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Nouveau Code du travail : mode d’emploi. Par Magali Baré, Consultante.
Parution : mercredi 5 octobre 2016
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Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 8 août 2016, dite « Loi Travail », la nouvelle architecture du Code du travail en trois dimensions (ordre public, champ du négociable, mesures applicables en l’absence d’accord) suscite des interrogations auprès de nos interlocuteurs faisant des recherches dans le Code du travail.

Un exemple typique de cette nouvelle ventilation que je trouve intéressant de partager avec nos lecteurs, m’a été soufflé lorsque j’ai été interrogée sur une éventuelle évolution des règles relatives à la compensation des temps de trajet.

La disposition en vigueur antérieurement était la suivante :

« Article L3121-4
Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l’employeur prise après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, s’il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire. »

Depuis le 10 août 2016, l’article L3121-4 est désormais rédigé de la manière suivante :
Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire.

Une comparaison rapide suffit pour voir qu’une partie importante du texte n’y figure plus. Le droit positif a-t-il changé ? Aucunement. En revanche, la lecture de l’article L3121-4 ne suffit plus pour avoir une vision complète du cadre juridique applicable au temps de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, comme sur d’autres sujets, mais je poursuis avec cet exemple.

Cet article correspond désormais à la partie « Ordre public » du Code du travail, il pose le principe. Il convient désormais de compléter cette lecture en allant regarder les règles négociables par accord collectif puis les règles applicables en l’absence de tout accord collectif.

Soit, si je reprends tout :

1ère étape : l’ordre public

Art. L. 3121-4. – Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif.
Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie soit sous forme de repos, soit sous forme financière. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire.

2ème étape : le champ ouvert par la loi à la négociation collective

L. 3121-7 Alinéa 2 – Une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche prévoit des contreparties lorsque le temps de déplacement professionnel mentionné à l’article L. 3121-4 dépasse le temps normal de trajet.

On retrouve une première partie de la phrase manquante de l’ancien article L 3121-4 avec un changement : priorité est donnée à la négociation d’entreprise, l’accord de branche n’étant que subsidiaire conformément au nouveau schéma conventionnel en matière de durée du travail.

3ème étape : les dispositions applicables en l’absence de tout accord collectif

L. 3121-8 (extraits) – À défaut d’accords… les contreparties prévues au second alinéa de l’article L. 3121-7 sont déterminées par l’employeur après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent.

La seconde partie de la phrase manquante du nouvel l’article L3121-4 se retrouve ici. En l’absence d’accord, l’employeur prend une décision unilatérale.

Bilan : Aucun changement sur le fond en matière de compensation des temps de trajet habituels mais de nouvelles habitudes à prendre lorsque l’on consulte le Code du travail.

De ce fait, l’objectif de simplification des règles du droit du travail affiché par les promoteurs du texte peut ne pas paraître évident aux personnes de bon sens non juristes et amenés à manier régulièrement le Code du travail.

Nous leur recommandons pour sécuriser leurs recherches de ne pas s’arrêter à la lecture de la disposition d’ordre public. Ces principes, qui sont une synthèse à droit constant du Code du travail et la jurisprudence, doivent être impérativement respectés mais ils ne sont généralement pas suffisants et nécessitent des dispositions complémentaires.

Il convient alors de s’assurer systématiquement de ce qui peut être négocié, de l’existence d’accords collectifs de branche et d’entreprise applicables et, en l’absence de tout texte conventionnel, des dispositions supplétives légales.

Magali Baré Consultante Cabinet IDée Consultants www.ideeconsultants.fr