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Intégration en CDI d’une gestionnaire d’antenne de France 3 Corse après 30 ans de CDDU. Par Frédéric Chhum, Avocat.
Parution : mardi 3 novembre 2015
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Par jugement du 17 septembre 2015, le Conseil de prud’hommes de Paris a requalifié les 30 ans de CDDU d’une gestionnaire d’Antenne de France 3 Corse (France Télévisions) en CDI.

Le Conseil de prud’hommes de Paris a requalifié les CDD en CDI et condamné France 3 Corse (France Télévisions) à payer à la salariée, gestionnaire d’antenne les sommes suivantes :
-  17.461 euros à titre de rappel de salaire ;
-  1.746 euros à titre de congés payés afférents ;
-  9.331 euros à titre de prime d’ancienneté ;
-  2.266 euros à titre d’indemnité de requalification ;
-  4.524 euros à titre d’indemnité de sujétions ;
-  6.120 euros à titre de prime de fin d’année ;
-  1.000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

I) Les faits

Madame X a été engagée, par France Télévisions, sous contrats à durée déterminée d’usage successifs, à compter de juin 1984, en qualité de « Scripte », puis à compter de 2009 de manière exclusive en qualité de « Gestionnaire d’antenne » (mais déclarée comme Scripte), au sein d’Antenne 2 devenue France 2, de France 3 et de France 3 Corse Via Stella.

A cet égard, France 3 Corse est une des vingt-quatre antennes métropolitaines de proximité de France Télévisions.

Cette chaîne d’actualité couvre la totalité de la Corse, et reprend l’essentiel des émissions nationales de France 3, auxquelles viennent s’ajouter des productions locales.

Un bulletin d’information en langue corse est également diffusé à l’antenne.
France 3 Corse produit également une version satellitaire, reprenant la quasi-totalité des émissions diffusées sur le réseau local. Baptisée France 3 Via Stella, elle peut être reçue en France métropolitaine via les bouquets Fransat et Canalsat, ainsi que sur les principaux réseaux ADSL français.

En qualité de gestionnaire d’antenne, emploi qu’elle occupe réellement depuis 2009, Madame X participe à l’élaboration des conducteurs d’antenne dans le cadre de la grille des programmes de la chaîne et coordonne la mise en œuvre de ce programme en respectant les obligations du cahier de mission et des charges, ainsi que la ligne éditoriale.

Aussi, Madame X coordonne la mise en œuvre de ces programmes en régie de diffusion et doit anticiper chacun des problèmes susceptibles de se produire (durées de directs non respectées, pannes techniques et informatiques) en modifiant la programmation instantanément.
France Télévisions a employé, ces 5 dernières années, Madame X environ 116 jours par an, dont 133 jours en 2013.

Madame X saisissait le Conseil de prud’hommes de Paris le 27 juin 2014 d’une demande de requalification de ses CDD d’usage en CDI à temps plein avec reprise de son ancienneté à 1984, et de requalification de son emploi de Scripte en Gestionnaire d’Antenne.

Madame X demandait également le paiement de la prime d’ancienneté, de la prime cadre, du rappel de salaire depuis 2009 du fait de la requalification de ses CDD en CDI à temps plein.
Parallèlement à la saisine du Conseil de prud’hommes, Madame X mettait en demeure France Télévisions de régulariser sa situation et l’informait de la saisine du Conseil de prud’hommes par lettre recommandée du 1er juillet 2014.

II) Le jugement du conseil de prud’hommes de Paris du 17 septembre 2015.

Dans un jugement prononcé le 17 septembre 2015, le Conseil de prud’hommes de Paris a requalifié les CDD en CDI de la salariée de France 3 Corse et a condamné France Télévisions à lui payer un certain nombre de sommes.

Le Conseil de Prud’hommes relève que :

«  (…) Madame X a été affectée depuis son embauche de façon invariable aux mêmes fonctions de scripte, puis selon la nouvelle terminologie de gestionnaire d’antenne.

Qu’il résulte de ce qui précède que la succession de CDD fait apparaitre que le recours à cette salariée revient à pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise et que la société France Télévisions fait appel à ses services de façon systématique pour faire face à un besoin structurel de main d’œuvre.

Qu’en tout état de cause, l’emploi de scripte, gestionnaire d’antenne, tel qu’exercé effectivement par la demanderesse qui se tient constamment à la disposition de l’entreprise pour ses besoins normaux, permanents et prévisibles n’est pas temporaire par nature.

Que dans ces conditions, c’est de façon irrégulière que la société France Télévisions a couvert par une succession de CDD quel qu’en soient leurs motifs, la collaboration de la salariée.

Attendu, qu’ayant constaté que l’emploi occupé par la salariée, qui était maintenue dans les mêmes tâches, était liée à l’activité normale et permanente de l’entreprise, le Conseil décide, que les relations de travail entre les parties étaient à durée indéterminée.

A titre surabondant, l’article L. 1242-13 du code du travail édicter que ce contrat est remis au salarié au plus tard dans les 2 jours ouvrables suivant l’embauche ; que ce n’est pas le cas en l’espèce.

Le Conseil requalifie le CDD en CDI à temps partiel à mi temps à compter de 2009.

Qu’il fixe par calcul propres et adopté la moyenne de salaire à 2.266,97euros. (…)

Il sera fait droit sur 3 ans, date de prescription en matière salariale :
-  Au rappel de salaire ;
-  A l’indemnité de requalification ;
-  A la prime de fin d’année ;
-  A l’indemnité de sujétions ;
-  Il sera fait droit depuis 1999 à la prime d’ancienneté
 ».

Par ailleurs, la salariée est déboutée de ses autres demandes (frais de voyage, supplément familial, travail dissimulé, préjudice au titre de la retraite).
Le jugement peut faire l’objet d’un appel jusqu’au 12 novembre 2015.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum