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La médiation judiciaire en détail. Par Lilla Várady.
Parution : mercredi 10 janvier 2018
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La médiation judiciaire est une méthode de règlement des différends distincte des procédures judiciaires et extrajudiciaires. Les parties peuvent résoudre leurs problèmes eux-mêmes avec l’aide d’un médiateur, au lieu de confier leur règlement à une institution extérieure, un tribunal.
La médiation judiciaire est basée sur les lois et la règlementation des États membres et elle fonctionne avec une sécurité absolue depuis plusieurs années.

I. La médiation en général

Le mot « médiation » est dérivé du latin (« mediare ») qui veut dire, « être au milieu ». A mon avis, ce terme exprime bien la position d’intermédiaire occupée par un tiers entre deux parties ayant un différend. Sa tâche consiste à trouver un règlement au conflit et à arriver à un accord.

Le médiateur joue un rôle clé dans le processus. C’est une personne neutre, impartiale qui dirige les parties au cours de la discussion et qui les aide à trouver une solution convenant à tout le monde.

Le médiateur se contente de diriger la procédure, il ne propose pas de solutions, il ne donne pas de conseils - ce qui rend son travail vraiment unique - mais ce sont les parties qui vont résoudre elles-mêmes le problème avec son aide.

Les parties participent de leur plein gré à la procédure. Si l’une des deux n’accepte pas la procédure de médiation ou quelque partie de la solution proposée, la médiation ne se réalise pas. C’est très important car les parties doivent approuver l’engagement en faveur de la résolution du conflit et du respect de l’accord.

L’essence du volontariat, c’est que les parties elles-mêmes souhaitent un accord, ce qui les aide à chercher une solution.

La médiation se concentre toujours sur le futur et elle n’analyse pas les griefs du passé ; par conséquent, les intérêts et les besoins des parties se retrouvent au centre de la procédure. Le médiateur s’efforce de les faire apparaitre, de les concrétiser et de trouver les intérêts communs. Si les parties opposées les reconnaissent, elles ne seront pas loin du règlement et de la solution du conflit.

II. Médiation judiciaire

La médiation judiciaire est une méthode de règlement des différends distincte des procédures judiciaires et extrajudiciaires, dans laquelle les parties règlent leur différend ensemble avec l’aide d’un médiateur.

Avec l’expansion internationale de la médiation, il était presque inévitable d’introduire cette institution dans les procédures judiciaires. Ici, cependant, elle a pris une forme un peu spéciale. Au sein d’une organisation judiciaire, elle est devenue une procédure distincte du juge de l’affaire, dit personne neutre.

Dans le procès, c’est le juge qui tranche. Si une des parties n’accepte pas la décision, leur différend peut perdurer et même générer de nouveaux conflits. En médiation judiciaire, la décision n’est pas entre les mains du juge, mais entre les mains des parties. Les parties ne confient pas leur destin à une personne étrangère : elles tentent elles-mêmes de trouver une solution appropriée à leur problème.

Le médiateur judiciaire ne participe donc pas à la procédure et ne connaît pas les documents du contentieux, mais grâce aux techniques de médiation, il obtient des informations sur les plaideurs et leurs griefs. La procédure par médiation n’a pas d’autre but que de mettre en place un accord.

Ceci est très important dans les procédures judiciaires car ainsi, chaque partie se sent « gagnante » et les positions de chacune sont renforcées.

L’accord survenu durant la médiation peut être inclus dans le règlement par le juge à la demande des parties et il peut l’approuver, s’il respecte la loi.

Dans la mesure où la médiation ne se termine pas par un accord, le juge tranchera le différend.
A mon avis, il est important que les clients connaissent cette forme de règlement extrajudiciaire des différends et qu’au lieu d’opter pour une procédure plus coûteuse et plus lente, ils choisissent la médiation pour résoudre leurs problèmes respectifs.

III. Les fonds européens de la médiation

Pour faciliter un meilleur accès à la justice, à la séance de Tampere des 15-16 octobre 1999, le Conseil européen a appelé les États membres à développer des procédures extrajudiciaires et alternatives au nom du principe d’accès à la justice.

Ensuite, le Conseil a constaté qu’il était nécessaire d’élaborer les principes fondamentaux en vue de développer les procédures extrajudiciaires des affaires commerciales et civiles et de simplifier l’accès à la justice.

A la suite du Plan d’action de Vienne et des conclusions de la séance de Tampere, le conseil des ministres de la Justice et des Affaires intérieures a appelé le Comité à créer « le Livre vert » consacré à la méthode alternative de résolution des différends commerciaux et civils.

Il faut garantir l’application des principes de base pour que la gestion des conflits des forums extrajudiciaires de règlement des différends offre la sécurité requise par le système de justice.
« Le Livre vert » rappelle que les formes de règlement des différends ne sont pas appelées à corriger les insuffisances et les difficultés de fonctionnement du système judiciaire mais elles devraient fonctionner comme une autre institution plus appropriée de l’apaisement social.

« Le Livre vert » évoque les procédures qui permettent aux parties de reprendre le dialogue pour trouver une solution, contrairement aux procédures classiques de règlement des différends d’où chacun sort vainqueur ou perdant.

Les 21 questions traitées par le « Livre vert » nomment des choses concrètes comme les conditions de lancement d’une procédure, les délais, le secret, la validité des accords [1].

La directive du 21 mai 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil sur certains aspects de la médiation dans les affaires civiles et commerciales fixe les règles de règlement extrajudiciaire des différends pour que les litiges soient résolus surtout par un accord obtenu par une médiation.

IV. Directive du Parlement européen et du Conseil [2]

Le préambule de la directive fixe comme principe de base l’introduction du cadre législatif concernant les principes clés de la procédure civile et le droit des États membres à appliquer les directives de médiation dans les procédures nationales.

La directive offre l’opportunité d’élargir le cercle des institutions procédurales déjà existantes dans le cadre desquelles,par exemple, chaque partie doit consentir à la possibilité d’ordonner l’exécution. L’accord conclu doit être reconnu par les États membres ; cependant la directive ne concerne pas les règles nationales relatives à l’exécution des accords.

Le préambule souligne l’importance de la confidentialité et la défense des droits élémentaires.
L’objectif de la directive est de faciliter l’accès au règlement alternatif des litiges, ainsi que le règlement des litiges par des accords, en recourant à la médiation.

L’article 3 de la directive définit la notion de « médiation » et « médiateur » qui prévoit que la médiation est une procédure structurée,- quelle que soit la manière dont elle est appelée ou invoquée - dans laquelle deux ou plusieurs parties ayant un litige tentent de leur plein gré de parvenir à un accord avec l’aide d’un médiateur. Cette procédure peut être engagée par les parties, suggérée ou ordonnée par un tribunal, ou prescrite par le droit d’un État membre. Elle exclut les tentatives faites par la juridiction ou le juge saisi d’un litige pour résoudre celui-ci au cours de la procédure judiciaire relative au litige en question. Est médiateur tout tiers sollicité pour mener une médiation avec efficacité, impartialité et compétence, quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers dans l’État membre concerné et quelle que soit la façon dont il a été nommé pour mener la dite médiation ou il a été chargé de la mener.

La directive statue sur l’assurance de la qualité de la médiation, en faveur de laquelle les codes de bonne conduite, les mécanismes de contrôle de la qualité et le système de formation des médiateurs seront élaborés. (Article 4.)

Le tribunal peut inviter les parties à recourir à la médiation pour résoudre le litige ou à assister à une réunion pour avoir des informations sur le recours à la médiation. (Article 5.)

L’article 6 statue sur l’exécution de l’accord né d’une médiation réussie. Les parties peuvent demander que le contenu de l’accord soit rendu exécutoire par une juridiction ou une autre autorité dans un « acte authentique ».

Le préambule fixe déjà la confidentialité de processus, mais l’article 7 revient sur ce fait. Il prévoit que ni le médiateur, ni les personnes participant au processus de médiation, ne sont tenus de produire des preuves au cours de la procédure, sauf lorsque cela est nécessaire pour assurer la protection des enfants et protéger la bonne santé physique et morale d’une personne.

Les articles suivants de la directive disposent les délais de prescription de la médiation, l’information du public et les juridictions compétentes (Articles 8,9,10).

Les États membres, destinataires de cette directive - sauf le Danemark - mettent en vigueur les dispositions législatives nécessaires pour se conformer à la directive avant le 21 mai 2011, et au plus tard le 21 novembre 2010 pour ce qui est de l’article 10.

