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Commentaire des articles 1585 et 1586 du Code civil. Par Ariel Dehi.
Parution : mercredi 1er août 2018
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La question liée à la détermination des choses de genre notamment celle relative aux différentes formes de vente de marchandises anime les débats au sein de la doctrine. Le code civil Napoléonien en ses articles 1585 et 1586 figurant au titre sixième, chapitre premier intitulé « De la nature et de forme de la vente » du Code civil [1] des obligations que nous devons commenter, va tenter d’apporter un certain nombre de précisions.

L’article 1585 dispose que : « Lorsque des marchandises ne sont pas vendues en bloc, mais au poids, au compte ou à la mesure, la vente n’est point parfaite, en ce sens que les choses vendues sont aux risques du vendeur jusqu’à ce qu’elles soient pesées, comptées ou mesurées : mais l’acheteur peut en demander ou la délivrance ou des dommages-intérêts, s’il y a lieu, en cas d’inexécution de l’engagement. »

Quant à l’article 1586, il dispose : « Si, au contraire, les marchandises ont été vendues en bloc, la vente est parfaite, quoique les marchandises n’aient pas encore été pesées, comptées ou mesurées. ».

Lors de l’élaboration de ces articles, les difficultés auxquelles le législateur a été confronté était de savoir quelle qualification juridique il fallait donner à la vente de marchandises en bloc et à une vente de marchandises au poids, au compte ou à la mesure.

L’enjeu est de taille, car il s’agissait pour le législateur de répondre à la question de la perfection de la vente en cas de vente en bloc ou en détail.

Pour traiter correctement les articles à nous soumis, nous nous intéresserons de prime abord à la qualification juridique des formes de vente de marchandises au sens des articles 1585 et 1586 du code civil (I) puis aux effets liées aux formes de vente de ces marchandises (II).

I- La qualification juridique des formes de vente de marchandises au sens des articles 1585 et 1586 du Code civil.

Les notions de vente de marchandises au poids, au compte ou à la mesure (A) et de vente de marchandises en bloc (B) sont utilisées par le législateur afin de préciser la nature juridique de la vente de marchandise.

A. Vente de marchandises au poids, au compte ou à la mesure : imperfection de la vente.

Au sens de l’article 1585 « Lorsque des marchandises ne sont pas vendues en bloc, mais au poids, au compte ou à la mesure, la vente n’est point parfaite(…) ».

Ainsi voit-on apparaître la qualification donnée par le législateur lorsque nous sommes dans le cas d’une vente de marchandise au poids, au compte ou à la mesure. De cette qualification se perçoit les termes "la vente n’est point parfaite ». Que faut-il entendre par ces termes ?

Pour répondre à cette interrogation, il nous faut préalablement définir la vente.
Ainsi au sens de l’article 1582 « la vente est une convention par laquelle l’un s’oblige à livrer une chose, et l’autre à la payer. ».
Pour revenir à notre question, nous partirons du principe que le consentement fait la vente.
De ce fait, quoique l’engagement qui donne l’essence à la vente existe, elle peut ne pas être toujours parfaite. Sa perfection dépend, dans certains cas de quelques circonstances qui l’accomplissent et c’est seulement lors de cet accomplissement qu’elle peut être considérée comme ayant réellement opéré la transmission de la propriété.

B. La vente en bloc : perfection de la vente.

L’article 1586 précise : « si, au contraire, les marchandises ont été vendues en bloc, la vente est parfaite, quoique les marchandises n’aient pas encore été pesées, comptées, mesurées. ».

A la lecture de cet article, le législateur qualifie une vente en bloc de parfaite sans tenir compte du fait que celle-ci soit au poids, au compte ou à la mesure.
En effet, si la vente est faite en bloc, elle est parfaite par le simple consentement comme s’il s’agissait d’un objet particulier sans qu’il soit nécessaire de rien compter ou mesurer.
L’élément déterminant ici est donc la perfection de vente et non sa quotité.
Après avoir fait une distinction entre les deux types de ventes sus mentionnées, le législateur n’a pas manqué de préciser les effets sur des différentes parties au contrat de vente.

Ainsi, quels sont les effets qui en découlent lorsque nous somme dans le cas d’une vente en bloc, ou d’une vente en détail ?

II- Effets liés aux différentes formes de vente de marchandises.

Nous sommes en présence d’une vente au poids, au compte, ou à la mesure (A) et d’une vente en bloc(B).

A. Vente au poids, au compte, ou à la mesure : risque pesant sur le vendeur.

L’article 1585 du code civil indique que : « (…) les choses vendues sont au risque du vendeur jusqu’à ce qu’elles soient pesées, comptées, ou mesurées (…) »

Il résulte de cet article que la vente existe à la réalité mais qu’on ne peut la considérer comme accomplit sans le concoure des éléments tel que la pesée, la comptée, ou la mesure.

La chose vendue est dès lors au risque du vendeur jusqu’à ce que ces éléments se produisent. En effet, si auparavant elles périssent, c’est pour le vendeur qui n’est pas encore dessaisit de sa propriété.

Aussi, l’article ajoute que « (…) l’acheteur peut en demander ou la délivrance ou les dommages et intérêts, s’il y a lieu, en cas d’inexécution de l’engagement. ».
A la lumière de cette disposition on s’aperçoit que le législateur permet à l’acheteur de bénéficier d’un privilège.

En effet, en cas d’inexécution de l’engagement du vendeur, l’acheteur peu exigé à ce que lui soit délivré la chose ou réclamer des dommages et intérêts. Le vendeur en plus de supporter les risques sera tenu de réparer le préjudice à l’acheteur.
Le législateur à travers cet article privilégie l’acheteur au détriment du vendeur. L’arrêt rendu le premier février 1983 par la Cour de Cassation Française, fut l’un des nombreux cas de jurisprudence qui a permis de conforté la position de l’acheteur lorsque nous somme dans le cas d’une vente au poids, au compte, ou à la mesure.

Quid des effets liés à la vente en bloc ?

B. La vente en bloc : transfert immédiat de propriété.

L’article 1586 précise que les marchandises vendues en bloc constituent une vente parfaite. En effet, lorsque la vente est parfaite et accomplie par le simple consentement, la chose vendue dès le moment même de ce consentement est au pouvoir de l’acheteur. Selon le principe solo consensus.
Elle est sa propriété. Dès lors, l’acheteur sera tenu de supporter les risques d’après la règle si connue : Res Perit Domino [2]. Ainsi, le transfert de propriété se fait dès l’échange de consentement, ce qui déchargera le vendeur de tout risque éventuel. Ce principe est absolu en la matière.

BIBLIOGRAPHIE
- Code civil des obligations de 1804.
- Arrêt de la Cour de cassation, première chambre civile, 1er février 1983- le Choix entre vente en bloc et vente au poids.

Ariel Dehi. https://www.facebook.com/AD.Lejuriste/

[1Article 1804 du Code civil

[2L’adage Res perit Domino est relatif aux transferts des risques dans le contrat ayant un effet translatif ( contrat de vente, donation …) cela signifie que si la chose a péri, ce sera le propriétaire de celle-ci d’en supporter la perte.

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