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Quelle juridiction saisir en cas de harcèlement moral ? Par Cécile Villié, Avocat.
Parution : mardi 18 avril 2017
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Le salarié victime de harcèlement au travail peut saisir le conseil de prud’hommes, le tribunal correctionnel et le tribunal des affaires de sécurité sociale afin d’obtenir réparation de ses préjudices.

1. Le conseil de prud’hommes

La saisine du conseil de prud’hommes est le plus souvent précédée par la rupture du contrat de travail du salarié victime de harcèlement moral, soit par un licenciement, soit par une rupture du contrat de travail dont le salarié aura pris l’initiative.

Quel que soit le mode de rupture du contrat de travail, il pourra avoir être entaché de nullité compte tenu du fait que le harcèlement est la cause de la rupture.

En cas de licenciement nul, le salarié pourra être réintégré chez son ancien employeur.

Néanmoins, dans un contexte de harcèlement moral, le plus souvent, le salarié refusera cette réintégration au profit d’une indemnisation.

Devant le conseil de prud’hommes le salarié, victime de harcèlement moral peut obtenir :
- des dommages-intérêts réparant son licenciement nul ;
- une indemnité compensatrice de préavis ;
- une indemnité compensatrice de congés payés ;
- des dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral subi ;
- une indemnité spécifique au titre de la violation par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat ;
- l’annulation des sanctions disciplinaires, mutations, refus de promotion motivés par le harcèlement.

2. Le tribunal correctionnel

Le salarié s’estimant victime de harcèlement peut porter plainte, sans être tenu d’en avertir son employeur.

Pour que la plainte ne soit pas classée sans suite, il convient de soigner sa rédaction et d’y joindre des pièces justificatives (attestations, certificats médicaux, écrits du harceleur, etc.).

D’autre part, l’inspecteur du travail peut lui-même avertir le parquet par la rédaction et la transmission d’un procès-verbal.

L’auteur du harcèlement moral encourt une peine de deux ans d’emprisonnement et une amende de 30.000,00 euros.

En se constituant partie civile, la victime de harcèlement peut demander la réparation de ses préjudices en sollicitant des dommages-intérêts.

Par les voies pénales et civiles, la victime du harcèlement peut obtenir la réparation de ses préjudices mais seule l’action pénale a une vocation punitive à l’égard de l’auteur des faits.

3. Le tribunal des affaires de sécurité sociale

La responsabilité de l’employeur peut être recherchée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.

En effet, le salarié victime de harcèlement moral peut solliciter la reconnaissance de la faute inexcusable de son ancien employeur.

Pour ce faire, le salarié devra démontrer que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat alors qu’il aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en protéger.

Néanmoins, au préalable il faut que la CPAM reconnaisse l’origine professionnelle de l’accident (malaise, tentative de suicide) ou de la maladie professionnelle (dépression) qui a été provoqué par le harcèlement.

Si la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, le tribunal des affaires de sécurité sociale pourra octroyer au salarié :
-  la majoration de sa rente à son maximum,
-  l’indemnisation de sa souffrance morale notamment.

Il est préférable de saisir le tribunal des affaires de sécurité avant le conseil de prud’hommes dans la mesure où il sera plus aisé pour la victime d’obtenir l’indemnisation de son préjudice lié à la rupture de son contrat de travail.

Au surplus, en cas de licenciement pour inaptitude, le caractère sans cause réelle et sérieuse sera nécessairement reconnu puisque la faute de l’employeur est à l’origine de l’inaptitude du salarié.

Les actions devant le conseil de prud’hommes, le tribunal correctionnel et le tribunal des affaires de sécurité sociale sont donc complémentaires en ce qu’elles ont chacune une finalité propre.

Cécile Villié www.villie-avocat.com
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