Les États membres ont adopté cette directive et ont élaboré, puis mis en application les lois concernant la médiation judiciaire et ils les appliquent intégralement pour respecter les objectifs de cette directive .

V. « Code de conduite européen pour les médiateurs », norme juridique concernant la médiation  [3]

Ce code de conduite énonce plusieurs principes que les médiateurs peuvent de leur plein gré - sous leur propre responsabilité - s’engager à respecter. Il peut être utilisé par les médiateurs intervenant dans tout type de médiation en matière civile et commerciale.

En appliquant le code de conduite, la médiation désigne toute procédure, quelle que soit sa désignation, par laquelle deux parties ayant un différend essaient de leur plein gré de parvenir à un accord sur le règlement de leur litige avec l’assistance d’un tiers – dénommé ci-après « médiateur ».

Le code de conduite définit le critère de compétence du médiateur : « selon lequel le médiateur doit être compétent et bien connaître la procédure de médiation. Il doit notamment posséder une bonne formation de départ et se recycler constamment sur le plan théorique et pratique, en fonction notamment des normes ou systèmes d’accréditation en vigueur. »

Au cours de la procédure de médiation, le médiateur se concerte avec les parties pour convenir d’une date pour la réunion de médiation. Il informe les parties de ses expériences et compétences pour mener la médiation. Pour son activité, le médiateur reçoit une rémunération que les parties doivent accepter.

Pour faire connaître ces méthodes alternatives de règlement de litige, les médiateurs doivent faire la promotion de leurs services d’une « manière digne de foi et honnête ».

Il est particulièrement important de souligner l’indépendance et l’impartialité : avant la médiation le médiateur doit divulguer toutes les circonstances qui peuvent affecter son indépendance ou entraîner un conflit d’intérêts. (Par exemple : toute relation d’ordre privé ou professionnel avec une des parties, tout intérêt financier ou autre dans l’issue de la médiation, le médiateur ou un membre de son cabinet, a agi en une qualité autre que celle de médiateur pour une des parties)

« Durant la procédure, le médiateur doit être toujours impartial avec les parties et il doit s’efforcer que sa démarche soit considérée comme telle. Le médiateur est tenu de servir chaque partie de la même manière dans le cadre de la médiation. »

Le document détaille assez longuement la conduite à suivre par le médiateur au cours de la procédure visant un règlement de l’accord. Il doit assurer que chaque partie comprenne l’essentiel de la procédure, son propre rôle et celui du médiateur.

A la demande des parties, l’accord de médiation peut revêtir une forme écrite. Le médiateur doit agir en respectant les principes de l’État de droit et de la nécessité d’un règlement rapide du litige.

Pour assurer l’équité, toutes les parties ont la possibilité adéquate de participer à la procédure. En cas de besoin, le médiateur doit informer les parties, et mettre fin à la médiation si elle est illégale, inapplicable ou s’il considère que la médiation n’aboutira pas à un accord.

Le médiateur peut, à la demande des parties et dans les limites de sa compétence, informer les parties sur la manière dont elles peuvent officialiser l’accord et sur les possibilités de le rendre exécutoire.

L’accent est mis sur la confidentialité en vertu de laquelle le médiateur doit observer la plus grande discrétion sur les informations découlant de la médiation ou relatives à celle-ci.

VI. Résumé

Aussi bien les législateurs européens que ceux des États membres ont reconnu les avantages et les possibilités inhérentes au règlement alternatif des litiges, durant lequel la médiation judiciaire basée sur les lois et la règlementation des États membres fonctionne avec une sécurité absolue depuis plusieurs années.

Selon les statistiques, son efficacité est exceptionnelle ; ce qui veut dire que les gens ne sont pas hostiles à la nouveauté et sont tentés de résoudre leurs problèmes eux-mêmes au lieu de confier leur règlement à une institution extérieure, un tribunal.

Au cours de la médiation les parties peuvent exprimer leurs sentiments, dissiper les malentendus, en résumé, ils peuvent exposer des faits plus ouvertement qu’à un procès. Comme ce sont eux qui trouvent la solution, ils ont le devoir moral de respecter le contenu de l’accord.

Donc, la médiation judiciaire est une institution comportant énormément d’avantages qui débouche sur un règlement favorable pour chaque partie et à laquelle recourent de plus en plus de gens.

dr. Várady Lilla

[22008/52/CE du Parlement européen et du Conseil

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