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Taxe d’enlèvement des ordures ménagères : record battu à Nice ! Par Christophe Pelloux, Avocat.
Parution : mardi 10 décembre 2019
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La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) fait partie des taxes foncières que tout propriétaire de bâti ou de non-bâti doit payer annuellement sur la valeur locative cadastrale déterminée au 1er janvier de l’année d’imposition.

Comme il va l’être développé ci-après, cette taxe a d’ores et déjà subi les foudres de plusieurs Tribunaux administratifs et Cours d’appel lorsque le taux est manifestement disproportionné (ex un excédent de 3.5 millions d’euros environ pour la Métropole de Lille).

A Nice, nous avons battu tous les records, comme vous allez pouvoir le constater.

Un peu de droit d’abord.

Aux termes des dispositions du I de l’article 1520 du Code Général des Impôts, « les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service de collecte et de traitement des déchets ménagers et des déchets mentionnés à l’article L. 2224-14 du Code général des Collectivités territoriales […] »

A ce stade, il importe de souligner que les déchets visés par l’article L. 2224-14 dudit Code sont les déchets non ménagers que ces collectivités peuvent, eu égard à leurs caractéristiques et aux quantités produites, collecter et traiter sans sujétions techniques particulières.

L’article L. 2333-76 du Code général des Collectivités territoriales, quant à lui, dispose que « les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l’article L. 2224-13 peuvent instituer une redevance d’enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu’ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages […] ».

Enfin, l’article L. 2333-78 du même Code pose l’obligation, pour les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes, d’instituer une redevance spéciale afin de financer la collecte et le traitement des déchets mentionnés à l’article L. 2224-14, « lorsqu’ils n’ont institué ni la redevance prévue à l’article L. 2333-76 du présent code ni la taxe d’enlèvement des ordures ménagères prévue à l’article 1520 du code général des impôts ».

Il résulte de l’application combinée des dispositions précitées, d’une part, que l’instauration de la redevance spéciale est obligatoire en l’absence de redevance d’enlèvement des ordures ménagères, et d’autre part, que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères n’a pas pour objet de financer l’élimination des déchets non ménagers, alors même que la redevance spéciale n’aurait pas été instituée.

En tout état de cause, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères n’a pas le caractère d’un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l’ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune pour assurer l’enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales.

Il s’ensuit que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant de ces dépenses, tel qu’il peut être estimé à la date du vote de la délibération fixant ce taux.

C’est notamment ce qu’a considéré le Conseil d’Etat dans deux arrêts de 2014 dans lesquels il a été jugé que le taux de la taxe d’enlèvement d’ordures ménagères ne doit pas être manifestement disproportionné par rapport au montant des dépenses exposées par la Collectivité pour assurer l’enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales.

Concernant Nice, La Métropole Nice Côte d’Azur est un Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI), organisme créé par la Loi n° 2010-1563, du 16 décembre 2010, sur la réforme des collectivités territoriales.

Elle regroupe depuis 2012 la Communauté Urbaine Nice Côte d’Azur, la Communauté de Communes de la Vésubie, la Communauté de Communes de la Tinée, la Communauté de Communes des stations du Mercantour et la Commune de la Tour-sur-Tinée.

Le Conseil métropolitain de la Métropole Nice Côte d’Azur est composé des 130 délégués des quarante-neuf communes membres de la Métropole.

Il se réunit en séance publique au moins une fois par trimestre et délibère, dans les domaines de compétence transférés par les communes, sur les dossiers suivants :

1 - Le vote du budget de l’institution et de la fixation des taux ou tarifs des taxes ou redevances,

2 - L’approbation du compte administratif,

3 - Les dispositions à caractère budgétaire prises par un EPCI à la suite d’une mise en demeure intervenue en application de l’article L 1612-15,

4 - Les décisions relatives aux modifications des conditions initiales de composition, de fonctionnement et de durée de l’EPCI,

5 - L’adhésion de l’établissement à un établissement public,

6 - La délégation de la gestion d’un service public,

7 - Les dispositions portant orientation en matière d’aménagement de l’espace communautaire, d’équilibre social de l’habitat sur le territoire communautaire et de politique de la ville.

L’analyse des délibérations de la Métropole NCA a fait état d’un trop perçu de 63 % à 70 % au titre des années 2014, 2015, 2016 et 2017, soit plus de soixante-cinq millions d’euros pour chacune de ces années, soit un total de 264.988.405 € de TEOM prélevées de manière indue.

Autrement dit, il apparaît qu’au titre de chacune des années précitées, le produit de la taxe d’enlèvement et de traitement des ordures ménagères a excédé de plus de soixante-cinq millions d’euros (soit 67% en moyenne par an) le coût global de traitement des déchets ménagers.

Christophe PELLOUX Avocat au Barreau de Nice Spécialiste en droit fiscal et droit douanier.
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