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Injonction de payer et jurisprudence des « gares principales ». Par Gildas Neger, Docteur en droit.
Parution : lundi 13 mars 2017
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Le greffe du tribunal de commerce de Nice considère que « la jurisprudence de la gare principale n’est pas applicable en matière d’injonction de payer, c’est une disposition d’ordre publique » (Courrier du greffe daté du 30 janvier 2017).

On passera sur l’emploi du singulier des « gares » pour ce qui concerne l’objet de notre billet.

Pour autant, on ne peut pas passer sur l’oukase d’un greffe qui fait fi de la jurisprudence sur la seule base qu’il s’agit d’une injonction de payer.

Il convient de rappeler, succinctement, que l’injonction doit être délivrée au lieu de résidence du débiteur (art. 1406, al. 2 CPC). Il s’agit d’une règle d’ordre public (art. 1406, al.3,) et toute clause contraire est réputée non écrite (art. 1406, al.3,). De surplus, le juge doit relever d’office son incompétence (art. 847-5 CPC).

Pour autant, lorsqu’il s’agit d’une personne morale la théorie des gares principales est applicable (Cf. en ce sens Cass. 2ème Civ., 27 mai 1988, n° 86-19.606). On relèvera toutefois une exception ; en matière de créance née d’une charge de copropriété la juridiction compétente est celle du lieu de la situation de l’immeuble (article 60 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967).

Dès lors, il nous apparait difficilement compréhensible que le greffier puisse refuser une injonction de payer en arguant d’un motif d’ordre public inexistant.

« Conformément à la jurisprudence prétorienne dite des gares principales, lorsque la personne morale a un établissement, une succursale ou une agence qui est dirigé par un agent supérieur qui la représente, et peut l’engager et conclure des contrats en son nom avec les tiers, la demande peut être portée devant la juridiction dans le ressort de laquelle est situé l’établissement, la succursale ou l’agence ; que cette règle prétorienne s’applique à toute personne morale sans distinction quant à la nature de son activité civile ou commerciale ... » (Procédure n°09/00670 - ordonnance du TGI de Douai du 13 avril 2010 non publiée).

En l’espèce le siège du débiteur est à Paris et le contrat de service s’effectue à Nice. Son établissement secondaire (avec qui le contrat de service a été signé) dispose d’une autonomie de gestion suffisante avec les tiers, et a le pouvoir de la représenter à l’égard des tiers. Enfin, est impliqué dans le litige.

La procédure initiée répondait donc parfaitement aux exigences légales (Cf. CA Lyon, chambre civile 1 B, 18 février 2014, n° 13/07989 – JurisData n° 2014-005663).

CQFD

Gildas Neger Docteur en Droit Public
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