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L’installation de la médiation judiciaire se précise… Par Ludovic Leplat, Médiateur.
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Parution : jeudi 9 février 2017
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Même si la médiation connaît encore de nombreux préjugés et de freins dans sa mise en place, elle s’installe progressivement.
Les anti-médiation faisant de plus en plus le choix de se former à la médiation et d’afficher fièrement celle-ci à leur posture juridique, c’est manifestement un véritable changement qui s’opère.
Certains y verront la peur de perdre la maîtrise d’un dossier d’autres verront plutôt un retournement dans leur approche juridique du conflit, in fine ils trouveront de nombreux avantages à promouvoir ce mode alternatif de résolution des conflits (déblocage de situation difficile, retour du dialogue, aboutir à un accord, pacification des relations,…).
Dans le domaine judiciaire, tant au niveau des magistrats que des professionnels du droit, c’est le manque de connaissance de la médiation qui change l’approche et qui dégrade son usage.
Oui, il faut reconnaître que le mot « médiation » a été employé à mauvais escient, que trop souvent le mot « médiateur » qui intervenait n’en était pas vraiment un, le mot négociateur, conciliateur ou arbitre aurait dans de nombreuses situations été plus clair dans les esprits et aurait affiché une meilleure compréhension des méthodes et des décisions.
Dans une décision imposée et quelle qu’en soit l’issue, les parties resteront avec cette souffrance et dès qu’elles en auront la possibilité elles réanimeront et dynamiseront le conflit qui les oppose.
Clarifier et définir la médiation judiciaire c’est faire avancer le droit et la liberté de décision des parties en conflits, c’est un changement que de dire qu’il y a un autre champ des possibles, que la partie émotionnelle du conflit est au dessus de la décision.
J’ai dernièrement assisté à un colloque à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de l’Université de Lille II, sur le thème : « Quelles perspectives pour la médiation en droit public », une initiative en partenariat avec la Cour administrative d’appel de Douai et du Tribunal administratif de Lille, de nombreux ateliers ont été proposés (adaptation des techniques de médiation aux spécificités du droit public, la perception de la médiation par les acteurs des procès, les profils des médiateurs : quelles réalités professionnelles,…Etc…), l’intérêt de ce colloque a permis de clarifier la posture du médiateur judiciaire et de comprendre l’intérêt des magistrats à recourir à ses services, la salle a pu interagir librement avec les intervenants ce qui a suscité un véritable engouement pour cette journée d’étude.
Depuis quelques mois un véritable changement se contractualise dans l’approche de la médiation et les derniers textes confirment cette modernisation :
Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle - Article 5 « La médiation »
L’article R.621-1 du Code de justice administrative prévoit que la juridiction peut charger un expert d’une mission de médiation (décret du 2/11/2016)
Et récemment une dépêche du 20 janvier 2017 relative à la prise en charge de la médiation au titre de l’aide juridique.
Concernant cette dernière une rétribution du médiateur est définie dans le cadre d’une médiation judiciaire.
Extrait de la dépêche du 20 janvier 2017 :
La rétribution du médiateur peut intervenir dans le cadre d’une médiation judiciaire ou d’une saisine du juge aux fins d’homologation d’un accord conventionnel.
Dans le cadre d’une médiation conventionnelle, la rétribution du médiateur ne concerne que la phase de saisine du juge en vue de l’homologation de l’accord trouvé entre les parties. En aucun cas, le médiateur ne pourra percevoir de rétribution au titre de l’aide juridictionnelle pour la médiation conventionnelle en tant que telle.
L’intervention du médiateur dans le cadre d’une médiation judiciaire est désormais rétribuée selon les dispositions de l’article 118-11 du décret du 19 décembre 1991 qui prévoit un tarif fixé par le juge en fonction du nombre de parties à la médiation et de l’importance et du sérieux des diligences accomplies par le médiateur. Jusqu’à l’entrée en vigueur de ces dispositions, le 29 décembre 2016, dans le cadre d’une médiation judiciaire, la rétribution du médiateur est prise en charge au titre de l’aide juridictionnelle mais n’est pas tarifée.
A compter du 29 décembre 2016, le médiateur peut désormais percevoir une rétribution tarifée par le juge en cas de saisine pour homologation d’un accord à l’issue d’une médiation conventionnelle.
Dans cette hypothèse, la rétribution est subordonnée à la transmission au juge par le médiateur d’un rapport exposant les termes de l’accord trouvé entre les parties et permettant au juge d’apprécier l’importance et le sérieux des diligences qu’il a accomplies.
Ce rapport est remis au juge par le médiateur, lorsque les parties saisissent le juge et avant la tenue de l’audience d’homologation de l’accord.
Le greffe tient à la disposition des médiateurs le modèle type de rapport.
Ce rapport est établi par le médiateur et doit permettre au juge de connaître les modalités du déroulement de la médiation qui a conduit à l’accord et ses termes exacts. Il formalise expressément l’accord soumis à l’homologation du juge. Il mentionne le nombre de rendez- vous de médiation.
Conformément à l’article 21-3 de la loi du 8 février 1995, ce rapport ne doit pas entrer en contradiction avec l’obligation de confidentialité qui s’impose au médiateur. Il ne peut donc pas révéler le contenu des discussions.
A compter du 29 décembre 2016, en application de l’article 118-11 du décret du 19 décembre 1991 le montant de la rétribution des médiateurs est fixé par le juge taxateur à 256 euros HT maximum pour chaque partie bénéficiant de l’aide juridictionnelle dans la limite de 512 euros HT pour l’ensemble des parties bénéficiant de l’aide juridictionnelle. Si seule l’une des parties bénéficie de l’aide juridictionnelle, le montant de la rétribution du médiateur sera au maximum fixé à 256 euros HT par le juge taxateur. Par contre, si trois parties bénéficient de l’aide juridictionnelle au sein d’une même médiation, le montant de cette rétribution sera limité à 512 euros HT.
Néanmoins, lorsque le médiateur est déjà rétribué totalement ou partiellement par un tiers (par exemple par la CAF dans le cadre d’une médiation en matière familiale), le montant de la rétribution du médiateur au titre de l’aide juridictionnelle fixée par le magistrat taxateur ne peut être supérieur à la part restant à la charge des parties. Ainsi, pour calculer le montant maximum de la prise en charge de la rétribution du médiateur au titre de l’aide juridictionnelle, le magistrat taxateur déduira au préalable les sommes que le médiateur aura déjà perçues de la part de tiers.
Il y a cinq conditions pour être médiateur judiciaire (loi 131-5 du Code de procédure civile.
Le médiateur est choisi par le juge en cours d’instance, voire même lors d’un référé. Il est désigné par le juge quand les parties sont d’accord sur le principe de la médiation. Le juge donne son agrément en vérifiant les cinq conditions énoncées par la Loi (131-5 CPC) pour être médiateur de Justice :
1.Ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation, d’une incapacité ou d’une déchéance mentionnée sur le bulletin n° 2 du casier judiciaire,
2. N’avoir pas été l’auteur de faits contraires à l’honneur, à la probité et aux bonnes mœurs ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d’agrément ou d’autorisation,
3.Posséder, par l’exercice présent ou passé d’une activité, la qualification requise eu égard à la nature du litige,
4.Justifier, selon le cas, d’une formation ou d’une expérience adaptée à la pratique de la médiation,
Présenter les garanties d’indépendance nécessaires à l’exercice de la médiation.
La destination et la saisine du médiateur judiciaire se précise, il appartient aux magistrats avec l’accord des parties, de désigner un médiateur pour procéder à une médiation judiciaire en tout état de la procédure, y compris en référé.
Expert de justice près la cour d\\\'appel de Douai Expert de justice près la cour administrative d\\\'appel de Douai Médiateur de justice inscrit près la cour d\'appel de Douai Médiateur de l\\\'association MEDIMMOCONSO (www.medimmoconso.fr) Président du Centre de Médiation des Hauts-de-France (www.cmp-hdf.com)Merci pour cet article qui éclaire la fonction de médiation insdispensable notamment dans le domaine judiciaire.
J’ai lu les 4 conditions pour prétendre à ce type de fonction.
Pour ce qui est de la dernière, je n’ai pas bien compris si un dîplôme était requis, ou si une capacité révélée par ses fonctions précédentes et ses qualités propres suffisaient à pouvoir exercer.
Dans l’attente de vous lire,
Anne
Bien cordialement
Bonjour,
Je vous remercie pour votre témoignage, concernant "la condition 5" c’est ce qui termine le texte, le 5 ayant disparu : "Présenter les garanties d’indépendance nécessaires à l’exercice de la médiation"
Vous pouvez trouver la fiche de poste sur ce lien : http://www.metiers.justice.gouv.fr/la-justice-hors-de-la-fonction-publique-12684/le-mediateur-de-justice-26854.html
Bien à vous,
Ludovic Leplat
Pour exercer la médiation aujourd’hui, rien ne vous sera demandé, puisque cette profession n’est pas réglementée. Les magistrats choisissent plutôt des experts du domaines qui ont acquis une certaine "sagesse" par l’expérience.
Or la médiation est un métier, puisque la posture s’acquière à mon sens par une formation mais surtout par la pratique régulière.
