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Prud’hommes : la requalification d’une démission en prise d’acte peut être portée directement devant le bureau de jugement. Par Frédéric Chhum, Avocat et Leonie Aubergeon, Juriste.
Parution : jeudi 3 octobre 2019
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La requalification d’une démission en prise d’acte aux torts de l’employeur peut-elle être directement portée devant le bureau de jugement ? C’est la question à laquelle devait répondre la Cour de Cassation (Cass. Soc. 18 septembre 2019).
Dans un arrêt du 18 septembre 2019 (n°18-15765), la Haute juridiction affirme que le salarié peut porter sa demande de requalification directement devant le bureau de jugement.

1) Contexte.

L’article L.1451-1 du Code du travail dispose que lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, le préliminaire de conciliation est supprimé au profit d’une saisine directe du bureau de jugement.

2) Faits et procédure.

Une salariée est engagée en 2009 en qualité d’assistante de direction.

En 2013, elle démissionne de son emploi et de son mandat de délégué du personnel.

Le 6 octobre 2014, la salariée saisit la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de sa démission en une prise d’acte aux torts de l’employeur.

L’affaire est portée directement devant le bureau de jugement.

Un appel est interjeté par l’employeur qui soutient que les demandes de la salariée sont prescrites. Il est débouté par la Cour d’Appel d’Aix en Provence dans un arrêt du 6 avril 2018.

L’employeur se pourvoit en cassation. Selon lui :
- Devant le Conseil de prud’hommes, l’affaire n’est portée directement devant le bureau de jugement que lorsque le salarié sollicite la qualification de la prise d’acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits que le salarié reproche à son employeur et non pas lorsqu’il a démissionné sans réserve ;
- L’action est prescrite lorsque le bureau de jugement est saisi de la qualification d’une démission sans réserve plus de deux ans à compter de celle-ci.

3) Solution et analyse.

La Cour de Cassation répond positivement et déclare le moyen non fondé au motif que « l’article 1451-1 du code du travail prévoit que, lorsque le conseil de prud’hommes est saisi d’une demande de qualification de la rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié en raison de faits que celui-ci reproche à son employeur, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d’un mois suivant sa saisine ».

Elle affirme que la Cour d’Appel a exactement décidé que, l’article L.1451-1 du Code du travail n’opérant pas de distinction entre une rupture du contrat de travail par prise d’acte et une rupture résultant d’une démission dont il est demandé la requalification, la salarié avait valablement saisi le conseil de prud’hommes le 6 octobre 2014 de sorte que sa demande n’était pas prescrite.

Cet arrêt doit être approuvé.

Sources.

Article 1451-1 du Code du travail.

Arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation du 18 septembre 2019, n°18-156765.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum