Village de la Justice www.village-justice.com

Une SCI est-elle un consommateur ? Par Grégory Rouland, Avocat.
Parution : lundi 15 février 2016
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/Une-SCI-est-elle-consommateur,21463.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Suivant la Cour de cassation, une société dont l’activité déclarée au RCS est l’investissement immobilier, et qui contracte un prêt à ce titre, ne peut bénéficier des dispositions du Code de la consommation relatives à la prescription dont bénéficient les consommateurs (Cass. 1re civ., 3 févr. 2016, n° 15-14.689).

I. Rappel : définition du consommateur

Transposant la directive 2011/83 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, dite « loi Hamon », a inséré un article préliminaire au sein du Code de la consommation afin de définir le consommateur. Ainsi, ce dernier est exclusivement une personne physique qui agit à des fins n’entrant pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.

De fait, ne peuvent bénéficier du régime protecteur des consommateurs :
• les sociétés,
• les associations,
• les syndicats de copropriétaires,
• et toute autre entité (qui ne remplit pas la définition de consommateur donnée par le Code de la consommation).

II. Résumé de l’affaire.

L’affaire présentement commentée était simple. Une SCI, dont l’activité déclarée au registre du commerce et des sociétés, était l’investissement immobilier, se voit accorder un prêt. Faute de régler certaines échéances, le prêteur engage une procédure de saisie immobilière à l’encontre de la SCI.

Cette dernière, judicieuse, cherche à se désengager de sa dette en soutenant que l’action de la banque est prescrite. En effet, la banque aurait dû l’assigner dans le délai de deux ans suivant le premier impayé (article L. 137-2 du Code de la consommation).

Les juges d’appel donnent raison à la SCI. Selon eux, à l’examen du contrat de crédit, il ressort de l’examen que la banque et l’emprunteur ont entendu soumettre le prêt aux dispositions des articles L. 312-1 et suivants du Code de la consommation (relatives au crédit immobilier).

III. Position de la Cour de cassation

Mais la Cour de cassation censure l’arrêt. Elle rappelle que l’article L. 137-2 du Code de la consommation concerne uniquement l’action des professionnels pour les biens et services qu’ils fournissent aux consommateurs. Or, la SCI n’avait pas la qualité de consommateur.

IV. Que retenir de cet arrêt ?

Lorsque le crédit immobilier est octroyé à un consommateur, l’action de l’établissement de crédit en remboursement des sommes prêtées se prescrit par deux ans.

Mais cette prescription est de cinq ans lorsque l’emprunteur n’est pas un consommateur, même si les parties ont entendu soumettre le contrat de prêt aux dispositions des articles L. 312-1 et suivants du Code de la consommation, relatives au crédit immobilier.

La raison de ce principe se trouve dans l’article L. 312-3 de ce même Code excluant du champ d’application des règles du crédit immobilier, les prêts destinés à financer une activité professionnelle qui, en vertu de son objet social, procure des immeubles ou fractions d’immeubles.

Cela signifie qu’on ne peut pas étendre le champ d’application de l’article L. 137-2 du Code de la consommation, aux crédits immobiliers consentis à des SCI.

Ce principe n’est pas récent et avait déjà été énoncé par la Cour de cassation (Civ. 2e, 3 septembre, n°14-18.287).

Grégory Rouland Docteur en Droit et Avocat [->gregory.rouland@outlook.fr]
Comentaires: