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Canicule : quand travailler fait suer. Par Claire Bensasson, Avocat.
Parution : samedi 24 juin 2017
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En ces temps de chaleur excessive, le travail semble redevenir ce qu’il était aux temps antiques : une torture.
Dans ces circonstances, aussi bien salariés, qu’employeurs s’interrogent sur les dispositions applicables en la matière.
Qu’est-ce que l’employeur doit faire ? Qu’est-ce-que le salarié peut faire ?

D’une part, l’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité et de protéger la santé des salariés.

En ce sens, l’article L4121-1 du Code du travail énonce :
« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes. »

Le Code du travail est silencieux sur les modalités pratiques de cette protection et il n’existe pas de température au-delà de laquelle les salariés cessent leur activité.
En conséquence, cette obligation doit trouver à s’appliquer de façon extrêmement pratique.

En effet, l’employeur peut envisager de proposer aux salariés qui le désirent de décaler leurs horaires de travail afin de profiter des quelques heures fraîches de la journée.
L’employeur fournit également de l’eau et peut avoir recours à l’utilisation de ventilateurs.

Ainsi, il convient de chercher des solutions aux désagréments occasionnés.

D’autre part, les salariés peuvent bien évidemment demander à leur employeur d’adapter leurs conditions de travail.

La question se pose notamment s’agissant de la tenue à adopter.
Il convient de différencier les situations selon que les salariés doivent porter ou non un uniforme.
L’uniforme dont il est requis le port peut être adapté aux conditions climatiques, un salarié peut avoir un uniforme plus léger à porter en cas de chaleur.

Par ailleurs, le port d’un uniforme peut également avoir une fin sécuritaire comme cela est le cas s’agissant du port de chaussures de sécurité.
La question devient donc plus épineuse car le port des chaussures est obligatoire pour le salarié afin d’éviter tout accident, sur les chantiers notamment. L’employeur ne peut alors pas le dispenser du port desdites chaussures sans mettre en danger son salarié : une telle décision constituerait un manquement à son obligation de sécurité.

Cependant, les salariés pour lesquels le port de l’uniforme n’est pas requis, se voient reconnaître de façon générale la liberté de se vêtir. Cependant, cette liberté doit pouvoir s’exercer dans le respect des règles de décence mais également des missions que l’on réalise à titre professionnel.
En ce sens, les salariés en contact avec la clientèle, des partenaires commerciaux ou encore avec des professionnels peuvent difficilement porter une tenue très estivale si cette dernière peut avoir un impact clair et dommageable sur l’activité de la société qui l’emploie. Ainsi, il peut être apporté des restrictions à la liberté vestimentaire dès lors qu’elles sont proportionnées au but recherché.

Enfin, le salarié n’est pas contraint de subir des conditions de travail dangereuses. Le salarié n’est pas démuni puisqu’il peut en effet exercer son droit de retrait et donc stopper son travail afin de se protéger.

Néanmoins, l’article L4131-1 du Code du travail précise que le droit de retrait est strictement encadré et son recours n’est justifié que si le salarié a un motif raisonnable d’y avoir recours et s’il est en présence d’un danger grave et imminent.
L’exercice du droit de retrait peut être jugé comme injustifié. Cette appréciation souveraine des juges peut avoir des conséquences sur la rémunération du salarié mais également sur le prononcé d’une éventuelle sanction disciplinaire.

En conclusion, d’un côté comme de l’autre, on ne peut qu’appeler à la vigilance.

Me Claire BENSASSON Cabinet A-P, Avocats au Barreau de Paris http://www.cabinet-ap.fr avocat@cabinet-ap.fr