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Comment contester une contravention pour non-dénonciation de conducteur ? Par Amandine Valetout, Avocat.
Parution : mardi 9 avril 2019
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Une nouvelle loi a mis en place un procédé très vague et mal ficelé qui oblige le représentant d’une société à dénoncer le conducteur lors d’une infraction au code de la route. L’obligation de dénonciation met très mal à l’aise… mais c’est encore le dégré au-dessus quand le Gérant, ou Président de la société en question est seul dans son entreprise. Il doit aux termes de la Loi s’auto-dénoncer sous peine de se voir dans l’obligation de payer des amendes affreusement élevées. C’est ce qui est arrivé à un mes clients...

Ce dernier est Masseur-Kinésithérapeute, seul associé et seul gérant de sa SELARL.

Il se fait flasher par un beau jour de printemps et paie l’amende reçue. Quelques jours plus tard, il a la désagréable surprise de recevoir une deuxième contravention pour non-dénonciation de conducteur adressée à sa société. Il conteste à plusieurs reprises et reçoit un refus d’exonération et l’obligation de payer une amende majorée de 1.875 euros.

Après des nuits de cauchemars (à imaginer ce qu’il aurait pu faire avec ses 1.875 euros perdus), il contacte mon cabinet.

A la lecture de son dossier, je suis un peu dubitative. En effet, d’un côté la Loi prévoyant la dénonciation de conducteur est applicable à mon client mais d’un autre côté, un sentiment d’injustice naît en moi… Cette Loi oblige un gérant qui est seul dans sa société et qui ne possède même qu’un seul véhicule à se dénoncer ! Quelle situation ubuesque !

Alors, j’explique à mon client que c’est "quitte ou double" mais que je reste confiante malgré ce texte bancal.

Je rédige alors un courrier au Tribunal de Police pour expliquer les faits et obtenir le classement sans suite de la contravention.
Je m’appuie alors sur plusieurs arguments :
- Je démontre l’absurdité de la situation, mon client étant seul dans sa société et n’ayant qu’un véhicule de société.

- J’indique qu’il a payé l’amende pour excès de vitesse avec son chéquier personnel.

- Je rappelle l’esprit de l’article L121-6 du Code de la route. Ce dernier a été voté en vue de permettre la répression effective des conducteurs de véhicules de société commettant des infractions au volant. Il s’agissait d’éviter les « fraudes » des conducteurs employés d’une société lesquels pouvaient enchaîner les infractions tout en conservant leurs points sur leur permis. Le but de désigner une personne est que cette dernière paie l’amende, perde ses points et enfin reçoive un avis de contravention à son nom. Ce n’était pas du tout justifié dans la situation de mon client.

- Je mentionne également d’une part le montant de l’amende qui est tout simplement démentiel et d’autres parts les termes de l’article 131-41du code pénal qui énonce que :
« Le taux maximum de l’amende applicable aux personnes morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par le règlement qui réprime l’infraction. »
En l’espèce, le montant de l’amende initiale a été quintuplé alors qu’elle doit être payée par la personne physique et non par la personne morale. Ce montant est réellement disproportionné et contrevient aux dispositions de l’article sus-mentionné. J’indique enfin la jurisprudence qui a déjà rappelé cette règle.

Après seulement quelques jours d’attente, j’ai eu le plaisir de recevoir du Tribunal de Police un courrier indiquant le classement sans suite de la contravention. Ouf ! Mon client a pu retrouver le sommeil.

En conclusion, j’indiquerai qu’un bon courrier d’Avocat peut remplacer parfois une boîte de somnifères…

Maître Amandine VALETOUT Avocat au barreau de PERIGUEUX https://avocat-valetout-perigueux.fr/
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