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Grenelle du droit 3 : une édition très politique.
Parution : mercredi 20 novembre 2019
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Vendredi 15 novembre 2019 avait lieu la 3ème édition du Grenelle du droit. Durant toute la matinée, se sont succédés les principaux représentants des professions du droit (avocats, juristes d’entreprise, notaires, magistrats) dont les prises de parole ont rythmé un programme qui débutait par une plénière, sur le thème « La société et le droit, vers un changement de paradigme », et qui s’est terminé par quatre ateliers, au choix.
La rédaction du Village de la Justice vous propose un condensé des principales prises de position faites durant cet événement à la fois politique et juridique.

La société et le droit : une plénière placée sous le signe du changement.

Pour débuter ce Grenelle, la réflexion a tourné autour des bouleversements que connaissent actuellement la société et le droit, et qui modifient en profondeur le rapport des professionnels du droit à la fabrique de la norme.

Marc Mossé, Président de l’AFJE : « Nos sociétés sont de plus en plus en demande de droit. »

Bertrand Savouré, Président de la Chambre des Notaires de Paris : « La parole de la norme doit être une parole rare. Plus elle sera immédiate, plus on aura un risque de contradiction. Nous avons une responsabilité historique dans l’élaboration du droit qui n’est pas la norme. »

Olivier Cousi, Bâtonnier désigné, Barreau de Paris : « Le droit sert à faire société. Or actuellement c’est la société qui fait le droit. Pour que la réponse soit efficace, la logique doit être dans l’adaptation au numérique. »
« Les avocats doivent se mettre à niveau et devenir des chefs de projet également. Ils doivent porter une éthique. L’avenir du juriste est devant nous. »

Le legal privilege pour rééquilibrer le rapport de forces.

La séquence la plus politique a porté sur le legal privilege, sujet au coeur du rapport du député Raphael Gauvain, et qui renvoie aux difficultés que rencontrent actuellement les entreprises françaises sur le plan international.

Raphael Gauvain, député et auteur du rapport Gauvain sur "l’avocat en entreprise" : « Le droit est le prolongement de la guerre économique. Le droit et les lois extra-territoriales sont le bras armé des États-Unis dans la défense de leur économie et de leurs entreprises. »

« Nous proposons une voie d’équilibre avec la création d’un tableau B au sein du Barreau pour les avocats salariés d’une entreprise. Ce serait une expérimentation, et le choix de l’entreprise se ferait selon les profils internes. L’avocat en entreprise n’aurait pas la possibilité de plaider pour son entreprise. »

Bernard Spitz, Président, Commission Europe du MEDEF : « Le MEDEF soutient le legal privilege. La question de l’extra-territorialité est une question économique et stratégique. Il faut rétablir l’équité au sein de la communauté internationale. »

Delphine Gallin, Présidente de l’ACE : « Je ne vois pas comment avancer positivement sans aller au combat et assumer une réforme pleine. Or certains barreaux en région y voient un point de rupture territoriale. Mais c’est surtout un moyen de se rapprocher de l’entreprise. »

Jean-François de Montgolfier, Directeur des affaires civiles et du Sceau, Ministère de la Justice : « Le rapport Gauvain est un nouveau paradigme. Cela laisse espérer qu’il ne connaîtra pas le destin des précédents rapports. Car cela sert les besoins des entreprises en droit et permet d’avoir pleinement confiance dans l’expertise des juristes d’entreprise. »

Marie-Aymée Peyron, Bâtonnier de Paris : « Nous voulons une profession : la grande profession du droit. Il ne doit pas y avoir un secret professionnel à deux vitesses. »

Des nouveautés pour illustrer l’avancée vers une grande profession du droit.

Durant cet événement, des annonces ont été faites, et notamment celle concernant le lancement, dès janvier 2020, d’une formation commune aux magistrats, avocats, et juristes d’entreprise, et baptisée « MAJ ».
Celle-ci se composera de trois cycles, composés de 3 modules, à savoir :
- « négociation : commerciale, corporate et judiciaire (du 24 janvier au 6 mars 2020) ;
- enquête : interne, administrative et judiciaire (du 15 mai au 26 juin 2020) ;
- gouvernance et RSE : performance extra-financière, pratique des droits de l’homme et judiciarisation de la RSE (du 25 septembre au 20 novembre 2020). »

Illustration de sa volonté de rassembler les trois grandes professions du droit, cette offre est « portée par les trois institutions de formations des trois métiers : l’EFB (École de formation du barreau), l’AFJE (Association française des juristes d’entreprise) et l’ENM. » [1] « 3 ans d’expérience professionnelle et de connaissances de base dans la matière traitée sont conseillés », précise la plaquette de présentation. Attention, le nombre des places est limité à 45 personnes : « 15 magistrats, 15 juristes d’entreprise, 15 avocats. »

Simon Brenot Rédaction du Village de la Justice

[1Lire l’article "Une formation commune aux juristes, avocats et magistrats dès 2020" des Editions législatives.