Village de la Justice www.village-justice.com |
Conseil de prud’hommes d’Agen, Départage, 5 février 2019 : un juge professionnel écarte le barème Macron des indemnités prud’homales ! Par Frédéric Chhum et Marilou Ollivier, Avocats.
|
Parution : vendredi 15 février 2019
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/conseil-prud-hommes-agen-departage-fevrier-2019-juge-professionnel-ecarte,30706.html Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur. |
Au fil des décisions, le Conseils de prud’hommes n’hésitent pas à remettre en cause le barème des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse mis en place par l’ordonnance Macron n°2017-1387 et prévu par l’article L.1235-3 du Code du travail.
Après les conseillers prud’homaux de Troyes [1], Amiens [2], Lyon [3], Grenoble [4] et Angers [5], c’est désormais un magistrat professionnel, le juge départiteur du Conseil de prud’hommes d’Agen, qui a écarté l’application de ce barème en raison de son inconventionnalité. [6]
Dans l’affaire qui a donné lieu au jugement du 5 février 2019, le juge départiteur a retenu que : « En l’espèce, il apparaît que la Société employait habituellement moins de 11 salariés et que Madame X avait une ancienneté dans l’entreprise inférieure à 2 années au moment de la rupture de son contrat, de sorte qu’elle ne pourrait prétendre selon l’article L. 1235-3 du Code du travail qu’à une indemnité comprise entre 0,5 mois et 2 mois de salaire brut, malgré les circonstances de la rupture de son contrat de travail et le préjudice moral et économique qu’elle a subi.[…]Il en résulte que le barème établi par l’article L. 1235-3 du Code du travail ne permet pas dans tous les cas une indemnité adéquate ou une réparation appropriée, ne prévoyant pas des indemnités d’un montant suffisamment élevé pour dissuader l’employeur et pour compenser le préjudice subi par le salarié. » (CPH Agen, Départage, 5 février 2019, n°18/00049)
En conséquence, le juge départiteur du Conseil de prud’hommes d’Agen a accordé à la salariée la somme de 4 mois de salaire à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit un mois en sus du plafond prévu par le barème.
C’est donc la première fois qu’un juge professionnel affirme de manière claire et non équivoque que le barème Macron prévoit un plafonnement qui contrevient aux normes internationales puisqu’il ne permet pas une réparation appropriée du préjudice subi par le salarié licencié sans cause réelle ni sérieuse.
Cette décision est un véritable coup dur pour le barème puisque tous les arguments développés par ses détracteurs sont entérinés par le magistrat.
Il convient néanmoins de rester prudents dans l’attente de décisions des Cours d’appel et, à terme, de la Cour de cassation qui aura le mot de la fin quant à l’inconventionnalité du barème.
D’autant plus qu’à l’inverse des décisions précitées, certains Conseils de prud’hommes ont au contraire affirmé la parfaite conventionnalité du barème de l’article L. 1235-3 du Code du travail.
Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum[1] CPH Troyes, Activités diverses, 13 décembre 2018, n°18/00036
[2] CPH Amiens, Industrie, 24 janvier 2019, n°18/00093
[3] CPH Lyon, Activités diverses, 21 décembre 2018, CPH Lyon, Commerce, 7 janvier 2019, n°15/01398 et CPH Lyon, Industrie, 22 janvier 2019, n°18/00458
[4] CPH Grenoble, Industrie, 18 janvier 2019, n°18/00989
[5] CPH Angers, Activités diverses, 17 janvier 2019, n°18/00046
[6] Cf. notre précédent article.