

Cependant, dans l’hypothèse ou la mise en activité partielle des salariés est due à des travaux de modernisation des installations et des bâtiments de l’entreprise, ce contingent est limité à 100 heures.

Le montant actuel de l’allocation versée par heure chômée est de :
- 7,74 € dans les entreprises employant jusqu’à 250 salariés,
- 7,23 € dans les entreprises à partir de 251 salariés.

Attention : le versement de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle sera refusé lorsque :

*la réduction ou la suspension de l’activité est provoquée par un différend collectif de travail intéressant l’établissement dans lequel ces salariés sont employés.

Toutefois, dans le cas d’une fermeture de l’entreprise ou d’un service décidé par l’employeur suite à une grève, le versement des allocations et des indemnités peut être autorisé par décision du ministre chargé de l’emploi, si la fermeture se prolonge plus de trois jours,

*Les salariés dont la durée du travail est fixée par forfait en heures ou en jours sur l’année.

Toutefois, ces salariés en bénéficient en cas de fermeture totale de l’établissement ou d’une partie de l’établissement dont ils relèvent

Enfin, l’autorité administrative peut demander à l’employeur le remboursement des sommes perçues au titre de l’allocation d’activité partielle en cas de non-respect par l’entreprise, sans motif légitime, des engagements mentionnés dans la décision d’autorisation.

II : Le sort des salariés.

A : La mise en activité partielle.

L’article L 5122-1 du Code du travail précise que le salarié se trouvera en position d’activité partielle, après autorisation de l’autorité administrative, s’il subit une perte de rémunération imputable :

- soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d’établissement
- soit à la réduction de l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement ou partie d’établissement en deçà de la durée légale de travail
En cas de réduction collective de l’horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d’activité partielle individuellement et alternativement

B : La rémunération.

Le recours à l’activité partielle a pour effet d’entraîner une baisse de la rémunération du salarié.

Pour pallier à cela, l’article R 5122-8 du code du travail prévoit que l’employeur verse à ses salariés une indemnité horaire correspondant à 70 % de sa rémunération brute.

La rémunération que l’employeur se doit de retenir est celle servant d’assiette au calcul de l’indemnité de congés payés qu’il convient ensuite de ramener à un montant horaire sur la base de la durée légale de travail ou lorsqu’elle est inférieure, de la durée collective de travail ou de celle mentionnée dans le contrat de travail.

Par exception, le salarié recevra 100 % de la rémunération net horaire s’il est en formation pendant les heures chômées.

Enfin, l’employeur est tenu de remettre au salarié un document indiquant le nombre des heures indemnisées, les taux appliqués et les sommes versées ou les faire figurer dans le bulletin de paie.

C : Le cas des salariés protégés.

1 : l’acceptation de l’activité partielle.

L’employeur souhaitant recourir à l’activité partielle doit adopter une attitude particulièrement vigilante lorsque la société comporte en son sein des représentants du personnel.

La jurisprudence refuse à l’employeur la possibilité d’imposer à un salarié protégé une mise en activité partielle (Cass. soc., 29 janv. 1992, no 88-44.603).

Dans une telle situation, la véritable difficulté se pose en cas de refus par le représentant du personnel :

L’employeur a alors deux possibilités :

- Renoncer à la mesure et le maintenir dans son emploi aux conditions antérieures ;
- Procéder au licenciement du salarié protégé en veillant à respecter la procédure spéciale et en sollicitant de l’inspecteur du travail une autorisation administrative, le licenciement devra être fondé sur les raisons qui ont conduit l’employeur à lui proposer un changement dans ses conditions de travail.

En pratique, pour délivrer l’autorisation administrative, l’inspecteur du travail va vérifier si le refus du salarié est d’une gravité suffisamment importante pour justifier ou non un licenciement.

Dans l’attente de l’autorisation administrative,l’employeur est tenu non seulement de conserver le salarié, mais encore de le rémunérer jusqu’à l’obtention de l’autorisation de licenciement (Cass.soc.15-12-2011,n°10-20.093).

2 : L’incidence sur le mandat syndical.

Le contrat de travail du salarié placé en activité partielle est suspendu pendant les heures chômées.

La suspension du contrat de travail n’a aucune incidence sur l’exercice du mandat du représentant du personnel et ce dernier peut l’exercer normalement pendant la période d’activité partielle.

D : Leur formation.

Durant leurs heures chômées et dans un souci légitime d’assurer aux salariés une meilleure adaptabilité à leur poste de travail, l’article L 5122-2 du code du travail leur permet :

- De bénéficier de l’ensemble des actions et de la formation mentionnés aux articles L 63136-1 et L 6314-1 réalisées notamment dans le cadre du plan de formation

Il convient également de souligner que les heures chômées par le salarié sont intégralement prises en compte pour le calcul des droits à congés payés.

E : Le régime fiscal et social.

Le versement de l’’indemnité d’activité partielle fait l’objet d’une exonération de cotisations sociales.

Elle est néanmoins soumise à la CSG et de la CRDS.

Cependant ce prélèvement de la CSG et de la CRDS sur les allocations d’activité partielle ne doit pas avoir pour effet de réduire le montant net des allocations, ou, en cas de cessation partielle d’activité, le montant cumulé de la rémunération nette d’activité et de l’allocation perçue, en deçà du SMIC brut.

Le cas contraire, il convient de réduire le montant de ces prélèvements jusqu’à garantir le SMIC brut.

L’indemnité d’activité partielle est cessible et saisissable dans les mêmes conditions et limites que les salaires.

Gilles Courtois Juriste droit social
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