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Le recouvrement des trop-perçus versés aux fonctionnaires par les collectivités territoriales. Par Benjamin Ingelaere, Avocat.
Parution : lundi 15 janvier 2018
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Il arrive que les collectivités territoriales et locales constatent après des audits internes, que des trop-perçus de traitement ou primes ont été versés à leurs agents. Si la situation est parfois politiquement serrée à gérer, les dispositions légales sont pourtant claires.

Il arrive que les collectivités territoriales et locales constatent après des audits internes, que des trop-perçus de traitement ou primes ont été versés à leurs agents. Si la situation est parfois politiquement serrée à gérer, les dispositions légales sont pourtant claires.

1. Du principe du recouvrement.

Dès lors qu’un service n’a pas été fait mais que le traitement a tout de même été versé, il est possible de demander au fonctionnaire territorial de reverser ce qu’il a indûment perçu (J.-P. Wauquier, Aspects juridiques et comptables du paiement indu. Application aux collectivités territoriales dans leurs rapports avec leurs agents : Rev. Trésor mars 2003, p. 201).

Chaque année se posent au contentieux mais aussi devant d’autres institutions telles que le Médiateur de la République des cas mettant aux prises l’Administration et ses agents dans le cadre de réclamations de trop-perçus.

L’opération la plus directe est de mettre en œuvre la procédure de recouvrement forcée au titre de la répétition de l’indu pour « remboursement des trop-perçus ».

Concrètement, si une collectivité territoriale entend prétendre au recouvrement d’une somme à l’encontre de l’un de ses agents dans le but de faire opérer par le comptable public une compensation entre le montant des sommes dues à cet agent et le montant des sommes dues par lui.

Ainsi, une action en justice par la collectivité contre cet agent pour recouvrir ces sommes serait irrecevable (CE, 2 juillet 2007, commune de Lattes, n° 294393).

Si le traitement a été versé et qu’il y a absence ou insuffisance du service fait, l’Administration peut ordonner son reversement.

Notons que cette retenue de salaire n’est pas disciplinaire et donc il n’y a lieu à suivre une quelconque procédure contradictoire avant l’émission du titre de perception en vue du recouvrement du trop perçu de rémunération.

L’administration peut réclamer les sommes perçues à tort pendant 2 ans à partir du 1er jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement indu.

Le délai de réclamation du trop-perçu est au contraire de 5 ans si l’agent n’a pas informé l’administration du changement de sa situation ou a fourni des informations inexactes (circulaire relative au délai de prescription extinctive concernant les créances résultant de paiements indus effectués par les services de l’État en matière rémunération de leurs agents – article 37-1 de la loi n°2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations).

Cependant, attention, au terme d’un arrêt rendu par le Conseil d’État (12 octobre 2009), la responsabilité de l’administration peut être engagée si elle tarde à réclamer les sommes trop perçues par les agents.

Cette jurisprudence est cependant à nuancer puisque, la responsabilité de l’administration n’est engagée que si et seulement si, le trop-perçu a continué à être versé malgré le fait que la collectivité était informée de l’erreur.

2. Du recouvrement amiable sur le temps de travail.

En lieu et place d’un recouvrement forcé et comptable, il est également envisageable, avec l’accord de l’agent bien entendu, de solliciter une récupération de la créance sur le temps de travail.

Sur ce point, la doctrine administrative ainsi que la circulaire applicable fait référence aux dispositions de l’article 1289 du Code civil : « Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l’une envers l’autre, il s’opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes, de la manière et dans les cas ci-après exprimés. »

Attention, cet accord doit être rédigé « agent par agent » et acter de manière définitive et incontestable la récupération.

Ce protocole devra être rédigé au visa des dispositions des articles 2044 et suivants du Code civil.

Compte tenu de la spécificité des collectivités, nous ne pouvons que rappeler que le protocole d’accord transactionnel est cependant soumis aux dispositions de l’article L. 2122-21 du Code général des collectivités territoriale qui prévoit : « Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l’État dans le département, le maire est chargé, d’une manière générale, d’exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : [...] 7° De passer dans les mêmes formes les actes de vente, échange, partage, acceptation de dons ou legs, acquisition, transaction, lorsque ces actes ont été autorisés conformément aux dispositions du présent code ; [...]. »

Dès lors, la signature d’un protocole nécessite par principe l’accord de l’organe délibérant.

La signature de la transaction par l’exécutif local ne peut donc intervenir avant que la délibération de l’organe délibérant qui l’autorise n’ait acquis un caractère exécutoire.

Benjamin INGELAERE - Avocat Diplômé en Droit Public https://ingelaere-avocats.fr/ https://www.ing-avocat.legal