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CHSCT et frais d’avocat à la charge de l’employeur. Par Gilles Courtois, Juriste.
Parution : vendredi 30 juin 2017
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Selon un arrêt rendu par la Cour de cassation, chambre sociale, le 21 juin 2017, le juge a la possibilité de réduire le montant des honoraires d’avocats du CHSCT mis à la charge de l’employeur à l’occasion des litiges en contestation du recours à une mesure d’expertise.

Le Code du travail offre la possibilité au CHSCT, dans certains cas bien définis, de recourir aux services d’un expert. L’employeur qui entend contester le bien-fondé de la décision par laquelle le CHSCT a décidé le recours à une expertise doit supporter les honoraires d’avocats exposé par ce dernier dans le cadre de la procédure (Cass.soc, 12 octobre 2016, 15-22953).

Dans l’arrêt de la Cour de cassation, était posée la question de savoir si le juge dispose du pouvoir de réduire le montant des honoraires d’avocats du CHSCT mis à la charge de l’employeur dans le cadre d’une expertise, lorsqu’il les estime disproportionnés.

Un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail a décidé lors d’une réunion du 25 juillet 2014, de recourir à une expertise sur le fondement de l’article L. 4614-12 du Code du travail, aux fins « d’analyser quantitativement et qualitativement le risque grave constaté dans l’établissement, d’aider le CHSCT à préciser et comprendre les origines organisationnelles et les mécanismes mis en œuvre dans les situations de travail dans lesquelles ce risque s’illustre et d’aider le CHSCT à formuler des propositions pour enrichir un plan d’action et suivre des indicateurs précis ».

L’employeur va contester la décision de recours à l’expertise et saisir le président du tribunal de grande instance en la forme des référés.

La cour d’appel de Pau, par arrêt en date du 24 septembre 2015, va débouter l’employeur de ses demandes et le condamner à prendre en charge les honoraires facturés au titre de la défense en justice des intérêts du CHSCT à hauteur des sommes de 8 080 euros TTC pour la procédure de première instance et de 5 170 euros pour celle d’appel.

L’employeur va alors se pourvoir en cassation.

L’employeur a l’appui de son pourvoi va notamment arguer que :
- la décision du CHSCT ne reposait sur aucun élément objectif sérieux, l’essentiel des éléments qu’il versait aux débats étant ancien ou établi par ou sous la dictée de la secrétaire du CHSCT, laquelle était en conflit ouvert avec la direction ;
- l’expertise prévue ne pouvait être utilisée pour résoudre le conflit social sévissant au sein d’un établissement ;
- que le coût surévalué d’une expertise décidée en application de l’article L.4614-12 du Code du travail, caractérise un abus dans la désignation de l’expert, lequel justifie l’annulation de celle-ci.

La Cour de cassation va casser et annuler l’arrêt rendu par la cour d’appel en affirmant que :
« qu’en cas de contestation, il incombe au juge de fixer le montant des frais et honoraires d’avocat, exposés par le CHSCT, qui seront mis à la charge de l’employeur en application de l’article L. 4614-13 du Code du travail, au regard des diligences accomplies ,qu’en statuant comme elle a fait, la cour d’appel, qui a méconnu son office, a violé le texte susvisé  ».

Il faut donc en retenir que le juge peut modérer le montant des honoraires d’avocats du CHSCT qui sont mis à la charge de l’employeur à l’occasion des litiges en contestation du recours à une mesure d’expertise. Une telle faculté est ouverte indépendamment de la caractérisation d’un abus ou non du CHSCT.

Naturellement, un tel pouvoir de révision du juge est subordonné à la contestation de l’employeur.

Dès lors, au regard des possibilités ouvertes par la Cour de cassation, il est à prévoir une augmentation des contestations patronales en la matière.

Cette jurisprudence vient ainsi confirmer un arrêt qui avait été rendu par la Cour de cassation, chambre sociale, le 22 février 2017.

Gilles Courtois Juriste droit social
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