Bonjour Ludovic. L’usage du mot médiation a évolué. Depuis longtemps, ce mot est utilisé pour désigner un tiers intervenant entre des parties dont la relation est devenue conflictuelle. De ce fait, le "médiateur" a longtemps été "tout tiers", comprenant le négociateur institutionnel, le conciliateur, le moralisateur, le conseil et même l’arbitre. Le rôle conciliateur du juge a fait de lui un médiateur. Lorsque la médiation a commencé a être discutée en France et que j’ai énoncé une spécificité de la "médiation professionnelle", les notaires ont rappelé leur posture d’impartialité et ont affirmé ainsi être des "médiateurs naturels". Ils ne se trompaient pas sur la définition du mot. En droit du travail, le médiateur est toujours conciliateur. Aux Etats-Unis la définition est encore celle-ci, ainsi qu’au Canada et au Québec, où les ADR reposent sur une conception arbitrale de la médiation.
Ainsi, ce n’est pas un mauvais usage du mot médiateur qui est la conséquence du flou actuel, c’est plutôt le fait que le mot est désormais utilisé dans un contexte qui se précise. Aujourd’hui l’ensemble des acteurs de la médiation intervenants sur les relations dégradées ont rejoint l’idée - énoncée depuis 2001 par la CPMN - de la professionnalisation de la médiation et sont sur la voie de la "profession de médiateur". Désormais, le mot nécessite d’être précisé. Mais il a toujours été utilisé à bon escient. C’est une question de période, de moeurs et de vocabulaire. Le travail de changement que notre organisation a initié implique un usage plus précis et c’est là qu’il convient d’agir auprès des rédacteurs des textes de loi. Les relations que nous avons soutenu avec toi auprès des magistrats du Nord, délivrant des Espoirs de la médiation à M° Benjamin Ingelaere et au Président Thierry Hanouet du TGI de Béthune, ont participé d’une démarche de clarification. Mais ces actions de promotion d’une nouvelle conception de la médiation, et a fortiori de la "médiation professionnelle" sont encore les débuts d’une nouvelle profession. Parce qu’il reste à bien faire comprendre que la médiation - et tu le sais en tant que titulaire du CAP’M - n’est pas du tout une affaire de droit et donc de justice, mais une affaire de liberté de décision et de projet relationnel. Bien cordialement
Soumettre la rétribution du médiateur à l’appréciation par le juge de son travail est une pratique extrêmement pernicieuse. Pourquoi avoir un a priori négatif sur la compétence du professionnel engagé ? Et pourquoi existerait ce pouvoir de contrôle du juge sur le médiateur ?
Si le magistrat accepte de faire confiance à une liste de médiateurs qui se seront présentés avec une formation de qualité, et une pratique suffisante et régulière, la confiance s’imposera d’elle même.
D’autre part, demander au juge l’appréciation de l’importance et le sérieux des diligences accomplies par le médiateur est tout aussi déplacé : en effet, que peut signifier "diligences accomplies" lorsque le processus de médiation ne comporte aucun objectif ou obligation de résultat. L’objet de la médiation est de restaurer la relation, ce qui conduit parfois à un accord, mais pas toujours....
La médiation judiciaire , oui, mais pas à n’importe quel prix.
Le médiateur est choisi par les parties concernées.
La médiation est extrajudiciaire dire le contraire c’est vouloir la faire disparaître.
Combien d’avocats laissent entendre que la médiation ne sert à rien.
La médiation permet de résoudre les conflits par l’altérité et non pas l’adversité.
"Dans le domaine judiciaire, tant au niveau des magistrats que des professionnels du droit, c’est le manque de connaissance de la médiation qui change l’approche et qui dégrade son usage. Oui, il faut reconnaître que le mot « médiation » a été employé à mauvais escient, que trop souvent le mot « médiateur » qui intervenait n’en était pas vraiment un, le mot négociateur, conciliateur ou arbitre aurait dans de nombreuses situations été plus clair dans les esprits et aurait affiché une meilleure compréhension (...) " (sic)
" Certains y verront la peur de perdre la maîtrise d’un dossier d’autres verront plutôt un retournement dans leur approche juridique du conflit, in fine ils trouveront de nombreux avantages à promouvoir ce mode alternatif de résolution des conflits (déblocage de situation difficile, retour du dialogue, aboutir à un accord, pacification des relations,…). " (sic)
Cette analyse prolixe et partiale, est-elle de source autorisée ou n’est-elle qu’un point de vue d’un "vrai médiateur" ?
Quel est l’intérêt d’ergoter ainsi à propos des conciliateurs de justice qui font bénévolement le même travail de bien plus longue date ?
Les particuliers et le Ministère de la Justice vont donc aller payer un service qui leur est déjà proposé gratuitement par des personnes au moins aussi compétentes ?
Que nous chault cette "réclame" à nous, délégués du Défenseur des droits dont le rôle n’est aucunement de rédiger un accord ?
Que Monsieur LEPLAT aille donc tenir sa tribune devant la Fédération Nationale des conciliateurs de France.
Bônjour monsieur ét Merci pour cet article , pouvez vous Me donner le ou les organismes de formation les plus qualifiants dàns ce domaine et délivrant la certification de médiateur ? .
Je vous en remercie .
Cordialement
caroline Dumiot